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Débat sur le bilan Matata: 700 écoles pour 165 territoires ou une école par an par territoire entre 2012 et 2016

Le Premier ministre de la RD-congo, Matata Ponyo, a été reçu à la chambre basse du Parlement le 20 avril, à l’occasion de la question orale avec débat de l’honorable député Crispin Mbindule Mitono, sur le programme d’action du gouvernement 2012-2016. C’était à la fois, Matata vu par Matata et Matata vu par les députés nationaux ou la population qui a eu peut-être l’unique et la seule occasion d’évaluer son Premier ministre en direct depuis qu’il siège sur l’avenue Roi Baudoin. C’était donc un exercice comparatif. Et naturellement, Matata s’est bien coté. Curieusement, il a reconnu avoir réalisé 17 milliards de dollars en 4 ans contre 48 milliards prévus, donc moins de 40%, mais s’est flatté, entre autres, d’avoir pu construire 700 écoles, dûment équipées et mises en service avant de promettre -encore- d’en livrer 300 autres d’ici la fin de l’année en cours. Le débat sur les écoles fait jaser cependant. Concrètement, construire 700 écoles en 4 ans pour un pays qui compte 165 territoires et 80 millions d’habitants revient à dire que le Premier ministre est fier d’avoir érigé au moins une école par territoire par an entre 2012 et 2016, soit une moyenne de 4 écoles par territoire en 4 ans! Une goutte d’eau dans l’océan étant donné que certains territoires regorgent jusqu’à une cinquantaine de villages dont certains sont distants de 100, 200 voire 300 kilomètres! A l’ère de la Révolution de la modernité, n’allez pas demander à un enfant de Miabi, au Kasai Oriental, de joindre le village Tshilundu à pied pour des raisons d’études ou à un enfant de Musukuyi, à Kasongo dans le Maniema, de faire le pied pour la formation scolaire à Lamba. L’impact est donc nul comparativement au montant de 1,4 million de dollars que la Primature dépense par mois, depuis juillet 2012, rien que pour embellir 5 communes de Kinshasa, la capitale. Et dire qu’à elle seule, cette a coûté au trésor 63 millions de dollars entre juillet 2012 et mars 2016, soit 1400 écoles au prix de 45.000 dollars l’école ou 2100 écoles au prix de 30.000 l’école. Après l’hémicycle, le débat sur le bilan du gouvernement s’est transposé à la radio au désavantage du Premier ministre. Jeudi, des enseignants ont participé à une émission ouverte au public sur les antennes de la Radio Africa FM.
Via la radio, les petits peuples ont donné de la voix à la faveur de la séance d’évaluation du programme d’action du gouvernement Matata. Réagissant jeudi 21 avril, avant-midi, au cours d’une émission à téléphone ouvert sur «Africa FM», des enseignants à 90% ont dressé un bilan largement négatif du Premier ministre, surtout dans le secteur de l’éducation et de l’emploi. Dès l’ouverture de la ligne téléphonique, le premier intervenant sur «Africa FM» c’est un enseignant d’une école secondaire de la commune de Masina. «Le Premier ministre Matata Ponyo a échoué dans son programme d’action, surtout dans le volet social de la population. En ma qualité d’enseignant à l’école secondaire, je touche aujourd’hui CDF 100.000, un agent de l’OCC touche CDF 800.000. Dites-moi, Monsieur le journaliste, pourquoi cet écart? Le Premier ministre ne pouvait-il pas améliorer le salaire de l’enseignant qui a même fait de lui ce qu’il est aujourd’hui», a-t-il réagi. «Disons la vérité à notre compatriote Matata Ponyo, il n’y a aucun secteur où il a réussi avec son programme. Il nous a promis l’amélioration du social de la population. Rien n’est fait, le taux de pauvreté a sensiblement augmenté au pays. Aujourd’hui, Kinshasa est presque dans le noir, la SNEL n’a plus d’arguments à fournir à ses abonnés, les quelques routes réhabilitées par les Chinois sont aussi arrivées fin mandat. C’est-à-dire elles s’abîment déjà avec beaucoup de nids de poule au même moment que le mandat du Premier ministre tend vers son expiration», a souligné Roger Mbau, un autre enseignant intervenu depuis la commune de Matete.
Visiblement, l’émission à téléphone ouvert d’«Africa FM» a constitué un moyen le plus attendu par les enseignants pour réagir au bilan du Gouvernement Matata. Ils ont été nombreux à se disputer la ligne. Un juriste de formation, enseignant dans une institution supérieure, a aussi réagi pendant qu’il roulait sur l’avenue ex-Poids lourds. Déclarant que le bilan de Matata est en général un échec, l’avocat a commencé par fustiger l’expertise des constructeurs chinois, vantant le savoir-faire des Japonais, constructeurs de l’avenue Bobozo. Il a poursuivi son intervention en démontrant que le niveau de l’enseignement est de plus en plus très bas. «Le Gouvernement devrait beaucoup s’investir dans l’éducation en allouant des moyens financiers, matériels et humains de qualité. Comment voulez-vous améliorer la qualité de l’enseignement, alors que les enseignants, eux-mêmes, meurent de faim. Ils sont très mal payés. En réalité, le Gouvernement a raté son programme de faire décoller la RD-Congo dans tous les secteurs», a-t-il fait observer. Et de compléter: «et la corruption, c’est un autre fléau qui ronge les institutions de notre pays. Curieusement, ceux qui sont sensés combattre cette pratique, y sont eux-mêmes impliqués».
Pierre Kanu, intervenant depuis la commune de N’Djili, lui, s’est appuyé sur le volet de la mécanisation de nouvelles unités au sein de l’administration publique, pour démontrer l’échec de Matata dans le social de la population. A l’en croire, le Premier ministre ne devrait pas mentir en disant qu’il a donné beaucoup d’emplois aux RD-Congolais. «Dès son avènement à la tête du Gouvernement, Matata Ponyo a donné l’ordre d’arrêter avec la mécanisation de nouvelles unités. Il a même interdit l’accueil des stagiaires professionnels aux seins des ministères et des entreprises publiques. Il est d’ailleurs connu de tous que seuls ses candidats sont engagés par recommandation», a-t-il accusé. Même point de vue exprimé par l’enseignant Frank Kaka, revenu au cours de son intervention sur l’échec du Premier ministre, en indiquant que beaucoup de RD-Congolais n’ont pas vu les mille écoles promises par Matata Ponyo. Il a par ailleurs souligné que seule la province de Maniema a pu bénéficier de promesses du PM.
Sax Mukola, depuis la commune de la N’Sele, a crié au mensonge de dire que Matata a beaucoup fait en 4 ans. Pour lui, le Premier ministre devrait d’abord prioriser l’amélioration des conditions sociales de la population. Il a cité entre autres le bon salaire des fonctionnaires de l’Etat, l’accès aux soins de santé à toutes les couches de la population, la construction des écoles et universités dans tous les coins du pays. «Rien ne va au pays ! Aujourd’hui, le Gouvernement n’arrive pas à faire face à la dépréciation de la monnaie nationale face au dollar américain. Les prix sur le marché sont montés en flèche et le panier de la ménagère souffre. Peut-il vraiment nous parler des efforts du Gouvernement? Ils sont où ces efforts? Non Monsieur le journaliste!», s’est-il interrogé en direct, sur les antennes d’«Africa FM».
Mukola ne raconte pas sa vie. Le succès du Premier ministre dans le secteur de l’éducation est mitigé. Matata s’est flatté entre autres d’avoir construit 700 écoles, dûment équipées et mises en service et a promis d’en livrer 300 autres d’ici la fin de l’année. Concrètement, construire 700 écoles en 4 ans pour un pays qui compte 165 territoires et 80 millions d’habitants revient à dire que Matata a construit au moins une école par territoire par an entre 2012 et 2016, soit une moyenne de 4 écoles par territoire en 4 ans. Une goutte d’eau dans l’océan étant donné que certains territoires comptent jusqu’à une cinquantaine de villages dont certains sont distants de 200 voire 300 kilomètres. L’impact est donc nul.
Peu avant la fin de l’émission, le dernier intervenant, l’enseignant André Mputu a, lui aussi, soutenu que le bilan du Gouvernement Matata est négatif. Il a démontré qu’un enseignant qui touche, par exemple CDF 80.000, il paie le loyer à CDF 50.000. Comment doit-il nouer les deux bouts du mois avec les CDF 40.000 restant de son salaire, sachant qu’il a des enfants à scolariser, nourrir et vêtir? L’intervenant a souligné avoir posé cette question au Premier ministre et attend une réponse lui permettant de créer des miracles de vie avec le même montant.
Olitho KAHUNGU
Julien MAO MAMPO

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