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RDC : Julien Paluku livre ses recettes pour l’après état de siège

Quand début mai 2021, le Président de la République Félix Tshisekedi avait décrété l’état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, Julien Paluku, leader politique dans le Kivu, n’avait pas boudé son plaisir de saluer cette mesure exceptionnelle dont la vocation a été de «concentrer tous les pouvoirs entre les mains des militaires et de permettre à ceux-ci d’orienter toutes les énergies intellectuelles, physiques et financières vers la destruction des causes lointaines et immédiates des guerres récurrentes à l’Est de la RD-Congo».

Plus de deux ans après, Julien Paluku est sur la première ligne des leaders du Kivu favorables à la levée de l’état de siège, faute pour cette mesure d’avoir produit «les résultats escomptés». Sa position est la conclusion d’un argumentaire construit à la lumière de son expérience d’une dizaine d’années aux commandes du Nord-Kivu et consécutif à un état des lieux de la situation sécuritaire morose dans cette province en dépit de la présence des militaires aux affaires.

Passé ministre de l’Industrie ces dernières années, Julien Paluku, qui n’a jamais coupé le cordon ombilical avec son Kivu natal, a, dans une note à l’attention des commissions exerçant à la table ronde sur l’état de siège, lancée lundi par le Président de la République, fait des propositions pour la gestion de la crise sécuritaire une fois la mesure portant état de siège abrogée.

Ses propositions sont reparties sur deux axes dont le premier concerne l’aspect diplomatique et politique. L’ancien gouv’ du Nord-Kivu a ici préconisé de «poursuivre les processus de Nairobi et de Luanda car un pays ne peut se développer en vase clos». «Dans cette optique, il est nécessaire de mettre des moyens financiers dans le PDDRCS au lieu de se limiter à des déclarations d’intention», a-t-il expliqué, avant d’appeler à lancer les opérations de collecte des candidatures pour les législatives nationales et provinciales comptant pour les territoires de Rutshuru et Masisi, aujourd’hui occupés dans leur grande partie par les rebelles du M23.

«Même si l’enrôlement des électeurs n’a pas encore eu lieu, il faut préciser que la loi sur la répartition des sièges, votée par les deux Chambres du Parlement et promulguée par le Président de la République, a déjà fixé le nombre des sièges pour ces deux circonscriptions. Rien n’empêche donc que les compétiteurs soient enregistrés en attendant l’enrôlement des électeurs. Cela donnerait de l’espoir aux populations de cette partie de la République qu’elles bénéficient de la même attention que d’autres et qu’il n’y a aucun schéma ayant pour but de les exclure du processus électoral», a-t-il motivé.

Le second axe, celui dédié aux aspects purement militaires, reprend la forte recommandation de «création d’un Etat-major général avancé à Beni comme point central pour gérer les opérations en Ituri et au Nord-Kivu». Le déploiement de cette recommandation exige, selon Paluku, de rallonger l’aéroport de Beni jusqu’à 2.500m grâce aux travaux possibles d’être menés en 3 mois.

«Cet Etat-major général avancé doté des pouvoirs exceptionnels qui dérogent à l’organisation générale des forces armées est à placer sous le commandement direct du Commandant suprême. Cela éviterait la lourdeur administrative, le tripatouillage décrié dans la gestion des fonds destinés aux opérations militaires -chaîne de dépense- et les interférences des échelons militaires ordinairement connus -Zones de défense, Région militaire, secteur opérationnel…. Et cet Etat-major général avancé s’appuierait sur les autorités locales en termes des renseignements par le partage des moyens mis à disposition. A l’intérieur de cet Etat-major général avancé fonctionneraient deux centres de résistance, l’un à Goma et l’autre à Bunia», a décliné Paluku qui encourage en plus la stratégie de mise en œuvre de la Réserve armée de la défense.

Dans le lot de propositions soumises aux participants à la table ronde, Julien Paluku a glissé une disposition consistant à doter chacun des gouverneurs civils de l’Ituri et du Nord-Kivu d’un conseiller militaire, «revêtu du grade de Colonel». Celui-ci, a-t-il précisé, devra avoir être diplômé d’une école de commandement ou de guerre, afin d’assurer une bonne liaison avec l’Etat-major général avancé.

Paluku a aussi appelé à la «relocalisation des commandants ayant servi pendant plusieurs années sans interruption». L’avantage d’une telle mesure est de «renforcer les nouvelles dispositions, avec, à la clé, le déploiement de nouvelles unités combattantes issues des centres de formation».

De son avis, le recutement des policiers est de si grande importance pour les deux provinces une fois sortie de l’état de siège. Pour ce faire, une «vaste campagne de recrutement des policiers» devra être lancée pour renverser la tendance démontrée par une récente étude et selon laquelle «dans certains espaces de l’Est du Pays, on trouve 1 policier sur plus de 150 km²».

L’ancien gouverneur du Nord-Kivu croit dur comme fer que ces «mesures particulières» vont permettre à la RD-Congo d’«expérimenter une nouvelle aventure, cette fois-ci planifiée dans le temps et dans l’espace». Il a en outre prévenu que «ces mesures particulières devraient faire l’objet des réunions stratégiques à la fin de la Table ronde pour une période de mise en œuvre ne dépassant pas 3 mois». Ainsi, entend-il voir ces mesures, fruit de sa fine connaissance du terrain des opérations dans le Kivu, en arriver à l’éradication des groupes armés qui écument la paix à l’Est de la RD-Congo.

Ya KAKESA

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