«Cette dérive du franc congolais était prévisible. Elle est la conséquence du maquillage des chiffres érigé en système de gouvernance durant ces 5 dernières années», a tapé le patron des patrons à la faveur de la présentation des vœux du patronat RD-congolais aux responsables des Institutions de la République.
Augustin MatataPonyoMapon, l’ancien Premier ministre de la République, est dans sa retraite à Kindu, où il s’est replié quelques jours après sa démission de la Primature. Des sources confient qu’il s’adonne à deux occupations principales: il se consacre à des réunions avec des professeurs d’université payés pour des études électorales en prévision d’une éventuelle course à la prochaine présidentielle s’il n’est pas entre sa résidence de la commune de Kasuku et son ranch situé dans la commune de Mikelenge, où il construit une nouvelle université, en plus d’un terrain de football et d’un nouveau pavillon destiné à renforcer l’hôpital de Lumbulumbu, fruit de sa collaboration avec l’homme d’affaires Dan Gertler.
Mais cette retraite risque de ne pas être paisible tant, depuis Kinshasa, l’ex-MP est la cible des attaques virulentes de la part du président de la Fédération des entreprises du Congo -FEC-, Albert Yuma Mulimbi, l’un de ses plus grands pourfendeurs.
Politique de l’usure et de la pensée unique
A la faveur de la cérémonie de présentation des vœux du patronat RD-congolais aux responsables des Institutions de la République, notamment le Parlement, le gouvernement ainsi que le pouvoir judiciaire, Albert Yuma dont les pertinentes analyses économiques font autorité, est revenu sur la situation économique et sociale de la RD-Congo, avouant que les opérateurs économiques ont eu l’impression que le gouvernement précédent, celui de MatataPonyo, «pratiquait la politique de l’usure en laissant les chefs d’entreprise s’époumoner et s’essouffler tout en continuant tranquillement sa politique de la pensée unique».
A part ce pamphlet, que d’autres diatribes, que de coups de gueule contre MatataPonyo. Comme dans ce passage où Yuma affirme que le développement économique passe en priorité par l’investissement agricole et industriel de la RD-Congo afin de fournir de manière durable à nos populations emplois, pouvoir d’achat et dignité avant d’asséner: «Bien sûr, vous aurez compris que quand je parle d’investissement agricole, il ne s’agit pas d’aller verser des centaines de millions de dollars dans du sable». Pas besoin d’un dessin pour comprendre que l’homme d’affaires s’en prend au projet Bukangalonzo.
Forte dépendance de l’économie RD-congolaise aux revenus des activités extractives
Puis, Albert Yuma parle du «fameux» bilan dont le gouvernement sortant nous atant rabattu les oreilles qui, «depuis si longtemps, devrait probablement être revu à l’aune de la situation économique déplorable que vivent au jour le jour nos concitoyens et de l’état du compte général du Trésor aujourd’hui».
Yuma attribue également une mauvaise cote à Matata pour n’avoir pas fait assez ou rien entrepris du tout pour atténuer la forte dépendance de l’économie RD-congolaise aux revenus des activités extractives, renforçant «la tendance générale baissière, relativisant malheureusement d’autant les bonnes performances des années passées».
Autres cadeaux empoisonnés légués par Matata selon Yuma: la forte réduction des recettes fiscales et la révision à la baisse du budget de l’Etat avec leurs conséquences négatives sur la capacité d’investissement de l’Etat, le niveaude l’offre des services publics des RD-Congolais et la consommation intérieure.
Conséquences du maquillage des chiffres érigé en système de gouvernance ces cinq dernières années
Chiffres à l’appui, Yuma rappelle à Matata ses dernières mauvaises performances: le taux de croissance du PIB, après avoir été revu plusieurs fois au courant de l’année, s’est finalement établi à 2,5% contre 7,5% en 2015.
Le taux d’inflation en glissement annuel s’est établi à plus de 7% à fin décembre 2016 en dépassement de plus de 2,7 points de pourcentage par rapport à la cible annuelle de 4,2%.Les réserves de change ont fondu à 861 millions de dollars à fin novembre 2016, représentant seulement 3,84 semaines d’importation des biens et services.
De son côté, le taux moyen de change s’est fixé à mi-décembre 2016 à 1.215 francs congolais par rapport au dollar américain. Ce taux était de 920 CDF/USD à fin décembre 2015. Le taux parallèle est aujourd’hui à 1.260 CDF/USD.
«Cette dérive du franc congolais était prévisible», laisse entendre Yuma expliquant qu’elle «est la conséquence du maquillage des chiffres érigé en système de gouvernance durant ces 5 dernières années». Inutile d’écrire noir sur blanc le nom du maquilleur tant tout le monde a encore fraîche en mémoire l’image du locataire de la Primature entre 2012 et 2016.
AKM
Discours intégral d’Albert Yuma, président national de la FEC à l’occasion de la cérémonie de présentation des vœux aux opérateurs économiques et aux corps constitués
Honorable Président de l’Assemblée nationale,
Honorable Président du Sénat,
Excellence Monsieur le Premier ministre,
Excellences Messieurs les vice-Premiers ministres,
Excellences Messieurs les ministres d’Etat,
Excellences Mesdames et Messieurs les ministres,
Monsieur le Président de la Cour constitutionnelle,
Monsieur le Premier Président de la Cour suprême de justice,
Monsieur le Procureur général de la République,
Monsieur le Directeur de cabinet du Président de la République,
Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et chefs de missions diplomatiques,
Monsieur le Gouverneur de la ville de Kinshasa,
Monsieur le Gouverneur de la Banque centrale du Congo,
Mesdames et Messieurs les Membres du Conseil d’administration de la FEC,
Mesdames et Messieurs les Présidents et Secrétaires généraux des organisations professionnelles d’employeurs et de travailleurs,
Chers Membres de la FEC,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
C’est toujours un plaisir de commencer la nouvelle année, entouré de vous tous, prestigieux invités et qui pour la plupart sont des proches de notre fédération. Je suis très heureux de vous saluer et de vous souhaiter, au nom du Conseil d’administration de la Fédération des entreprises du Congo, la bienvenue. Je tiens à saluer d’une manière toute particulière Son Excellence Monsieur le Premier ministre, chef du gouvernement, Monsieur Samy Badibanga, pour sa présence parmi nous, accompagné de membres de son gouvernement, et ce malgré les nombreuses urgences et défis qu’il doit, depuis sa prise de fonction, relever pour garantir la stabilité politique et économique de notre pays. Soyez remercié Excellence de cette marque d’intérêt à notre endroit, et à travers nous, aux opérateurs économiques de ce pays. Que le Seigneur Notre Dieu, à qui il a plu une fois de plus, de nous donner l’occasion de nous retrouver ce soir afin d’échanger les vœux à l’occasion de la nouvelle année 2017 soit remercié, et que des actions de grâce lui soient rendues.
Vous me permettrez, avant toute chose, de présenter à Son Excellence Monsieur Joseph Kabila Kabange, Président de la République et Chef de l’Etat, mes vœux de santé, de prospérité, de persévérance et de réussite dans sa lourde tâche de veiller constamment à la recherche de la paix, de la sécurité et du bonheur de chaque RD-Congolaise et RD-Congolais ainsi que de tous les étrangers qui ont choisi la RD-Congo comme leur seconde patrie. Je voudrais aussi souhaiter pour l’an 2017 à la distinguée Première dame maman Olive Lembe Kabila, mes vœux les meilleurs de bonheur et de santé. Au Premier ministre, chef du gouvernement d’Union nationale, je profite de cette occasion pour lui renouveler de vive voix mes vives et chaleureuses félicitations pour sa nomination. Nous voudrions vous rassurer Excellence de l’appui sans faille de la FEC dans l’accomplissement de votre mission, dont nous connaissons tous, tant l’ampleur, que la complexité. Acceptez, Excellence, mes vœux de succès et de réussite.
J’adresse également mes meilleurs vœux à tous les Hauts responsables des institutions de la République, à savoir, le Parlement, le gouvernement, le pouvoir judiciaire, l’Armée, la Police, au corps diplomatique, aux partenaires bilatéraux et multilatéraux, aux partenaires sociaux, à toute la population RD-congolaise dans sa grande diversité, à tous les étrangers vivant au Congo, ainsi qu’à tous les opérateurs économiques RD-congolais. Enfin bien sûr, je voudrais présenter à chacun de vous tous ici présents et à vos familles respectives, mes vœux les meilleurs de santé, de prospérité et de réussite dans vos vies personnelles comme dans vos vies professionnelles. Au moment où nous nous retrouvons par la Grâce de Dieu, en ce début d’année 2017, plusieurs personnes qui nous étaient chères ont été arrachées à notre affection en 2016.
Je pense particulièrement à tous les RD-Congolais victimes des attaques barbares perpétrées par les groupes armés à l’Est du pays, à tous les opérateurs économiques ainsi qu’à ceux qui ont perdu la vie à la suite des accidents, épidémies et autres calamités. Je pense également aux innocentes victimes touchées dans le monde par d’abominables attentats terroristes qui visent à opposer les communautés, les unes aux autres. Puisse faire le ciel que les peuples ne se laissent point entrainer par ces appels à la haine. En vue d’élever nos pensées vers tous ceux qui souffrent de maladies, des affres de la guerre, de persécutions politiques ou religieuses et de terrorisme, et en mémoire de toutes les personnes qui nous ont quittés, je vous prie d’observer une minute de silence. Merci.
La cérémonie de présentation des vœux a toujours été l’occasion pour la Fédération des entreprises du Congo de dresser le panorama de l’année écoulée, de faire le bilan des actions passées et de formuler ses propositions pour l’année à venir. Mais comme vous l’aurez noté, nous ne sommes pas dans une année tout à fait normale. Par le dialogue inclusif national voulu par le Président de la République Joseph Kabila Kabange, par l’intervention de l’Union africaine et de son médiateur Edem Kodjo dont je salue l’action, par l’intervention des principales forces morales de ce pays, dont particulièrement l’Eglise catholique à travers la CENCO, que je remercie de son initiative d’élargir l’accord de la Cité de l’Organisation de Union africaine, par l’esprit de responsabilité de notre classe politique, par la maturité dont notre peuple a su faire preuve face à l’adversité, notre nation a su surmonter une situation que certains prédisaient tragique. Cela n’a pas été le cas et nous nous en réjouissons tous et surement aussi nos amis de la Communauté internationale.
Nous disposons aujourd’hui d’un cadre politique, qui va sans doute être encore affiné par les négociations en cours au Centre interdiocésain, qui permet à notre gouvernement d’Union nationale de tracer des perspectives ambitieuses et réalistes pour l’avenir, devant nous mener, entre autres, à de futures élections, crédibles, libres et transparentes. Mais néanmoins, Monsieur le Premier ministre, ce ne sera pas votre seule mission. Bien d’autres défis vous attendent, au premier rang desquels la situation économique et sociale de notre pays dont dépend sa stabilité et sans laquelle, malheureusement, toutes nos prévisions ne resteront que de vaines spéculations. Et comme vous avez pu déjà le remarquer depuis votre remise-reprise, cette situation économique dont vous héritez est dramatique. Alors, comme nous avons l’honneur de pouvoir vous accueillir, avec certains des plus éminents membres de votre gouvernement, je vais me permettre de vous faire part de nos priorités pour le développement de ce pays et qui devraient enfin permettre de faire sortir notre population de la situation de misère que cinq années de faux discours, de faux bilans macro-économiques, de politiques fiscales aventureuses et de projets budgétivores, sans impact social, ont aggravé. Je vais donc prononcer les vœux des opérateurs économiques, pour une nation qui se donnerait les moyens de prendre son avenir en main, pour une nation qui nous le pensons, devrait saisir l’opportunité de ce moment d’unité politique nationale pour s’unir autour d’un projet économique commun et tracer les perspectives de son développement. J’espère, contrairement au passé, que je serais entendu. Car en effet, nous avons eu, avec le gouvernement qui vous a précédé, l’impression qu’il pratiquait la politique de l’usure en laissant les chefs d’entreprise, s’époumoner et s’essouffler tout en continuant tranquillement sa politique de la pensée unique.
Ces vœux, Excellence, Monsieur le Premier ministre, s’appuient sur une triple conviction. La première, c’est que le développement économique de la RD-Congo doit résolument être fondé sur son développement local et cesser d’attendre des cours mondiaux des matières premières son salut. La seconde, c’est que, comme nous l’avons demandé depuis de nombreuses années à la FEC, s’inscrivant en cela dans la direction donnée par le Président de la République, Joseph Kabila Kabange, que ce développement économique passe en priorité par l’investissement agricole et industriel de notre pays afin de fournir de manière durable à nos populations, emplois, pouvoir d’achat et dignité. Bien sûr, vous aurez compris que quand je parle d’investissement agricole, il ne s’agit pas d’aller verser des centaines de millions de dollars dans du sable. La troisième, c’est que pour pouvoir développer un secteur économique performant qui finance par l’impôt les biens publics de la nation, les opérateurs économiques doivent pouvoir s’appuyer sur un Etat fort, qui les comprend, les accompagne et les protège. Je le disais il y a un instant, le développement économique de la RD-Congo doit être d’abord fondé sur sa base nationale et ne plus dépendre des circonstances extérieures. C’est ce que la Banque mondiale dans une de ses récentes parutions a intitulé: «Renoncer à la chance et opter pour des politiques publiques».
Nous avons pendant des années, assis notre développement sur nos ressources naturelles, soit par leur exploitation directe, voire, indirectement, encouragés en cela par certaines institutions multilatérales qui voulaient que nous déléguions à d’autres la gestion opérationnelle de nos ressources, pour nous concentrer sur la gestion financière des partenariats. Or quel est le bilan que nous pouvons en faire? A l’exception d’années fastes, pour le dire vite, entre 2012 et 2015, tirées par une croissance que d’aucuns considèreront bientôt comme une anomalie de l’histoire économique mondiale, les attentes n’ont pas été au rendez-vous. Certes, l’Etat a bénéficié de recettes fiscales exceptionnelles générées par des cours extrêmement élevés, mais cela a-t-il changé durablement le quotidien des RD-Congolais, ou cette situation n’aura-t-elle été finalement qu’une parenthèse dans les difficultés vécues au quotidien par nos concitoyens, qui comme nous pouvons le voir aujourd’hui réapparaissent à mesure que les cours retrouvent des valeurs plus conformes à celles que nous avions toujours connues sur des périodes longues. Le «fameux» bilan, dont on nous a tant rebattu les oreilles, et depuis si longtemps, devrait probablement être revu à l’aune de la situation économique déplorable que vivent au jour le jour nos concitoyens, et de l’Etat du compte général du Trésor aujourd’hui. Cette conviction, que notre avenir ne peut dépendre d’une économie fondée sur le développement national est renforcée par l’analyse de la conjoncture mondiale qui n’offre à court terme aucune perspective réelle de reprise.
Le FMI et la BM nous renseignent, une nouvelle fois malheureusement, que l’activité économique a enregistré un léger recul en 2016 comparé à 2015. La croissance mondiale se situerait à 3,1% en 2016 contre 3,2% en 2015. Pour les pays avancés, la croissance ne serait que de 1,6%, contre 2,1% l’année passée. Cette situation est une nouvelle fois justifiée par la baisse des cours mondiaux des produits de base, la permanente dégradation des perspectives pour les pays avancés ainsi que par un environnement politique mondial extrêmement tendu au Moyen-Orient, en Europe, voire entre les grands de ce monde que sont les USA, la Russie et la Chine, dont les relations sont assez incertaines et à tout le moins attentistes. On pourrait penser que la reprise des économies émergentes qui ont connu une relative reprise en 2015, leur croissance a été estimée à 4,2% en 2016 contre 4% une année auparavant, pourrait nous permettre de tirer notre épingle du jeu.
Malheureusement ce n’est pas le cas. Notre continent, l’Afrique subsaharienne, n’en a pas profité pas avec une croissance plafonnée en 2016 par la BM ou le FMI entre 1,4% et 1,6% poursuivant ainsi sa tendance baissière inférieure à la moyenne mondiale. Ce ralentissement est naturellement consécutif à la persistance des niveaux bas des cours des matières premières et frappe plus durement les pays exportateurs qui avaient fait de la rente le seul axe de développement. Il n’est d’ailleurs pas inutile de constater que les prévisions 2017 en Afrique, mettent en haut du tableau, avec des objectifs de croissance égaux ou supérieurs à 5%, la Côte d’Ivoire, la Tanzanie, le Sénégal ou l’Ethiopie, qui ne sont pas majoritairement des pays exportateurs, bien au contraire, mais qui sont ceux, comme l’a indiqué l’économiste en chef de la Banque mondiale «les pays qui disposent d’un cadre de gestion macro-économique plus solide et d’une réglementation plus favorable aux activités commerciales. Leurs exportations sont plus diversifiées et leurs institutions plus efficaces». Fermez le ban.
A la lecture de ces quelques grands chiffres, je ne peux donc que faire le constat que notre salut, tout du moins à court terme, ne viendra pas de la demande extérieure. Et quand bien même ce serait le cas, je ne pense pas que cela serait de bonne et saine administration que de continuer à vendre nos matières premières pour importer des biens de consommation courante que pour certains d’entre eux, nous pourrions dès aujourd’hui produire nous-mêmes. Comme le disait un économiste allemand des siècles passés, dont je fais mienne la citation: «La Faculté de produire de la richesse est plus importante que la richesse elle-même; elle assure non seulement la progression et l’augmentation de ce qui a été gagné, mais aussi du remplacement de ce qui a été perdu». Friedrich List n’était pas RD-Congolais, mais avait déjà formidablement bien synthétisé la situation que nous vivons aujourd’hui et les choix que nous avons à engager.
Dans ce contexte extrêmement difficile de dépendance aux revenus des activités extractives, notre pays n’a malheureusement pas pu faire mieux que de suivre la tendance générale baissière, relativisant malheureusement d’autant les bonnes performances des années passées. En conséquence de quoi, les recettes fiscales se sont fortement réduites et le gouvernement s’est vu obligé de procéder à une révision à la baisse du budget avec les conséquences négatives sur la capacité d’investissement de l’Etat, le niveau de l’offre des services publics des RD-Congolais et la consommation intérieure. L’activité économique en RD-Congo a par ailleurs pâti des contraintes récurrentes d’un environnement des affaires et des investissements peu attractifs auquel s’est ajouté de manière circonstancielle, l’inévitable attentisme lié à l’approche des échéances électorales.
Ainsi pour 2016, selon les autorités RD-congolaises:
• le taux de croissance du PIB, après avoir été revu plusieurs fois au courant de l’année, s’est finalement établi à 2,5% contre 7,7% en 2015.
•le taux d’inflation en glissement annuel s’est établi à plus de 7% à fin décembre 2016 en dépassement de plus de 2,7 points de pourcentage par rapport à la cible annuelle de 4,2%.
•les réserves de change ont fondu à 861 millions de dollars américains à fin novembre 2016, représentant seulement 3,84 semaines d’importation des biens et services.
•le taux moyen de change s’est fixé à mi-décembre 2016 à 1.215 francs congolais par rapport au dollar américain. Ce taux était de 920 CDF/USD à fin décembre 2015. Le taux parallèle est aujourd’hui à 1260 CDF/USD. Cette dérive du FC était bien prévisible. Elle est la conséquence du maquillage des chiffres érigé en système de gouvernance durant ces 5 dernières années.
Autant dire tout de suite, Monsieur le Premier ministre que la situation dont vous héritez est particulièrement difficile et qu’il sera probablement nécessaire dans les prochaines semaines qu’avec nos partenaires étrangers, un appui budgétaire puisse être apporté à la RD-Congo pour que les espoirs permis par les récents accords politiques, ne soient pas douchés par une crise économique et sociale, qui serait probablement encore plus dévastatrice, qu’une crise politique. En effet, personne ne commandera, ni ne contrôlera une population désespérée. Dans cette situation difficile que faire pour qu’enfin notre pays trouve la voie d’un développement économique équilibré? Les recettes sont connues, elles ont été à de nombreuses reprises énoncées, mais malheureusement sans succès. La direction à suivre nous a été montrée, d’abord par le Chef de l’Etat lui-même à de nombreuses reprises, et encore très récemment dans la mission qu’il vous a assignée, Monsieur le Premier ministre, notamment celle de, je cite: «prendre des mesures visant,…, à améliorer la résilience de notre économie et à permettre une croissance soutenue de cette dernière grâce à une politique de diversification économique et d’industrialisation qui accorde une meilleure place aux secteurs porteurs dont l’agriculture, et qui privilégie les Zones économiques spéciales comme stratégie de mise en œuvre».
Monsieur le Premier ministre, vous-même vous en êtes fait l’écho lors de votre discours d’investiture prononcé le 22 décembre dernier devant l’Assemblée nationale; je cite: «Faute d’une croissance inclusive, et en l’absence de mécanismes efficaces de redistribution de la richesse à la population, la forte croissance basée sur l’augmentation de la production minière exportée, n’a pas permis, loin de là, de construire une dynamique durable». La FEC, par ma voix depuis plusieurs années, s’est permis d’inciter le gouvernement à concentrer ses efforts sur une politique de développement agricole et industriel. Ainsi, je me rappelle avoir constamment affirmé depuis trois années maintenant, l’impérieuse «nécessité de consolider les acquis de cette stabilité à travers une politique de diversification économique afin de parvenir, à terme, à une croissance multipolaire à même de renforcer la résilience de l’économie nationale aux chocs externes, en réduisant particulièrement son exposition à la variation des cours des matières premières sur les marchés internationaux». Hélas la voix de la FEC était considérée comme suspecte et il fallait l’étouffer à tout prix. Mais les réalités économiques sont têtues et finissent toujours par nous rattraper.
Honorables Députés et Sénateurs,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Distingués invités,
L’agriculture est la première des priorités.
Parce qu’elle est à l’origine de tous les mécanismes de développement. Si l’agriculture ne contribue qu’à 21,2% du PIB en RD-Congo, je rappelle néanmoins, que 44,4 millions de nos concitoyens vivent dans l’espace rural, soit plus de la moitié de la population RD-congolaise. Or, dans tous les pays en développement, on constate que la croissance agricole permet de réduire la pauvreté́ trois fois plus efficacement que la croissance des autres secteurs. Trois fois. L’amélioration de la productivité́ agricole est donc indispensable pour promouvoir une croissance inclusive et durable. L’amélioration de la productivité́ agricole est également essentielle pour encourager la transformation structurelle et gérer la transition urbaine, puisqu’elle permet d’augmenter les revenus, de générer de l’épargne, pour passer du stade agricole au stade industriel.
La RD-Congo ne s’est pas inscrite dans ce qu’on appelle la Révolution verte, qui a stimulé les rendements dans de nombreux pays. Dans toutes les autres régions du monde, les hausses de production sont principalement liées à la croissance des rendements, en raison d’une meilleure utilisation des intrants et de l’adoption de technologies de production améliorées. Or la croissance de la production agricole en particulier chez nous résulte principalement de l’expansion des surfaces cultivées et non des gains de productivité́: la contribution de l’expansion des terres à la croissance agricole est plus de trois fois supérieure, en Afrique que dans les autres régions en développement.
Pourtant, nous ne manquons pas d’atouts pour atteindre une croissance agricole durable, voire même, comme dans d’autres secteurs liés aux secteurs primaires ou secondaires, nous sommes des privilégiés. Le marché RD-congolais croit rapidement sous l’effet conjugué de la croissance de la population, de l’urbanisation et des revenus. Cette situation dope la demande et crée un potentiel de substitution aux importations, qui peuvent par l’effet des variations mondiales des cours, ou des spéculations opportunistes, avoir un impact très négatif sur la stabilité sociale de notre pays, ce dont nous devrions être épargnés au vu de notre potentiel. On peut également compter sur des perspectives d’augmentation de la main-d’œuvre pour le secteur de l’agriculture. En effet, avec la création d’emplois dans le secteur agroalimentaire en amont et en aval, le «dividende de la jeunesse» pourrait porter la croissance du secteur. En revanche, si ces emplois ne sont pas créés, le chômage pourrait augmenter ou la migration s’accélérer vers certaines de nos villes déjà̀ surpeuplées.
Jeunesse et entrepreneuriat
C’est donc autant une question de développement humain, par l’inclusion des populations rurales, notamment jeunes, que de développement économique général et de souveraineté nationale que de répondre au défi agricole. J’en appelle donc à une véritable prise de conscience nationale, à un engagement de l’ensemble de l’appareil de l’Etat, des acteurs économiques et de nos partenaires étrangers pour faire de l’Agriculture la priorité de notre développement.
Bien sur La FEC a déjà fait état des nombreuses contraintes qui pèsent sur ce secteur
-comme la multiplicité, la redondance et la hauteur élevée des impôts, droits, taxes et redevances exigées aux exploitants agricoles et agro-pastoraux, à des taux prohibitifs, aussi bien par le Pouvoir central que par toutes les provinces sur les activités agricoles, le transport et la commercialisation;
-ou le blocage des investissements agricoles existants et de l’attrait de nouveaux investissements, pour lesquels 51% de parts sociales sont réservées à l’Etat RD-congolais et/ou aux nationaux et 49% aux étrangers lors de la constitution d’une société dans le secteur agricole.
Mais au-delà de mesures précises, que nous avons déjà transmises au gouvernement comme la mise en œuvre du Fonds national pour le développement de l’agriculture -FONADA- pourtant créé dans la loi agricole de 2011, ce dont nous avons besoin, c’est d’une action politique forte et volontariste, une vision claire, inscrite dans la durée et à la hauteur des enjeux. C’est pourquoi, Monsieur le Premier ministre, nous souhaiterions l’organisation d’Etats généraux de l’agriculture, en vue de définir une politique pluriannuelle agricole globale pour le pays, et faire qu’enfin, notre pays puisse apporter tant à ses concitoyens, qu’à son Etat, développement et souveraineté alimentaire. Le deuxième levier sur lequel nous souhaiterions que le gouvernement puisse développer une politique volontariste durable est le secteur de l’industrie en adoptant une politique mesurée de substitution aux importations. Notre pays est importateur net de biens de consommation courante, alors qu’il dispose de grandes potentialités pour devenir une nation industrielle et peut-être un jour, une grande nation industrielle.
Comme vous le savez tous, l’industrialisation est un facteur clé du développement durable d’un pays, de la diversification de son l’économie et permet un fort entrainement des investissements utiles à l’ensemble de l’économie. A ce jour, les principales activités industrielles du pays sont limitées à un nombre réduit de filières de biens de consommation, notamment, de la production du sucre, des boissons, de la transformation des matières plastiques, des produits cosmétiques, de la panification… Les filières des biens d’équipements sont sous-exploitées, elles tournent principalement autour de la production du ciment et de la construction métallique… Mais cette industrie, comme vous le savez, fait face à des contraintes qui l’empêchent d’amorcer son redécollage.
la lourde fiscalité et parafiscalité qu’elle supporte, atteignant 51% du chiffre d’affaires, soit le double de ce qui est payé en République du Congo ou en Angola;
Ainsi, l’augmentation de plus de 50% du taux de droit d’accises sur plusieurs produits, justifiée par la seule maximisation des recettes dans le contexte contraint récent. Ce niveau de fiscalité, n’a tenu compte ni de la faiblesse du pouvoir d’achat de la population, ni de la compétitivité des entreprises. Le volume d’activités des industries brassicoles par exemple, a connu une baisse de plus de 20%. La plupart d’entre elles se sont vues obligées de procéder à des changements structurels, d’autres ont procédé à la fermeture des usines de production. C’est le cas des usines de la BRALIMA à Mbandaka et à Boma fermées en 2015 et 2016.
Sur ce sujet précis, nous souhaiterions notamment que le gouvernement revienne aux droits d’accises antérieurs et en permette la modulation pour favoriser l’investissement productif. Mais encore une fois, au-delà de ces mesures qui sont essentielles, ne nous y trompons pas, ce que nous souhaiterions c’est une véritable politique industrielle, impulsée et coordonnée par l’Etat, visant à protéger certaines industries naissantes, afin d’orienter la demande intérieure vers la production nationale et de favoriser la confédération des forces productives.
Je sais qu’on risque de me taxer de protectionniste. Mais à la vérité, ceux qui se battent pour l’abolition des droits de douanes ou des mesures incitatives pour permettre l’écoulement de leurs propres productions, sont les mêmes qui ont fondé leur succès économique et leur développement sur des pratiques similaires, qu’il s’agisse de barrières tarifaires et non tarifaires, de politiques publiques de dumping social ou monétaire ou de politiques d’accès privilégié aux marchés publics. Ces politiques publiques d’accompagnement des industries nationales, ont marqué, dans un certain nombre de pays des succès importants. Ce dont il s’agit aujourd’hui, c’est de proposer une vision adossée à un volontarisme politique fort.
Une politique publique bien menée sur les biens de consommation courante comme les produits agro-alimentaires, le textile, l’habillement, pourrait constituer la première phase d’un décollage industriel réaliste pour notre tissu entrepreneurial, tant par notre capacité à accéder aux techniques que par la possibilité du marché local de supporter le temporaire renchérissement des coûts d’achats. Comme pour l’Agriculture, nous souhaiterions donc que l’ETAT puisse organiser des Etats généraux de l’industrie pour mettre en place un plan pluriannuel de développement de notre économie. Au sein de l’industrie RD-congolaise, le secteur minier est évidemment un cas spécifique et mérite un traitement spécifique. Nous avons été une grande nation minière durant tout le siècle passé, mais malheureusement notre appareil productif a été très largement mis à mal par les crises des années 90 et n’a pas pu se renouveler durant les années 2000 par manque d’investissements notamment.
Cependant il n’y pas de fatalité à cette situation et nous devons faire de la reconstruction de notre outil de production une priorité. Depuis que les cours du cuivre ont plongé, certains de nos plus importants partenaires ont arrêté leur production. Les entreprises minières se sont concentrées sur la diminution des coûts en vue de s’ajuster au niveau des cours mondiaux et ont retardé leurs plans d’expansion. On a assisté à la vente d’actifs pour certains, à la fermeture des mines pour d’autres et à la douloureuse décision de diminution des effectifs en vue d’améliorer l’efficacité d’exploitation avec des conséquences dans les secteurs connexes notamment des pertes d’emplois directs et indirects chez les fournisseurs et les sous-traitants. Nous ne pouvons donc plus continuer à envisager notre industrie minière, à travers le seul prisme des partenariats économiques et financiers avec des acteurs dont les préoccupations ne sont pas nécessairement alignées avec celle de notre pays. Je voudrais m’arrêter quelques secondes sur le sujet spécifique de la sous-traitance, qui ne concerne pas que le secteur minier, même si cette industrie en est un des plus importants moteurs au Congo. La FEC a suivi avec intérêt l’adoption par les deux chambres du Parlement de la proposition de loi fixant les règles applicables à la sous-traitance dans le secteur privé. Cependant, nous pensons que l’application de cette dernière dans sa forme actuelle risquerait de créer plus de confusion et rendre son exécution plus difficile dans la mesure où certains concepts, soit n’ont pas été définis, soit sont contraires au droit OHADA. Nous ne devons pas perdre de vue la contribution essentielle de la sous-traitance au développement économique, par la souplesse et les compétences qu’elle procure aux entreprises principales, mais également, et peut-être surtout, en tant qu’outil de développement économique pour les PME nationales.
Cependant, malgré l’intérêt que suscite cette loi, nous la considérons comme imparfaite car elle crée une insécurité pour les PME nationales sous-traitées, à fortiori lorsqu’elles se trouvent en relations d’affaires avec les multinationales disposant de moyens pression importants. C’est ce qui risque malheureusement d’arriver dans notre pays si cette loi venait à être promulguée en l’état. C’est pourquoi, nous recommandons vivement une seconde lecture avec le secteur privé sur ce texte. Sur ce sujet spécifique de la sous-traitance, comme celui de la fiscalité minière, comme des autres sujets évoqués, des propositions précises seront remises par la FEC au Premier ministre à l’issue de ce discours. Je me suis concentré sur l’agriculture et l’industrie, car à mon sens, ce sont les deux politiques sectorielles les plus importantes pour bâtir durablement une nation prospère. Je ne méconnais pas, les enjeux liés aux infrastructures, au développement énergétique, à la création d’un marché financier efficient, d’un secteur commercial compétitif, d’infrastructures de télécommunication fonctionnelle, de stimulation d’un environnement favorable à la création de TPE-PME dont l’impact dans la création d’emplois est extrêmement important.
Sur certains de ces sujets, si ce n’est tous, nous avons d’ailleurs, fait part au Premier ministre et à ses services d’un certain nombre de contributions afin de permettre à ces différents segments de se développer. Mais, outre que nos moyens ne nous permettrons pas de tout faire en même temps, je pense que tous les secteurs précités sont des éléments complémentaires de deux politiques sectorielles que j’ai longuement évoquées et qui auront un effet de structuration d’entrainement sur les autres secteurs. Ma troisième conviction est que toutes ces propositions ne pourront jamais voir le jour que dans le cadre d’un Etat fort, doté d’une administration compétente, sur lequel le secteur privé devrait pouvoir s’appuyer dans le cadre d’un partenariat durable. Pour pouvoir investir et permettre au secteur privé de jouer pleinement son rôle, nous souhaitons pouvoir disposer de prévisibilité et de sécurité d’une part et d’un accompagnement adapté d’autre part. La sécurité est la première demande de nos concitoyens. Cette sécurité et la stabilité sociale qui en découle, sont des conditions indispensables au développement.
La stabilité, c’est également ce que demandent les milieux d’affaires, qui, loin des querelles politiciennes, ne souhaitent rien tant que la prévisibilité pour pouvoir investir. Nous regrettons, vous regrettez, que nos entreprises soient parfois frileuses à s’engager et à engager leurs fonds dans des projets d’investissement. De la même manière, on reproche aux banques de ne pas souhaiter s’engager, ou à des taux prohibitifs, auprès des entreprises. Mais comment pourrait-il en être autrement quand on ne sait pas de quoi seront faites les prochaines années et quelle sera la situation sécuritaire dans telle ou telle région? A ce titre, j’invite le gouvernement, à continuer de tout mettre en œuvre pour que l’Etat RD-congolais continue à renforcer sa force militaire et son armée. Qu’elles soient les auxiliaires indispensables de notre sécurité et les garantes de notre intégrité territoriale. A ce sujet, les informations récentes sur une nouvelle infiltration d’ex-rebelles du M23 à l’Est du pays, est inquiétante et demande une riposte rapide de l’armée. Cette sécurité que tout le peuple RD-congolais appelle de ses vœux, doit également être la norme pour le monde économique dans ses rapports avec l’Etat. Tous nos membres connaissent, les tracasseries administratives, la corruption, les impositions doubles, voire triples ou injustifiées dont ils peuvent être les victimes et qui pèsent sur leur capacité à se développer et à contribuer par la création de richesse au fonctionnement de nos institutions.
Notre arsenal législatif est perfectible évidemment, mais notre demande, porte surtout sur l’application impartiale, prévisible, non orientée et efficace de nos législations. Nous souhaitons une administration et un pouvoir judiciaire qui protègent efficacement les droits de propriété et le droit des contrats qui déterminent la capacité de la société à accumuler de la richesse et à investir dans les activités productives. Vous l’aurez compris, nous secteur privé appelons d’abord à un Etat fort, appuyé par une administration forte. Mais tout cela nécessite une révolution des mentalités au sein de l’administration, ainsi que des moyens à donner à ses cadres, pour leur permettre d’effectuer dignement leurs missions en toute quiétude, et ne pas à vivre d’expédients sur le dos des citoyens. Car dans la réalité, qu’en est-il? Notre fiscalité est une hydre à 29 têtes qui traque sans relâche les entreprises du secteur formel, entrainant défiance et souhait d’échapper à une contrainte perçue comme injuste.
Nous avons donc besoin prioritairement d’un choc fiscal, qui permette sa simplification, sa prévisibilité et son application impartiale par les agents de l’Etat. La fiscalité -via la maximisation des recettes de l’Etat ne peut pas être la seule boussole, ni la variable d’ajustement permanente d’un Etat qui n’a pas pris les mesures structurelles nécessaires à la création de richesses, quand les revenus des matières premières le lui aurait permis. Je sais, Monsieur le Premier ministre que vous partagez notre point de vue ayant vous-même qualifié notre système fiscal d’inefficace en raison notamment de son illisibilité et de sa complexité et je rajouterais, si vous me le permettez imprévisible. Nous souhaitons un «Etat» qui lutte contre la complexité et la multiplicité des taxes et législations diverses. Nos opérateurs doivent s’acquitter de leurs contributions directes et indirectes ainsi que de nombreuses taxes parafiscales, à la Direction générale des impôts, à la Direction générale des douanes et accises, à la Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations ainsi qu’aux différents et multiples services d’assiette.
La FEC demande au gouvernement, de faire réaliser une étude devant aboutir, à moyen terme, à unifier et restructurer le dossier fiscal, à l’instar d’autres pays, afin que l’opérateur économique se retrouve devant un seul interlocuteur en matière fiscale. Dans l’attente d’une telle réforme, la FEC souhaiterait que le gouvernement d’union nationale applique les recommandations du FENAT 2016 notamment celle se rapportant aux travaux de toilettage des Ordonnances-lois portant nomenclatures des impôts, droits taxes et redevances des provinces et du Pouvoir central afin de mettre fin à la redondance et réduire sensiblement leur nombre. Nous souhaitons un Etat qui soit prévisible, nous ne pouvons plus supporter que les Lois de Finances viennent remettre de manière systématique en cause les Lois fiscales et ajoutent aux impôts déjà votés de nouvelles contributions, auxquelles aucun opérateur n’aura pu se préparer. Nous demandons donc, qu’il soit mis fin à la révision récurrente des lois fiscales par les lois de finances. Depuis plus de deux ans, la FEC a introduit une requête en inconstitutionnalité de la loi de finances pour l’exercice 2014 qui a modifié le taux de l’IBP/minimum d’un millième à un pourcent du chiffre d’affaires déclaré. En matière de prévisibilité toujours, les opérateurs économiques constatent fort malheureusement que le découpage territorial, qui est une bonne mesure, n’a pas été accompagné de mesures fiscales susceptibles de leur éviter une double voire triple imposition de certains droits et taxes par les nouvelles provinces.
Pour mettre fin à cette situation on ne peut plus déplorable, la FEC suggère la tenue d’un séminaire-atelier des experts des ministères de Finances et de l’Intérieur, de la DGRAD, des Régies provinciales et des organisations patronales afin d’examiner froidement les textes légaux et règlementaires qui se chevauchent et proposer à l’autorité compétente l’acte à poser ou la voie à suivre. A titre exemplatif, nous souhaitons qu’il soit mis fin au conflit de compétences entre d’une part la DGRAD et les régies financières provinciales pour la perception de la taxe de pollution. Nous souhaitons un Etat qui développe un climat des affaires favorables à l’investissement. S’agissant du climat des affaires, celui-ci ne peut s’améliorer que quand un débat fécond est entretenu durablement entre l’Etat et les acteurs privés ce qui en constitue la première condition et quand ce débat fécond est suivi d’effets concrets, ce qui en est la seconde.
C’est pourquoi, je tiens ici à saluer l’esprit de partenariat qui a prévalu entre le ministre de l’Economie nationale, en sa qualité de président du Cadre permanent de concertation économique et la FEC, la COPEMECO, la FENAPEC ainsi que toutes les autres organisations professionnelles lors de l’organisation du Forum économique national, en acronyme FENAT 2016 qui était placé sous le thème principal: «Le climat des affaires et des investissements en rapport avec les 28 mesures urgentes pour la stabilisation et la relance économique de la RDC, suite à la chute des cours des matières premières». Ce forum comportait notamment à son ordre du jour l’évaluation de la mise en application effective des recommandations antérieures formulées au gouvernement par le secteur privé depuis 2004. A ce sujet, l’évaluation effectuée par la FEC de l’application de ces mesures renseigne que seulement moins de 20% de plus 6oo recommandations ont connu une application réelle et effective.
Compte tenu de la transversalité de matières traitées, la Fédération des entreprises du Congo propose que le Cadre permanent de concertation économique soit placé sous tutelle du Premier ministre, ce qui nous le pensons permettra d’assurer l’intensification des réformes et leur mise en œuvre effective. Nous souhaitons un Etat qui protège ses entreprises. Plutôt que de cibler nos opérateurs économiques, nous souhaiterions que l’Etat et ses agents ciblent ceux qui contreviennent aux réglementations nationales et notamment en matière de concurrence déloyale des importations irrégulières et frauduleuses en provenance, des pays voisins. Comme vous le savez, les relations commerciales qui se font dans le cadre du commerce frontalier ou dans le cadre des zones de libre-échange, pour l’instant, ne sont pas accompagnées de mesures efficaces de sauvegarde de l’activité économique intérieure. Les entrées massives irrégulières et frauduleuses des marchandises observées aux différentes postes frontaliers sur tout le territoire, sont à la base de distorsions sur le marché de certains produits dont le ciment, le café, le cacao et les écorces de quinquina. Elles menacent sérieusement les activités industrielles, car elles échappent à toutes les réglementations en matière de commerce transfrontalier, ne subissent pas le contrôle de qualité, moins encore ne se conforment aux dispositions de la réglementation de change. Cette situation contribue à désarticuler notre petit tissu industriel et entraine un manque à gagner pour l’Etat. Certaines mesures de sauvegarde de ces industries prises pour contrer ces importations décriées se sont avérées tout simplement contre-productives. Le commerce par personne interposée, exercé par les autorités politiques, militaires et de l’administration publique contribue à alimenter des réseaux de contrebande.
La FEC, avait constaté avec regret, que des intervenants ambulants non répertoriés dans aucune des associations patronales disposent des contrats-programme et sont autorisés à faire entrer du ciment au mépris des législations commerciales et de la réglementation de change en vigueur dans notre pays. Au vu de cette situation, la régulation du marché s’avère indispensable. Pour ce faire il faudrait:
-Augmenter la taxation des produits importés pour rendre compétitifs les produits locaux et augmenter la consommation locale;
-Limiter les importations en imposant un quota de certains produits, y compris le ciment.
-Tant pour les importations que pour les quotas, un comité ad hoc paritaire secteur privé-Etat devrait être mis en place pour faire respecter les quotas prédéterminés, les procédures d’importation, débattre des produits prioritaires et faire part de ses recommandations à la puissance publique pour validation et application.
-Assainir le circuit de distribution des biens et services par l’élimination des intervenants opportunistes qui viennent gonfler de plus en plus le rang du secteur informel.
A ce propos, nous sollicitons l’implication du gouvernement pour que le Décret du Premier ministre qui oblige les opérateurs économiques à s’affilier à une organisation professionnelle de leur choix soit d’application effective; ceci permettra l’identification des opérateurs économiques d’abord et leur encadrement ensuite. A ces différentes conditions, je ne doute pas une seconde que l’effet d’entrainement sur le tissu économique RD-congolais sera largement stimulé et que l’Etat dans son ensemble, y trouvera rapidement les recettes fiscales nécessaires à son fonctionnement.
Que dire de cette année qui commence et des perspectives pour l’avenir? L’année 2017 devrait être pour notre pays une année éminemment politique avec l’organisation des élections présidentielles et législatives nationales et provinciales, conformément à l’accord de la Cité de l’OUA, complété par les conclusions des pourparlers directs facilités par l’Eglise catholique. Nous demandons urgemment à tous les acteurs politiques RD-congolais de taire leurs divergences et de mettre sous le boisseau leurs intérêts personnels afin de permettre au pays de sortir de sortir de la léthargie, dans laquelle il se trouve plongé depuis plusieurs mois désormais. Si nous avons tenu à vous présenter aujourd’hui nos priorités économiques, c’est parce que nous pensons que nous devons ensemble, dès maintenant nous mettre au travail pour la transformation de notre pays. Le vœu le plus ardent du monde des affaires est qu’une fois les divergences politiques totalement réglées, l’année 2017 soit celle de l’engagement des réformes de structures, rendues possibles par la participation de toutes les composantes politiques et de la société civile RD-congolaises au gouvernement d’union nationale, avec pour objectif principal de s’attaquer au mal majeur qui ronge notre pays, la pauvreté.
Les exigences de mobilisation de financement pour ces élections -les chiffres varient entre 1 milliard et 1,2 milliards, suscitent je dois vous l’avouer, quelques inquiétudes auprès de nos opérateurs économiques, qui craignent une augmentation de la pression fiscale pour la réalisation des prévisions budgétaires de l’Etat. Le niveau de recettes à mobiliser tel que prévu dans le projet de loi de finances 2017 reste à ce jour incompatible avec les besoins financiers de couverture des élections à venir. Par ailleurs, nous devrions, au vu de la crise sociale aigüe dans notre pays, nous interroger tous ensemble sur quelle sera la première priorité pour nos populations pour 2017?
La Fédération des entreprises du Congo, en sa qualité de partenaire privilégié du gouvernement, l’invite à éviter à recourir à tout expédient qui viendrait, un peu plus contraindre les entreprises et n’aurait pour effet que de détourner l’investissement RD-congolais vers des économies plus protectrices. S’agissant des activités de la fédération, les organes de notre fédération ont tenu leurs activités normalement conformément aux prescrits de nos statuts. Aussi bien l’Assemblée générale de membres, le Conseil d’administration, le Comité de direction que les Conseils provinciaux se sont réunis régulièrement pour analyser, formuler des recommandations et directives pour la défense et la promotion de nos membres.
Je félicite nos commissions nationales et comités professionnels qui largement contribué à alimenter le Conseil d’administration afin de lui permettre de mieux gérer les problèmes de membres. A cette occasion, je tiens à remercier tous les collègues élus des organes de notre fédération à tous les niveaux pour leurs contributions intellectuelles, physiques, financières et leur abnégation afin de permettre à la Fédération d’atteindre ses objectifs. C’est l’occasion pour moi de rappeler aussi que l’année 2017 sera également une année électorale à la FEC. En effet, le mandat du Conseil d’administration que j’ai l’honneur de diriger touche à sa fin dans quelques mois. J’encourage tous les membres qui ont l’amour de servir la communauté des affaires à ne pas hésiter à rejoindre démocratiquement le Conseil d’administration lors de l’Assemblée générale élective qui sera organisée au mois de mai prochain. Il en est de même pour nos groupements provinciaux qui, à l’exception du Kongo Central, du Maniema et du Sud-Kivu, doivent tous renouveler leurs mandats.
S’agissant de l’activité de la FEC, je ne pourrai clore ce chapitre sans adresser, mes plus sincères et chaleureuses félicitations à notre présidente en charge des affaires sociales, Mme Patricia Gieskes-Veringa. Comme vous le savez peut-être, Patricia a reçu vendredi dernier, dans le cadre du Sommet économique Afrique-France qui se tenait à Bamako, en parallèle du Sommet Afrique-France des Chefs d’Etat, le prix de la Femme Entrepreneur de l’Année 2016 en Afrique. Ce prix décerné par Business Africa, le Medef, l’Organisation internationale des entrepreneurs et l’Institut Choiseul, est venu récompenser son engagement au sein de son entreprise The Job Factory. Cette importante distinction l’honore, mais rejaillit également sur la FEC et attire les regards sur notre pays, ses potentialités et ses entrepreneurs. Je tiens à l’en féliciter et à l’en remercier.
Comme mot de la fin, je voudrais féliciter et remercier tous nos membres pour leur fidélité à la FEC. Plus que par le passé, nous réitérons notre engagement à mieux les défendre et les représenter à tous les niveaux. J’invite les membres de la fédération à se conformer aux lois et règlements de ce pays en privilégiant l’intérêt général et le bien commun. Et je voudrais le souligner avec insistance, les contributions de natures diverses, que je reçois de tous mes collègues membres du Conseil d’administration pour le travail que nous avons à abattre ensemble au profit de nos membres et de l’économie de notre pays sont très appréciées. Que soit aussi félicité le personnel de la fédération pour son dévouement et la qualité des services rendus aux membres dans des conditions parfois difficiles. Nous l’exhortons à persévérer et lui recommandons d’améliorer davantage sa performance et l’image de notre fédération. Bonne et heureuse année 2017 à vous tous, en espérant que cette nouvelle année sera plus porteuse pour l’économie de notre pays. Je vous remercie pour votre attention.
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