Après quatre mois d’attente, le Sénat va finalement se doter d’un bureau définitif ce samedi 10 août au terme d’une élection qui s’annonce disputée à tous les niveaux, avec au moins 2 candidats à chaque poste. Tout le contraire de l’Assemblée nationale. Sur les starting-blocks se dressent 19 candidats pour les 7 strapontins dont 2 pour le poste de rapporteur adjoint, le seul réservé à l’Opposition. En course, Salomon Kalonda d’Ensemble pour la République et Jean-Claude Baende. Cette deuxième candidature froisse cependant les bonnes consciences alors que l’ancien gouverneur de l’Équateur n’est pas connu comme membre de l’Opposition. En plusieurs points, Salomon Kalonda parait comme la seule carte estampillée «opposition» pour crédibiliser le bureau du Sénat à l’instar de celui de l’Assemblée nationale.
Mardi 6 août, le président Félix Tshisekedi a jeté le pavé dans la mare en citant trois opposants: Kabila, Katumbi et Fayulu. Snobant pratiquement Baende dans les rangs des opposants, le Chef de l’État a indiqué qu’un seul opposant est dans les institutions: Katumbi avec son parti, Ensemble pour la République, première et seule force politique de l’Opposition à l’Assemblée nationale et au Sénat. Malgré l’aveu du président, le parti de Katumbi a dû pourtant batailler pour s’octroyer le seul poste réservé à l’Opposition à la Chambre basse du parlement. Au final, les députés nationaux ont rendu justice en élisant Dominique Munongo au détriment de Mutamba sur qui pesaient des soupçons d’accointance avec le régime.
Désormais, c’est au tour des sénateurs d’être à l’épreuve de la conscience. «Jean-Claude Baende n’est pas de la vraie opposition», a averti un analyste politique. En face, Salomon Kalonda a l’étoffe pour siéger au bureau du Sénat, se convainquent les férus de la politique RD-congolaise. «Seule la présence de Salomon Kalonda, issu d’Ensemble pour la République, principal parti d’opposition, crédibilise le Bureau», a commenté un autre observateur.
Bien parti pour être la voix de l’Opposition au bureau du Sénat, Salomon Kalonda, issu de la principale formation politique de l’Opposition en RD-Congo, est adulé dans son parti. Plébiscité pour le poste par ses pairs, «SK Della» est présenté dans son entourage comme un «homme effacé mais très efficace». Originaire du Maniema, il aura surtout été de tous les combats aux côtés de Moïse Katumbi, son mentor. Conseiller spécial et bras droit du chef de file de l’Opposition politique en RD-Congo, le sénateur Kalonda présente également l’avantage de «l’équilibre» politique. Une candidature qui pourrait nourrir la «vitalité de la démocratie», voulue par Félix Tshisekedi.
De plus, Kalonda s’est littéralement défait de l’ombre de Katumbi ces dernières années, passant d’un simple collaborateur de Katumbi à un vrai leader national, tout en restant loyal à son mentor. Il a surtout gagné en épaisseur politique et compte à ce jour parmi les rares politiques à se faire accepter loin de ses bases naturelles, au point d’obtenir le suffrage des élus provinciaux du Haut-Katanga qui l’ont porté sénateur, en dépit de ses origines du Maniema. C’est depuis 2018 qu’il a commencé véritablement son ascension sur la sphère politique en se hissant parmi les meilleurs partis d’opposition au terme des législatives avec le Parti national pour la démocratie et le développement -PND. Cette formation politique a depuis été englouti dans Ensemble pour la République mais son leader, Salomon Kalonda, n’a plus jamais perdu du terrain, en dépit des circonstances douloureuses, notamment son incarcération durant plusieurs mois à la Prison militaire de Ndolo. S’il a réussi à se faire élire, en décembre 2023, député provincial à Kindu avec un joli score sans battre campagne, Kalonda aura manqué à Katumbi lors de la campagne électorale pour la présidentielle.
Aujourd’hui affranchi des poursuites dont il était l’objet et pour lesquelles il a toujours clamé son innocence, le spécial de Katumbi pourrait entrer dans une nouvelle dimension de sa fulgurante ascension. Conciliant et fédérateur, Kalonda est connu pour ses qualité de «faire avancer les dossiers quand les avis divergent». Au Sénat, plusieurs sont convaincus que le bras droit de Katumbi pourrait permettre d’«encourager les opposants à mener un combat constructif dans les institutions et pas ailleurs».
Pour plusieurs, voir celui qui était encore il y a tout juste deux mois derrière les barreaux de la justice militaire siéger au bureau du Sénat sera un signal fort pour la jeune démocratie RD-congolaise. Une manière de prouver cette «vitalité de la démocratie», prônée par le président de la République.
«Face à Baende, il n’y a pas match. Si on veut voir un Opposant au bureau, c’est Kalonda ou personne», a estimé un analyste qui dit compter sur la «conscience et de la maturité politique». «Les Sénateurs sont des personnes sages, ils savent qui est de l’Opposition et qui ne l’est pas. Il ne faudrait pas qu’on tombe dans le piège d’un bureau sans véritable opposition. Ce serait un suicide pour notre démocratie», a-t-il lancé. En son temps, Modeste Bahati, ancien président de cette chambre législative, avait appelé à «faire gagner la démocratie» en accordant un siège du bureau à l’Opposition pour «la beauté de la démocratie» et la «crédibilité collective» de l’institution.
Samedi, les yeux seront surtout braqués sur l’élection à ce poste particulièrement. Le résultat sera scruté et permettra à coup sûr de cerner la qualité de décision et d’indépendance d’esprit de la nouvelle Chambre haute du parlement.
Natine K.