Comme il fallait s’y attendre, la ministre du Portefeuille, Louise Munga, s’est jetée corps et biens dans l’eau. Au crépuscule du mandat du gouvernement Matata dont les jours sont comptés, la patronne du Portefeuille a préféré ne pas s’écarter de la ligne de conduite tracée par le capitaine au risque de s’attirer les foudres du ciel
Le feuilleton de la dissolution et liquidation illégales de Lignes aériennes congolaises est connu de tous. Il continue de faire couler beaucoup d’encre et de salive car dans un pays qui se veut un Etat de droit, il est difficile de cerner le comportement indigeste de certains dirigeants placés aux commandes des institutions.
Le mandat de douze mois renouvelable une fois accordé au comité de liquidation de LAC-Sarl, mis en place en violation de la Loi -les termes sont du Sénat- a expiré lundi 12 septembre 2016.
Avec à la clé un bilan lourd, négatif et macabre. Un déni de gestion. Sur le plan politique, les recommandations pertinentes des Concertations nationales dont est issue l’actuelle équipe gouvernementale, ainsi que celles de la Chambre haute du Parlement ont tranché en faveur de la réhabilitation, la modernisation et la relance de la première compagnie aérienne nationale.
Sur le plan judiciaire, outre le jugement avant dire droit du Tribunal de commerce de Kinshasa/Gombe interdisant au comité de liquidation toute vente ou aliénation des biens du patrimoine de LAC-Sarl, le dossier est pendant devant la Cour suprême de justice faisant office de Cour de cassation en matière de renvoi de juridiction. La CSJ a pris l’affaire en délibéré et n’a pas encore rendu son jugement.
Des irrégularités dans la vente des villas
Dans ses investigations, le Conseiller spécial du Chef de l’Etat en matière de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, a suspecté des irrégularités dans la vente des villas de LAC-Sarl.
La sanction préventive est vite tombée. Saisie du compte de LAC-Sarl chez Ecobank où certains fonds ont été versés en attendant la suite de l’enquête.
Au même moment, Luzolo Bambi a relevé un grand conflit d’intérêts constitué par la présence de l’administrateur délégué à la triple casquette de liquidateur de LAC-Sarl et directeur commercial de Congo Airways ainsi que du ministre des Transports et Voies de Communication.
Ce dernier, après avoir battu campagne urbi et orbi pour la dissolution de LAC-Sarl, n’a jamais caché ses intentions visant l’aliénation du siège social de LAC-Sarl sur l’avenue du Port, dans la commune de la Gombe à Kinshasa, des infrastructures techniques et des bâtiments administratifs de LAC-Sarl situés dans l’emprise aéroportuaire de N’djili pour leur cession gracieuse au nouveau transporteur aérien.
Les recommandations du Conseiller spécial ont été superbement ignorées par la toute puissante dame du gouvernement.
Il s’avère qu’après à peine un an d’exploitation, la compagnie aérienne d’économie mixte fait eau de toutes parts. D’où la nécessité de lui procurer rapidement des béquilles pour éviter qu’elle ne sombre si prématurément.
D’ailleurs, la descente aux enfers a déjà commencé avec le renvoi d’une trentaine d’agents. La purge est sensée se poursuivre jusqu’à 250 unités, l’entreprise étant contrainte de se débarrasser de tous les membres du personnel recrutés à la va-vite au sein de la même coterie et qui ne répondent nullement au profil requis en aviation civile.
Prolongation de six mois du mandat du comité illégal de liquidation
En attendant, le «Léopard volant» continue d’attirer les convoitises des prédateurs visibles et d’autres tapis dans l’ombre qui se manifestent sous de prête-noms en vue de dépouiller LAC-Sarl de toute sa substance.
Pour déblayer le terrain à ce projet machiavélique, Louise Munga, ministre du Portefeuille, a convoqué jeudi 22 septembre 2016 dernier une assemblée générale au cours de laquelle il a été décidé de prolonger le mandat du comité illégal de liquidation d’au moins six mois. Avec l’instruction ferme de tout mettre en œuvre pour vendre le plus de biens du patrimoine de LAC-Sarl dans les plus courts délais.
Voilà qui projette à l’écran les appétits gloutons des fossoyeurs du quinquennat du social du chef de l’Etat. Là où toute la communauté nationale s’attendait à des créations d’emplois, on assiste plutôt à des combats d’arrière-garde pour la suppression du peu encore existant. Que représente le Sénat devant le gouvernement Matata? A chacun sa réponse.
Toujours est-il que dans les hautes sphères de décision où cette information est parvenue, beaucoup de responsables entendent sortir de leur réserve pour remettre les pendules à l’heure.
Le lourd silence qui a couvert comme une chape de plomb et ce, pendant trop longtemps, les nombreux dérapages du gouvernement Matata, a fini par desservir la Majorité présidentielle. Si les surdoués avaient été arrêtés net dès le début, les opérations électorales n’auraient pas autant éclaboussé les tenants du pouvoir au point de les jeter en pâture sans ménagement comme c’est le cas présentement.
Le prolongement du mandat du comité illégal de liquidation de LAC-Sarl procède de cet entêtement à vouloir cracher sur les recommandations pertinentes émanant des structures avisées comme celles cités ci-haut. Les prochaines semaines promettent des vertes et des pas mûres.
Tino MABADA
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