Des chiffres plutôt hallucinants. 27 blocs pétroliers et 3 gaziers évalués à environ 22 milliards de barils de pétrole brut et à 66 milliards de Normo mètres cubes -Nm3- de gaz méthane dissous dans les eaux du lac Kivu. Voilà qui générerait, à en croire les estimations, près d’USD 2 mille milliards de revenus pour la RD-Congo. De quoi, en principe, booster l’économie du pays en l’affranchissant du tout minier, et créer des milliers d’emplois. Ce qui permet de mieux comprendre la phrase de Félix Tshisekedi: «Il est temps pour nous d’exploiter le secteur des hydrocarbures».
En lançant les appels d’offres pour ces blocs pétroliers et gaziers le 28 juillet dernier, le Président RD-congolais Félix Tshiseked a assuré de la transparence dans la gestion des fonds, mais aussi du respect de la biodiversité. «C’est l’occasion pour moi de rassurer les partenaires internationaux sur la détermination de mon gouvernement à mener les travaux d’exploitation et d’exploration en utilisant des outils qui protègent l’environnement, les écosystèmes et l’équilibre écologique», avait souligné le Président Tshisekedi, insistant sur son souci de minimiser les impacts négatifs sur l’environnement.
Les ONG, Greenpeace en tête, ne l’entendent pas de cette oreille…
Greenpeace et d’autres ONG exerçant dans la protection de l’environnement voient plutôt d’un mauvais œil cette ambition pétrolière de la RD-Congo parce que, selon elles, 1 tiers des blocs pétroliers se situent dans la cuvette centrale où se trouvent les tourbières. Celles-ci séquestrent, selon les études, environ 30 milliards de tonnes de dioxyde de carbone. D’où les craintes d’impact négatif qui n’avantagerait pas la lutte contre le réchauffement climatique.
Et plus, des ONG émettent des craintes sur l’impact de l’exploitation sur l’écosystème. «Nous demandons au Président -Félix Tshisekedi- d’annuler ce projet suicidaire pour notre environnement car, ces enchères risquent d’avoir un impact négatif sur le climat, la biodiversité et les communautés locales», avançait Patient Muamba, qui s’occupe de la défense des forêts tropicales pour Greenpeace Afrique. Il a remis à la présidence une pétition signée par plus de 100 000 personnes qui s’opposent à l’appel d’offre lancé par le gouvernement RD-congolais.
Les RD-Congolais d’abord!
A ces 100 mille signatures récoltées, le gouvernement RD-congolais oppose l’intérêt de 100 millions des RD-Congolais. «Des ONG ne peuvent pas dicter à un pays souverain la marche à suivre», a tranché le ministre des Hydrocarbures, Didier Budimbu, lors d’une conférence de presse. Mais encore, parmi les millions des RD-Congolais qui fondent l’argument du gouvernement, il y a une bonne partie dont la vie dépend de la forêt.
Le gouvernement devra particulièrement prendre en compte comment préserver le mieux possible leur mode de vie et leur faire profiter également de la rente pétrolière espérée, au moment opportun. En outre, malgré cet élan de patriotisme justifié, le gouvernement n’est pas dans une posture confortable. Il y a quelques mois, le Président Tshisekedi a cosigné avec le Premier ministre britannique d’alors, Boris Johnson, à la COP26 de Glasgow, un accord qui l’engageait à protéger la forêt tropicale pendant dix ans en échange d’un soutien financier international d’USD 500 millions.
Au vu des enjeux économiques que représente l’exploitation pétrolière pour la RD-Congo, les 500 millions, soit USD 50 millions par an, du reste à partager avec d’autres pays, est à vrai dire dérisoire pour un pays qu’on veut à solution. Priver les RD-Congolais de ces ressources au nom de la lutte contre le réchauffement climatique exigerait des pays de la planète de compenser à juste titre le manque à gagner pour la RD-Congo. Ce serait la moindre des choses!
L’hypocrisie de Greenpeace…?
Dans les rues de Kinshasa, l’on s’étonne de la réaction des ONG internationales. D’aucuns soupçonne les grandes puissances d’utiliser ces ONG pour empêcher la RD-Congo de jouir de ces ressources. Sinon, souligne-t-on, comment expliquer que le Congo-Brazzaville, l’Angola et d’autres pays encore… exploitent allègrement sans qu’il y ait tollé au niveau international? Et les autorités RD-congolaises dénoncent aussi ce deux poids deux mesures.
Le pays fait l’objet de vives critiques alors que Joe Biden peut aller demander à l’Arabie saoudite d’augmenter la production de pétrole sans que cela n’émeuve outre mesure les ONG, souligne le New York Times. Pareil pour la Norvège qui a annoncé son intention d’exploiter de nouveaux gisements de pétrole dans l’Arctique. Pour renoncer à l’exploitation du tiers de ses 27 blocs pétroliers situés dans la forêt tropicale, la RD-Congo doit absolument renégocier le contrat signé à la COP26. En septembre, Kinshasa accueillera les travaux préparatoires de la COP27 qui se déroulera ensuite en Égypte. L’opportunité est là.
HRM