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L’argent du pays rattrape Matata

Les trois exercices budgétaires pendant lesquels le Premier ministre a géré la RD-Congo ont une caractéristique commune presque jamais remarquée jusqu’ici -ce qui est en soi révélateur. La Primature a été constamment en dépassement
Les données en provenance de la Société civile pourraient porter un sacré coup à l’image de bon gestionnaire que reflète le Premier ministre Matata Ponyo Mapon, constamment en dépassement budgétaire depuis 2012, à en croire le récent rapport de l’Observatoire de la dépense publique -ODEP. Sur la liste de principales institutions consommatrices des crédits budgétaires de la RD-Congo dressée par cette ONG, la Primature sort du lot avec 146% en 2012, 244,4% en 2013 et 208,3% en 2014. Retour sur des records noirs passés sous silence. 
 
La stabilité du cadre macroéconomique est à l’actif du Premier ministre Matata Ponyo Mapon. Une rigoureuse gestion sur base de la caisse empêche le pays de basculer dans les méandres de l’inflation voire de l’hyperinflation? Encore une chandelle due au Premier ministre qui a réussi à donner au pays un taux de croissance du produit intérieur brut de 8,7% à la fin de l’année 2014, le top 5 sur le continent, alors que les prévisions de la Banque mondiale plaçaient la RD-Congo au troisième rang africain pour l’année 2015 avec un taux de croissance ex aequo avec la Côte d’Ivoire, juste après l’Ethiopie 9,5% et le Tchad 9%. Champion de la bonne gouvernance? Consistance en gouvernance économique? Encore et toujours Matata. L’argent dégagé de ces économies a permis d’initier une série d’actions palpables dans divers domaines. C’est indéniablement vrai.
Mais les nouvelles en provenance des organisations de la Société civile ne contribuent pas au renforcement de cette belle image que reflète le Premier ministre, constamment en dépassement budgétaire depuis 2012, à en croire le récent rapport de l’Observatoire de la dépense publique-ODEP.
 
Mythe financier remis en cause
Sur la liste dressée par l’ONG, la Primature est parmi les principales institutions consommatrices des crédits budgétaires de la RD-Congo. Elle a consommé 146% en 2012; 244,4% en 2013 et 208,3% en 2014. La Primature s’était déjà affichée plus gloutonne en 2012 quand elle a franchi la crête de 146% en 2012, devant la Présidence de la République, 144,8%, et le Sénat, 115,9%. Les tendances dépensières de la Primature ont pris de l’ampleur en 2013 quand elle a consommé 244% des crédits budgétaires, soit moins de 4,8% que la Présidence de la République, 244,4%, mais environ plus de 100% que le Sénat, 109% en 2013. En 2014, Matata a battu tous les records et les siens propres quand la Primature a placé la barre de consommation budgétaire à 208,3% contre respectivement 160,6% et 100,7% à la Présidence de la République et au Sénat.
A la veille d’une nouvelle reddition des comptes, le constat est rude. Il y a bien quelque chose qui cloche. A la Primature, le dépassement budgétaire est la caractéristique commune de toutes les trois années pendant lesquelles Matata a géré la RD-Congo. Ce qui est en soi révélateur. L’aptitude à dépenser plus d’argent du pays que celui alloué à la Primature par l’autorité budgétaire parait, en l’espèce, aussi volontaire que répétitive. Le dépassement budgétaire semble la règle et l’équilibre, l’exception.
De 2012 à 2014, en attendant que 2015 dévoile ses secrets, les exemples sont devenus légion. Et la polémique enfle. Pour l’autorité budgétaire, l’Assemblée nationale, voter des budgets qu’un gouvernement n’est pas prêt à exécuter à la lettre passe pour un affront que les députés se déclarent disposés à laver… Les préparatifs dans les états majors politiques laissent entrevoir que la rentrée de septembre sera peut-être celle du baroud d’honneur, «pour tenter de dénouer ce casse-tête qui n’en finit plus», chuchote un député, affirmant: «le vrai contrôle parlementaire va devoir reprendre ses droits».
Un autre élu a ces commentaires: «Tout dépassement est un détournement. Et de ce point de vue, on ne peut pas tolérer pareille forfaiture de la part du Premier ministre qui gère tout le pays, y compris toutes les institutions, quand le processus électoral-seulement 12% pour la CENI en 2014-, dont le financement est attendu par tous, piétine du fait de son comportement. Comment justifier de tels dépassements à la primature quand certains ministères n’atteignent pas 40 % voire 20% de crédits budgétaires leur alloués? Ça frise le mépris. De toutes les façons, nous l’attendons à la reddition des comptes». Son mythe financier remis en cause, l’homme derrière le Premier ministre rattrapé… par l’argent, Matata Ponyo n’imaginait forcément pas ça.

 

AKM

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