Via son Directeur de Cabinet et porte-parole Olivier Kamitatu, le patron du parti Ensemble pour la République propose la confection d’une ligne claire, la réorganisation et la modernisation des FARDC, la promotion d’un dialogue franc et constructif avec tous nos voisins d’un côté et, de l’autre, entre les communautés du pays, l’arrêt de la stigmatisation ainsi que la tenue des élections crédibles en vue d’installer des dirigeants légitimes…
Moïse Katumbi, le leader du Parti Ensemble pour la République, a eu à s’exprimer sur la reprise des violences à l’Est de la République démocratique du Congo, appelant la population à soutenir les FARDC et les dirigeants à promouvoir la paix entre les communautés et apporter des réponses aux problèmes des déplacés. Il est revenu à la charge pour faire part, cette fois-ci, de ses propositions pour endiguer ces vives tensions en cours entre la République démocratique du Congo et le Rwanda. Il l’a fait via Olivier Kamitatu Etsu, son Directeur de cabinet et porte-parole, qui a répondu aux questions de «TV 5».
L’ancien gouverneur de l’ex-Katanga a dressé une liste des pistes de solutions en six points: la confection d’une ligne claire, la réorganisation et la modernisation des FARDC, la promotion d’un dialogue franc et constructif avec tous nos voisins d’un côté et, de l’autre, entre les communautés du pays, l’arrêt de la stigmatisation et la tenue des élections crédibles en vue d’avoir des dirigeants légitimes. Entretien.
Bonsoir Monsieur et merci d’être avec nous. La voie diplomatique demeure l’option idéale et privilégiée pour instaurer la paix durable dans l’Est de la RD-Congo. C’est ce qu’a dit le président Félix Tshisekedi, cité aujourd’hui par la ministre de la Culture. Le point de vue du Président est-il partagé par Moïse Katumbi?
Moïse Katumbi l’a déjà exprimé de manière très claire. Nous devons à la fois sécuriser toutes les populations dans l’Est du pays. Ça fait plus de vingt-cinq ans aujourd’hui que les populations de l’Est souffrent et sont martyres. Vingt-cinq ans de souffrance, ce qui veut dire qu’aujourd’hui, nous avons à désarmer et à éradiquer la violence et les groupes armés dans l’Est du pays, partout.
Nous avons surtout également à éviter la stigmatisation d’une des communautés congolaises et nous avons aussi à discuter dans un dialogue franc constructif, un dialogue franc avec tous nos voisins, à la fois pour faire part de nos préoccupations et écouter les leurs, mais trouver une solution définitive. Je pense qu’aujourd’hui Moïse Katumbi l’a très clairement dit: nous voulons que l’armée congolaise puisse être en capacité à assurer l’intégrité du territoire national et à éradiquer tous les groupes armés, et le M23 en particulier.
Justement, ce lundi, lors du Sommet de la Communauté d’Afrique de l’Est, le déploiement d’une force régionale destinée à stabiliser l’Est de la RD-Congo a été acté. Une intervention militaire suffira-t-elle à pacifier la situation?
Les armées étrangères, ça fait vingt ans qu’elles viennent. Elles viennent, elles repartent, elles reviennent. On les invite. Parfois, on ne les invite pas. La solution est une armée nationale qui soient bien équipée, bien encadrée. Moïse Katumbi l’avait dit il y a quelques années. En 2019, en visitant un des camps de déplacés internes à Bunia, il avait dit: «Donnons des moyens à l’armée congolaise de bien assumer ses fonctions parce que nous avons confiance dans nos officiers, dans notre armée».
Malheureusement aujourd’hui, elle est mal gérée, elle est mal encadrée. Il faut absolument que nous nous ressaisissions. Les Congolais peuvent assurer l’ordre et restaurer l’autorité de l’État congolais chez eux. On n’a pas besoin des étrangers pour ça.
Selon vous et Moïse Katumbi que vous représentez ce soir, le Rwanda soutient-ils les rebelles du M23?
Eh bien, nous avons vu récemment à Nairobi le Président Tshisekedi à côté du Président Kagame. Ensemble, ils ont signé un communiqué. Je n’ai entendu nulle part le qualificatif de pays agresseur. Je n’ai pas entendu non plus le M23 groupe terroriste. J’ai vu qu’il y avait là manifestement, il y a comme un symptôme de paranoïa dans notre diplomatie congolaise. D’un côté, on crie au loup.
De l’autre côté, on veut discuter. Il faut qu’il y ait une ligne claire et la population a besoin de cette ligne claire. Je pense que, en ce qui nous concerne, Moïse Katumbi considère aujourd’hui qu’il faut que l’armée soit forte, qu’elle fasse son travail, il faut que la diplomatie engage un vrai dialogue avec tous nos voisins.
Vous parlez de stigmatisation tout à l’heure, conséquence de l’escalade entre la RD-Congo et le Rwanda. Dans la province du Maniema, un bouvier Banyamulenge appartenant à la communauté tutsie a été lynché et brûlé il y a quelques jours, Moïse Katumbi compte-t-il, intervenir, dire quelque chose face à ses messages de haine qui se développe de plus en plus en RD-Congo?
Ces messages de haine ont commencé il y a déjà, c’est une lente glissade à travers d’abord la congolité, essayer d’exclure une communauté et puis une autre. Aujourd’hui, on sort des machettes à Kinshasa. Il faut, à la fois de manière exemplaire, punir, sévir contre ceux qui veulent cette nouvelle épuration. Ce n’est pas acceptable, c’est tout à fait intolérable. Moïse Katumbi l’a déjà dit et nous nous exprimons très clairement sur ce point: il n’y a pas à stigmatiser une communauté congolaise.
Nous devons au contraire favoriser le vivre ensemble. Au Katanga, Monseigneur Fulgence Muteba l’a fait avec toutes les communautés katangaises. Aujourd’hui au Katanga il y a un apaisement. Nous attendons également un apaisement dans l’Est. La stigmatisation d’une communauté ne sert à rien. Au contraire, ça nous remet dans le passé.
Moïse Katumbi fait partie des potentiels candidats à l’élection présidentielle en 2023 en RD-Congo. S’il officialise sa candidature, il sera confronté à la question de la sécurité dans l’Est du pays. Vous travaillez avec lui, quelles sont ses solutions pour endiguer ce fléau?
Eh bien, la solution, c’est effectivement que nous ayons une véritable armée.
C’est la seule solution?
Non, Non, ce n’est pas la seule la solution. C’est qu’il y ait à la fois une armée, à la fois un dialogue intercommunautaire entre toutes nos communautés. Qu’on puisse améliorer le vivre ensemble dans l’Est du pays et à travers tout le pays. Et à la fois engager un vrai dialogue avec tous nos voisins. Vous parlez des élections, aujourd’hui nous sommes à la croisée des chemins. Ce qui permettra d’avoir un Congo fort. C’est à la fois une armée forte, des institutions démocratiques et fortes, issues d’élections qui soient crédibles et transparentes. Le Congo a besoin d’animateurs qui soient vraiment légitimes.
Il y a quelques jours, Moïse Katumbi et l’ancien président Joseph Kabila se sont serrés la main lors d’une rencontre, quelle est actuellement la relations entre les deux hommes?
Eh bien, c’était un dialogue de toutes les communautés du Katanga. Imaginez-vous que parmi les communautés, deux des grands leaders ne se serrent pas la main alors que toutes les communautés sous l’égide de l’Eglise catholique et Monseigneur Muteba se réconcilient. Ce n’est pas une alliance politique, c’est une réconciliation de toutes les communautés. Chacun a ses options.
Mais nous, nous voulons réellement demain que tous les Congolais, que le souverain primaire congolais puisse s’exprimer et nous avons de sérieux doutes sur la qualité des élections qui auront lieu alors qu’aujourd’hui elles sont préparées par une seule famille politique qui veut s’arroger à nouveau les moyens de conserver le pouvoir contre l’ensemble du pays.
Tout autre sujet à présent, ce sera ma dernière question: le cercueil de Patrice Lumumba, l’icône congolaise, est rentré au pays. Des cérémonies de deuil national sur le site de Shilatembo dans le Haut-Katanga vont avoir lieu. Savez-vous si Moise Katumbi y participera?
Donner une sépulture au premier Premier ministre du Congo est une chose extraordinaire mais la page ne se tourne pas parce que Patrice Lumumba a une belle sépulture. C’est un moment historique! Je ne sais pas si Moïse Katumbi sera en République démocratique du Congo en ce moment-là mais nous partageons bien entendu la ferveur et la joie de la population d’accueillir la dépouille, la relique du Premier ministre et de lui donner une sépulture digne de son nom mais ce n’est pas pour autant que la page est tournée.