C’était le Raïs, seul avec lui-même. Le Chef de l’Etat était très attendu sur la question liée à son mandat, aux élections de 2016, donc à la révision constitutionnelle. Il a mis un terme aux spéculations en se prononçant pour le respect de l’esprit et de la lettre de la Constitution dans son ensemble. Ceux qui lui prêtaient l’intention de modifier, à la faveur des Concertations nationales, l’article 220 de la loi fondamentale pour s’aménager la possibilité d’un troisième mandat ont été servis
S’il est des terrains sur lesquels il était le plus attendu par une frange de la classe politique et la Communauté internationale, celui des élections et, plus spécifiquement, du mandat du Chef de l’Etat, figurait en très bonne place. Mercredi 23 octobre 2013 dans son discours sur l’Etat de la Nation devant le Congrès, le Président de la République, faisant le compte-rendu des recommandations des Concertations nationales, a tordu le cou à toutes les rumeurs qui lui prêtaient les intentions les plus loufoques: Joseph Kabila Kabange s’est gardé de change la Constitution.
C’était Kabila, seul avec lui-même. Le Chef de l’Etat était très attendu sur la question liée à son mandat, aux élections de 2016, donc à la révision constitutionnelle. Il y a eu plus de peur que de mal. La simplicité avec laquelle le Président a évoqué la question est saisissante. Kabila a, en effet, dit être pour le respect de l’esprit et de la lettre de la Constitution dans son ensemble. Ceux qui lui attribuaient l’intention de modifier, à la faveur des Concertations nationales, l’article 220 de la loi fondamentale pour s’aménager la possibilité d’un troisième mandat peuvent se le tenir pour dit.
De même, le Président n’a manifesté aucune intention de s’éterniser au pouvoir. Il a, en effet, recommandé à la Commission électorale nationale indépendante -CENI- d’envisager la présentation au Parlement, dans les meilleurs délais, un calendrier électoral réaliste et de processus électoral en organisant les élections locales, provinciales et sénatoriales. Se voulant aussi réaliste que pragmatique, Kabila a préconisé que le Sénat et les Assemblées provinciales issues des élections de 2006 demeurent en place jusqu’à l’installation de ceux qui seront issus de prochaines élections pour lesquelles il a recommandé la tenue dans les meilleurs délais.
S’attardant toujours sur la question des élections, le Président de la République a accédé à la recommandation des Concertations nationales d’imposer, à travers la loi ad hoc, une représentation de la femme à hauteur de 30% sur toutes les listes électorales. Allant plus loin, il a proposé que soit réservé, dans les circonscriptions d’au moins trois sièges, un quatrième siège ouvert à la compétition des seules femmes.
Changer d’avenir
C’est donc un nouvel avenir que le Président de la République a préconisé à la RD-Congo et aux RD-Congolais à travers toute une batterie des mesures visant l’excellence et le bien-être de ses compatriotes. Kabila n’a, en effet, rien oublié, allant jusqu’à s’engager à suivre de près l’application des 679 recommandations issues des Concertations nationales. Il sait que tout dépend de la volonté et de l’engagement de l’homme, à la fois seul acteur et bénéficiaire de son action de reconstruction pour le développement.
Pour ce faire, il a invité ses concitoyens à changer eux-mêmes avant de changer la RD-Congo. Ce changement, a-t-il indiqué, devra concerner non seulement la manière de vivre ensemble, la manière de faire la politique, de gérer l’Etat et les communautés de base, mais aussi la manière de vivre la démocratie. Dans le même ordre d’idées, et en appelant à une mobilisation générale pour mettre fin aux menaces de balkanisation du pays, le Chef de l’Etat a appelé au changement des mentalités, des méthodes de travail et des comportements pour mettre fin aux conflits, suivre la reconstruction nationale et conforter les nouvelles perspectives d’une RD- Congo meilleure. La même invite a été faite pour une nouvelle éthique et un nouveau sens du bien public.
Pour sa part, et dans le souci de matérialiser l’unité, la cohésion nationale et la solidarité retrouvées, Kabila a pris un train des mesures visant à décrisper l’atmosphère politique. Il a annoncé avoir signé, le même mercredi 23 octobre, une ordonnance portant grâce présidentielle. A la justice et autres structures compétentes, il a invité à se pencher sur la libération conditionnelle des prisonniers militaires après celle des civils. Quant à l’amnistie annoncée, il attend la loi ad hoc qui doit être votée par les deux chambres du Parlement.
Réconciliation oui, impunité non!
Pour autant, Kabila a prévenu que la quête de la cohésion nationale ne doit pas rimer avec l’impunité. Sans justice, a-t-il dit, la réconciliation escomptée ne serait que factice. Aussi a-t-il annoncé l’ouverture des enquêtes en vue des poursuites contre les officiers militaires coupables d’exploitation illicite des ressources nationales, de dissipation des armes et munitions et de détournement de la solde des militaires. «Quand un officier a pour maîtres le drapeau et l’argent, le premier en pâtit nécessairement», a estimé le Chef de l’Etat qui a également promis des sanctions contre les auteurs des crimes de guerre, de viol et d’enrôlement des enfants dans les groupes armés. A ce sujet, le Président a annoncé la nomination prochaine de son représentant pour la promotion de la lutte contre la violence et le recrutement des enfants dans les groupes armés. Ce représentant servira également d’interface avec la Communauté internationale.
Toujours au chapitre de la lutte contre l’impunité, Kabila a annoncé la désignation prochaine d’un Conseiller spécial qui sera chargé d’assurer le monitoring de l’évolution du patrimoine, de la corruption et de l’enrichissement illicite des responsables politiques, des hauts fonctionnaires, des mandataires publics et autres agents de l’Etat. Il a également exhorté le Parlement à prendre une loi portant généralisation de la déclaration des biens à tous les mandataires publics.
Ouverture tous azimuts
Pour le reste, le Chef de l’Etat aura fait montre d’une grande ouverture en accédant littéralement à toutes les recommandations et attentes aussi bien des Concertations nationales que de la classe politique et la Communauté internationale. C’est ainsi, par exemple, qu’il a annoncé la formation prochaine d’un Gouvernement de cohésion nationale, ouvert aussi bien à la majorité qu’à l’opposition et à la Société civile. Il a, d’ores et déjà, assigné une feuille de route à cette équipe qui aura pour missions la restauration de la paix et de l’autorité nationale, la consolidation de la cohésion, la poursuite de la reconstruction nationale, l’appui à la décentralisation, l’organisation des élections et l’amélioration des conditions de vie de la population.
Kabila a également accédé à la demande de rapatriement des dépouilles de feu le Président Mobutu et du Premier ministre Moïse Tshombe. Sur l’épineuse question de la nationalité, il a invité les services compétents à s’y pencher pour trouver une réponse appropriée. En attendant, il a demandé au Gouvernement de tout mettre en œuvre pour accorder des facilités consulaires aux Congolais qui ont acquis d’autres nationalités.
KISUNGU KAS
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