Depuis 1960, les seuls progrès réalisés avec pompe se traduisent en termes de démographie, les RD-Congolais sont passés de 15 à environ 80 millions aujourd’hui et des universitaires; le Franc congolais qui valait USD 2 s’est déprécié. Le dollar américain se change à ce jour à 1500 FC, les fonctionnaires sont sous payés pendant que l’insécurité bat son plein dans l’Est du pays et dans le Kasaï
Vendredi 30 juin 2017, la RD-Congo célèbre son 57ème anniversaire d’indépendance. A 57 ans d’âge, l’expérience est acquise et le progrès social, politique, économique et éducationnel boosté. Un programme bien établi avec des objectifs bien ciblés conduit les pays à l’économie intermédiaire puis à l’émergence et enfin au développement. Mais le constat est amer pour la RD-Congo. Depuis son accession à la souveraineté nationale et internationale le 30 juin 1960, le pays continue à connaitre des événements tragiques qui freinent son développement et les conciliabules politiques ne favorisent qu’une petite poignée de compatriotes au détriment du peuple souverain. Table-Ronde de la Belgique, le Conclave de Lovanium, la Constitution de Luluabourg, le Palais de marbre, la Conférence nationale souveraine -CNS-, Utenika, Sun City, la Cité de l’Union africaine avec Edem Kodjo ainsi que l’Accord de la CENCO, aucun de ces Accords ne garantit le bien-être de la population au point que dans sa dernière sortie médiatique le 23 juin dernier, la Conférence épiscopale nationale du Congo -CENCO a déclaré que le pays va très mal. Coup d’œil sur les 57 ans d’indépendance de la RD-Congo.
Le jeudi 30 juin 1960, c’est Joseph Kava-Vubu, premier Président de la République qui proclame la naissance de la République du Congo. Dans son discours, l’homme salue le travail abattu par les Belges au Congo. «La Belgique a eu alors la sagesse de ne pas s’opposer au courant de l’histoire et, comprenant la grandeur de l’idéal de la liberté qui anime tous les cœurs congolais, elle a su, fait sans précèdent dans l’histoire d’une colonisation pacifique, faire passer directement et sans transition notre pays de la domination étrangère à l’indépendance, dans la pleine souveraineté nationale», déclare le président Kasa-Vubu sous les applaudissements. Puis: «Mais, si nous pouvons nous réjouir de cette décision, nous ne devons pas oublier que c’est à nous désormais à prendre le relais et à rassembler les matériaux de notre unité nationale, à construire notre nation dans l’union et dans la solidarité. Nous disposons pour cela d’un large éventail de moyens, mais il faudra que nous les utilisions avec sagesse, sans hâte ni lenteur, avec le souci de s’adapter harmonieusement au rythme normal des choses, sans essouffler les populations par une marche trop rapide qui les laisserait hors d’haleine sur le bord de la route, mais sans se complaire non plus dans une admiration béate de ce qui est déjà fait».
Bien avant lui, le Roi des Belges, Roi Baudouin, vante l’œuvre de la colonisation. «Pendant 80 ans la Belgique a envoyé sur votre sol les meilleurs de ses fils, d’abord pour délivrer le bassin du Congo de l’odieux trafic esclavagiste qui décimait ses populations, ensuite pour rapprocher les unes des autres les ethnies qui jadis ennemies s’apprêtent à constituer ensemble le plus grand des États indépendants d’Afrique; enfin pour appeler à une vie plus heureuse les diverses régions du Congo que vous représentez ici unies en un même Parlement», dit-il. Et d’ajouter: «lorsque Léopold II a entrepris la grande œuvre qui trouve aujourd’hui son couronnement, Il ne s’est pas présenté à vous en conquérant mais en civilisateur. Le Congo, dès sa fondation, a ouvert ses frontières au trafic international, sans que jamais la Belgique y ait exercé un monopole institué dans son intérêt exclusif. Le Congo a été doté de chemins de fer, de routes, de lignes maritimes et aériennes qui, en mettant vos populations en contact les unes avec les autres, ont favorisé leur unité et ont élargi le pays aux dimensions du monde. Un service médical, dont la mise au point a demandé plusieurs dizaines années, a été patiemment organise et vous a délivré de maladies combien dévastatrices. Des hôpitaux nombreux et remarquablement outillés ont été construits. L’agriculture a été améliorée et modernisée. De grandes villes ont été édifiées et, à travers tout le pays, les conditions de l’habitation et de l’hygiène traduisent de remarquables progrès. Des entreprises industrielles ont mis en valeur les richesses naturelles du sol. L’expansion de l’activité économique a été considérable, augmentant ainsi le bien être de vos populations et dotant le pays de techniciens indispensables à son développement».
C’est le discours de Lumumba, Premier ministre qui ne figure pas au programme officiel qui va mettre les Belges mal à l’aise et le pays en fait les frais aujourd’hui, car les Belges ont décidé de le tuer physiquement et politiquement. Lumumba est déterminé dans ses propos et ne fait aucun cadeau au colonisateur comme l’a fait le Président Kasa-Vubu.
«Car cette Indépendance du Congo, si elle est proclamée aujourd’hui dans l’entente avec la Belgique, pays ami avec qui nous traitons d’égal à égal, nul Congolais digne de ce nom ne pourra jamais oublier cependant que c’est par la lutte qu’elle a été conquise -applaudissements-, une lutte de tous les jours, une lutte ardente et idéaliste, une lutte dans laquelle nous n’avons ménagé ni nos forces, ni nos privations, ni nos souffrances, ni notre sang. Cette lutte, qui fut de larmes, de feu et de sang, nous en sommes fiers jusqu’au plus profond de nous-mêmes, car ce fut une lutte noble et juste, une lutte indispensable pour mettre fin à l’humiliant esclavage qui nous était imposé par la force. Ce que fut notre sort en 80 ans de régime colonialiste, nos blessures sont trop fraîches et trop douloureuses encore pour que nous puissions le chasser de notre mémoire. Nous avons connu le travail harassant exigé en échange de salaires qui ne nous permettaient ni de manger à notre faim, ni de nous vêtir ou nous loger décemment, ni d’élever nos enfants comme des êtres chers. Nous avons connu les ironies, les insultes, les coups que nous devions subir matin, midi et soir, parce que nous étions des nègres». Puis: «Nous allons revoir toutes les lois d’autrefois et en faire de nouvelles qui seront justes et nobles. Nous allons mettre fin à l’oppression de la pensée libre et faire en sorte que tous les citoyens puissent jouir pleinement des libertés fondamentales prévues dans la déclaration des Droits de l’homme».
57 ans après, la promesse de Lumumba de faire de la RD-Congo le centre de rayonnement de l’Afrique ne s’est pas réalisée. Les ouvrages laissés par les Belges sont vétustes. Les médecins, les infirmiers et autres fonctionnaires de l’Etat ne perçoivent pas un salaire qui leur permet de nouer les bouts du mois. Les enseignants, n’en parlons pas. Ce sont les parents qui prennent en charge les frais d’études de leurs enfants. Pas de bourse d’études à l’université. La gratuité de l’enseignement primaire consacré dans la Constitution du 18 février 2006 est un mirage. Les cinq chantiers de la République transformés en Révolution de la modernité par Joseph Kabila souffrent de réalisation à cause de détournement des deniers publics. L’initiateur de ce vaste projet, Joseph Kabila, s’était plaint par le passé qu’il n’a pas 15 personnes de convaincues pour l’épauler.
A l’heure actuelle, tous les signaux sont au rouge au plan social, politique et économique. Ce qui a poussé les évêques catholiques à déclarer que la RD-Congo va très mal. «La corruption, l’évasion fiscale, le détournement de fonds publics ont atteint des proportions inquiétantes à tous les niveaux. Un groupe de compatriotes, abusant manifestement de leur pouvoir, s’octroient des avantages économiques faramineux au détriment du bien-être collectifs», ont-ils dit. Le franc congolais perd sa valeur au jour le jour. Et l’ancien Premier ministre Adolphe Muzito a sonné un cri d’alarme en notant qu’«à défaut d’une reprise de coopération avec le Fonds monétaire international -FMI- et la Banque mondiale -BM-, le dollar risque de se changer à 2000 FC avant la fin de l’année». Les pressions montent pour l’organisation des élections fin décembre 2017. Sur le terrain, tous les paramètres ne sont pas réunis. Violences dans le Kasaï où on a découvert plus de 40 fosses communes, évasions massives dans les prisons de la RD-Congo, attaques répétées par les groupes armées dans l’Est du pays, sanctions européennes contre certaines autorités politico-militaires RD-congolaises. C’est dans ce climat de frustration et de tensions que la RD-Congo fête son 57ème anniversaire dans la médiation.
Octave MUKENDI
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