Le gouvernement de la RD-Congo a déposé auprès du Bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi, de plus de trois cents articles, sur la télécommunication. Ce projet est l’œuvre des experts du secteur de télécommunication et de nouvelles technologies de l’information et de la communication ainsi que de différents services de l’Etat intervenant d’une manière ou d’une autre dans le fonctionnement de ce secteur. «Ce projet de loi a pris en compte la quasi-totalité d’impératifs liés à la gestion de ce secteur et comportait pas moins de 300 articles, fruit de la contribution de tous les services de l’Etat et aux autres experts concourant dans le domaine de télécommunication», rapportent des sources à AfricaNews.
Après examen au niveau de la Chambre basse, cette loi a été amputée de plusieurs articles. Il n’en reste qu’une centaine. Les articles estimés «vitaux pour renflouer les caisses de l’Etat», ont été élagués. Pourquoi? Est-ce pour satisfaire les intérêts des uns au détriment de ceux de l’Etat? Des questions fusent. La loi, selon certains analystes, a connu une telle boucherie au point de perdre quasiment l’essentiel de sa raison d’être.
Cependant, sous d’autres cieux, les gouvernements, au vu de l’importance accrue des NTIC, ont pris des mesures légales idoines en vue de protéger la population et de veiller sur les intérêts des uns et des autres, ceux de leurs pays en priorité.
En RD-Congo, ça fait débat. Des voix se lèvent dans l’opinion autour du sort réservé au projet de loi sur la télécommunication, un secteur qui se positionne comme l’un des plus importants dans le renflouement des caisses de l’Etat. Un débat houleux s’invite tant dans les salons huppés de la capitale que dans les bistrots et autres carrefours. Jamais une loi n’a aussi attisé la curiosité de la population qui, par ailleurs, soupçonne une main noire à l’origine de l’élimination des articles qualifiés de «vitaux». Ont-ils raison?
L’attitude du gouvernement remise en question
Certains analystes ont tenté de répondre à ces multiples interrogations qui taraudent les esprits de la population. Il est inexplicable, expliquent ces analystes, qu’une matière aussi technique et spécifique, exigeant une expertise avérée, puisse être traitée avec une telle promptitude et légèreté. «Les intérêts de l’Etat ont été largement sabordés au profit des intérêts des opérateurs de Télécom privés qui, de manière subtile, auraient imposé un texte prêt à porter, garantissant leurs intérêts et sacrifiant ainsi la nation et la population RD-congolaise toute entière», dénoncent ces analystes qui, visiblement, connaissent, par cœur, ce projet de loi en passe de subir un traitement «anti-patriotique».
Au sein de la population, certains esprits avisés vont jusqu’à remettre en question l’attitude du gouvernement vis-à-vis du sort réservé à son œuvre, son projet de loi. «Le gouvernement, non seulement il n’a pas pu défendre le texte proposé mais se montre curieusement solidaire à un texte atypique dont tout le monde connait l’origine: le laboratoire des opérateurs économiques», accusent des RD-Congolais, remontés comme jamais face à cette attitude de l’Exécutif. Puis: «Aucun Etat ne pourrait, en aucune façon, accepter de se laisser supplanter par des opérateurs privés dans un secteur d’importance vitale comme la télécommunication».
Certains vont plus loin, se chuchotant: «Les opérateurs privés du secteur de Télécom se sont mutualisés pour mettre le paquet double en vue d’arracher, par achat de conscience, la mise à l’écart du texte du gouvernement en échange d’une allégeance intéressée au texte des privés». Ça bouillonne.
Tout à coup, l’on fait réminiscence, dans l’opinion, du projet de loi sur le code minier. «Face aux opérateurs miniers, le gouvernement s’est montré opiniâtre face aux intrigues des opérateurs miniers étrangers qui s’étaient ligués pour brader les richesses minières du sous-sol RD-congolais», rappellent-ils. Et de poursuivre: «Le gouvernement a fait respecter les règles de jeu en imposant une loi cohérente qui, aujourd’hui plus que jamais, jette les bases d’une gestion souveraine des ressources minières». Ils sont convaincus que les choses ne devraient pas se passer autrement pour le secteur de PT-NTIC, car il occupe une position stratégique parmi les secteurs pourvoyeurs des recettes de l’Etat.
L’aspect sécurité foulé aux pieds!
Le comble, martèlent les analystes s’étant confiés à AfricaNews sous le sceau d’anonymat, est le rejet des aspects liés à la sécurité de l’Etat. Pourtant, en matière de sécurité, il est universellement établi que pour rien au monde, un pays peut s’embraser et entrer en déliquescence. Avant d’être logistique en dotant notamment l’armée et la police d’une artillerie lourde, la sécurité tient du domaine de la loi… du pouvoir législatif donc. Qu’arrive-t-il si ce même pouvoir foule aux pieds les aspects sécuritaires dans le projet de loi sur la télécommunication? «Dans les méandres de la cyber-sécurité ou de la cybercriminalité sont jonchées des passerelles qui ne sont fréquentées que par les services, seuls habilités à jouer à la prévention», avancent les analystes. Avant d’établir: «Se passer d’une telle réalité dans un texte qui légifère sur les Télécoms est sans nul doute accepter de vendre à vil prix la peau de toute une nation». Une question reste cependant pendante: Est-ce nécessaire d’encaisser ce projet de loi version saucissonnée?
Laurent OMBA
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