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Des morts de trop sur les rues de Kinshasa

Plusieurs hommes et femmes gisant sans vie dans des mares de sang sur les rues, des écoles primaires et secondaires pillées, des magasins et autres commerces vandalisés, des stations-services braquées et saccagées, des véhicules brulés, des sièges des partis de la Majorité et de l’Opposition ravagés, des avenues barricadées par des jeunes, certains ne semblant pas clairement comprendre les contours de la situation,… Voilà le sinistre tableau qu’a offert
Kinshasa le lundi 19 et mardi 20 septembre 2016 suite à la marche du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement, marquant, si l’on en croit les organisateurs, le début du préavis de trois mois de Joseph Kabila à la tête du pays. Et comme souvent dans pareilles circonstances, c’et la guerre des bilans. Selon le bilan de Police nationale lu à la RTNC, 34 personnes ont trouvé la mort.
 
Les organisateurs de la marche, de leur côté, sans plus de détails, présente un bilan humain plus lourd: 100 morts. S’il est évident qu’on ne saura jamais avec exactitude combien des citoyens RD-congolais sont morts le lundi, une chose devrait pourtant être prise en compte par tous: qu’un seul RD-Congolais meurt, policier ou manifestant soit-il, c’est une victime de trop.
Les Kinois ont été ébranlés le mardi matin par un événement d’une cruauté inouïe. Une petite fille en uniforme d’école a été brulée vive par les manifestants sur l’avenue Elengesa à hauteur du marché Mariano, dans la commune de Kalamu. Une scène horrible traduisant de la tension qui règne dans la capitale RD-congolaise. La ville ressemble à une zone de guerre.
 
Enfermées dans leurs maisons fuyant les crépitements des balles, les Kinois, pour ceux qui avaient l’électricité chez eux, sont restés scotchés devant leurs postes téléviseurs ou leurs téléphones -connectés aux réseaux sociaux- pour s’informer de ce qui se passe. La psychose est jusque-là palpable. Dans cette ambiance morose, les bilans de dégâts de la manifestation du Rassemblement pleuvent. L’Opposition dresse un bilan de 100 morts. Cependant, la Police nationale congolaise -PNC- parle 34 personnes tuées.
Côté dégâts matériels, la PNC signale le pillage de deux écoles primaires et secondaires: Madame de Sévigné, propriété du député national PPRD Willy Bakonga, dans la commune de Bandalungwa, et le collège Le Cartésien du député national Steve Mbikayi sur la 7ème rue Limete.
 
En plus, des agence d’Ecobank, Rawbank et ProCredit ont été également pillées à Matete, sans compter des nombreuses résidences, sièges des partis politiques de la Majorité -le PPRD, le Parti pour l’action de Kin-Kiey Mulumba, le Congrès national congolais de Pius Muabilu, l’ARC, le PDC,…-, de l’Opposition -permanence de l’UDPS à Limete, l’ATD de José Makila sur l’avenue de l’enseignement, dans la commune de Kasa-Vubu, l’UNC,…- même le siège de la Nouvelle Société civile du Congo de Jonas Tshombela n’a pas été épargné.
A qui profitent ces morts?
 
Sur la toile, des internautes, RD-Congolais et étrangers s’interrogent devant ces affres: «A qui profitent ces morts… ces violences? En tout cas pas au peuple RD-congolais qui en est la principale victime. Durant ces deux jours, les Kinois ont assisté impuissants aux meurtres, par armes à feu ou armes blanches, de leurs frères, sœur et même de leurs jeune enfants. «Vous -Ndlr: les RD-Congolais- me faites flipper avec tous ce que j’entends… Comme partout malheureusement l’amour du pouvoir et du capitalisme a touché là où ça fait mal», s’émeut une Française d’origine maghrébine, Fatouma Katoufe sur whatsApp.
 
Cependant, devant cette situation de quasi insurrection, les politiciens se rejettent mutuellement la responsabilité. «Nous avons constaté dès la matinée de ce lundi 19 septembre que dans certaines commune de Kinshasa, des bandes organisées composées d’inciviques surexcités dont certains en armes se sont attaqués aux paisibles citoyens», avance le gouverneur de la ville de Kinshasa André Kimbuta avant d’ajouter: «je condamne avec la dernière énergie ces actes de barbarie commis sous prétexte d’une revendication politique. Je rappelle aux organisateurs les dispositions de la loi sur les manifestations publiques dans notre pays qui les tiennent pour responsables des dérapages survenus du fait de leurs militants ou sympathisants».
La PNC, elle, estime qu’il y a eu complot dans le chef des organisateurs pour but de «déstabiliser les institutions de la République par une démarche insurrectionnelle et anticonstitutionnelle». «Plusieurs interpellations ont été opérées à l’encontre de 113 personnes qui seront déférées devant l’officier du Ministère public. La récupération des biens pillés par les manifestants est en cours», ont fait savoir les forces de l’ordre.
 
«Le gouvernement sait que la marche était pacifique. C’est eux qui ont envoyé les escadrons de la mort tirer sur les manifestants à balles réelles. Il n’y a pas eu des voyous, la marche était très bien encadrée par les dirigeants du Rassemblement. C’est le gouvernement qui a organisé les violences pour justifier l’interdiction de la marche», soutient Bruno Tshibala de l’UDPS sur «RFI».
Hugo Robert MABIALA

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