Entre la Majorité présidentielle -MP- et le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement -RASSOP/aile Limete- c’est le désamour total. Les deux camps émettent sur les deux longueurs d’ondes différentes et entretiennent les relations tumultueuses. Alors que la MP appelle à l’apaisement pour préparer les prochaines élections, le Rassemblement crie à la tricherie et prépare les manifestations de la rue. Après la marche du 30 novembre empêchée par la Police, le Rassemblement récidive et appelle à une autre le 19 décembre prochain. Pourtant, à la marche précédente, il y a eu dans certaines villes du pays des arrestations. Pendant que le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement avait appelé les RD-Congolais à manifester jeudi 30 novembre dernier dans les grandes villes de la RD-Congo pour rejeter le calendrier fixant l’élection présidentielle au 23 décembre 2018, la Police avait promis de «décourager ceux qui empêcheraient les autres de vaquer à leurs occupations». Allusion faite aux militants qui descendront dans la rue pour cette manifestation interdite par les autorités. Cette situation est à la base des arrestations intervenues à travers le pays et l’interpellation de certains leaders de l’Opposition à Kinshasa, dont Jean-Marc Kabund-a-Kabund, secrétaire général de l’UDPS, ainsi que Martin Fayulu et Jean-Bertrand Ewanga de la Dynamique de l’Opposition.
Que se passera-t-il encore le 19 décembre prochain si le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement se déploierait dans les rues à travers les grandes villes du pays pour réclamer le départ du Président Joseph Kabila en envisageant une transition sans lui chapeautée par une personnalité neutre issue de la Société civile, d’une part, et, d’autre part, exiger le rejet du nouveau calendrier électoral global publié par la Commission électorale nationale indépendante -CENI- depuis 5 novembre dernier? La question vaut son pesant d’or. Est-il que le climat politique se détériore du jour au jour en RD-Congo à l’approche de l’expiration de l’Accord politique global de la Saint-Sylvestre. Son application, au stade actuel, ne met pas d’accord une frange de l’Opposition appuyée par la Conférence nationale épiscopale du Congo -CENCO- et la Majorité présidentielle -MP- soutenue par une autre frange de cette Opposition. Conséquence logique: les relations sont tendues entre les deux camps au point de porter atteinte non seulement à l’ordre public mais également à la liberté individuelle.
C’est dans ce contexte que le Rassemblement aile/Limete appelle à une nouvelle manifestation contre le régime en place dès le 19 décembre prochain. En perspective de cette journée, les sociétaires de cette plateforme politique multiplient des réunions en vue de sensibiliser leurs militants. Un appel qui laisse à désirer quand on sait que le même Rassemblement avait appelé à manifester le 30 novembre dernier mais les autorités compétentes avaient interdit cette marche pacifique. Et la Police avait promis de «décourager ceux qui empêcheraient les autres de vaquer à leurs occupations». Allusion faite aux militants qui descendront dans la rue pour cette manifestation pourtant interdite par les autorités.
L’appel à manifester transformé en ville morte
Mais l’Opposition n’a obtempéré. Ce qui a fait que les forces de défense et sécurité ont été déployées en masse à travers les grandes villes du pays. A Kinshasa, la capitale, et à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, l’appel à manifester s’était transformé en ville morte. La présence remarquable des éléments de la Police a contraint la population à rester terrée chez elle. Ceux qui ont tenté de manifester en petit nombre ont été réprimés et dispersés, la Police ayant interdit tout attroupement de 5 personnes. Félix Tshisekedi, président du Rassemblement, avait été bloqué en sa résidence par la Police et empêché de sortir. Les autres leaders du Rassemblement notamment Jean-Marc Kabund-a-Kabund, Martin Fayulu et Jean Bertrand Ewanga avaient été interpellés puis relâchés. Cette interpellation n’avait laissé indifférents les organisateurs.
L’Union pour la démocratie et le progrès social -UDPS- avait accusé la Police d’avoir torturé son secrétaire général. «Monsieur le secrétaire général est dans un état critique. Tout le monde le sait qu’il est le seul à être torturé parmi les manifestants arrêtés hier par la Police. Il était le seul à être détenu dans de mauvaises conditions», avait dénoncé le porte-parole de l’UDPS, Augustin Kabuya, soulignant que Jean-Marc Kabund avait été relâché jeudi 30 novembre tard dans la soirée et serait soigné dans un hôpital après des tortures que la Police lui aurait fait subir. «Il est toujours alité. Il ne fait pas de bons mouvements et nous craignons beaucoup pour sa santé», s’est alarmé Augustin Kabuya.
Ni sévices ni traitement dégradant n’ont été infligés à Kabund
Le porte-parole de la PNC, le colonel Pierrot Mwanamputu, avait affirmé que ni sévices ni traitement dégradant n’ont été infligés à Jean-Marc Kabund précisant en outre que le secrétaire général de l’UDPS et les autres opposants interpellés en même temps que lui ont été libérés au bout de 45 minutes. La Police les a escortés et déposés à leurs domiciles. «Vous pensez que quelqu’un qui a été torturé peut encore accepté de monter dans une jeep de la Police? Pour moi, je ne pense pas cette affirmation soit vraie», avait indiqué le porte-parole de la Police.
15 militants de la LUCHA libérés
Mais dans quelques provinces, les manifestants avaient été arrêtés et déférés devant la justice. C’est ainsi que le lundi 4 décembre, 15 militants du mouvement citoyen Lutte pour le changement -LUCHA- arrêtés le 30 novembre dernier lors des manifestations de l’Opposition à Kasindi, dans le territoire de Beni, pour réclamer le départ du Président Joseph Kabila du pouvoir ont été libérés. La justice n’a retenu aucune infraction à leur charge. Cependant ces militants relâchés ont accusé la Police d’avoir torturé deux d’entre eux durant leur détention. «Nous étions avec deux personnes qu’on a torturé. L’une d’elle a fait une hémorragie et une autre a été tabassée avec l’arme et d’ailleurs aujourd’hui il suit des soins médicaux à l’hôpital Salama de Kasindi», a affirmé à «Radio Okapi» Fidèle Mutupeke, un des 15 militants de la LUCHA libéré par la justice. En ce jour, le Rassemblement projette une marche au moment où l’ONG américaine Human Rights Watch -HRW- vient de publier un rapport accusant le pouvoir de Kinshasa d’avoir recruté les ex-combattants du Mouvement de 23 Mars -M23- réfugiés en Ouganda et au Rwanda pour réprimer en décembre 2016 les manifestants qui réclamaient le départ du Président Kabila arrivé fin mandat constitutionnel. LA RD-Congo, à travers sa ministre des Droits humains, Marie Ange Mushebekwa, rejette les allégations de HRW pendant que Bertrand Bisimwa, président de cet ancien mouvement rebelle, défait par les FARDC dans le Nord-Kivu accuse le gouvernement RD-congolais d’avoir recruté les ex-rebelles indisciplinés. Selon Félix Tshisekedi, 0a marche prévue par son regroupement vise à «dire non au régime actuel dont le sursis d’une année expire le 31 décembre prochain» et rejeter la nouvelle loi électorale actuellement sous examen au Parlement.
Octave MUKENDI