Sur base de quels normes et règlements aéronautiques Congo Airways opère-t-elle? Cette question apparemment anodine ne devrait pas se poser au regard de la stature que les autorités RD-congolaises voudraient donner à ce nouveau transporteur aérien. Mais il y a tellement des zones d’ombre qu’il convient d’éclaircir très rapidement au risque de voir les suspicions prendre davantage d’ampleur dans l’opinion.
Congo Airways société privée ou d’Etat ?
Le statut hybride de Congo Airways pose problème. Lorsqu’un compatriote s’est permis de mettre à contribution la justice irlandaise pour procéder à la saisie d’un Airbus A320 admis dans les ateliers d’Aer Lingus en vue de recouvrer ses créances, les avocats de la République ont brandi l’argument selon lequel Congo Airways serait une société privée. Mais, en RD-Congo, c’est tout le contraire qui est vécu sur le terrain au regard de l’appui institutionnel inconditionnel de certains gouvernants obnubilés par l’idée de rayer de la surface de la terre, toute trace de Lignes Aériennes Congolaises, LAC-SARL, en falsifiant même certaines données socio-économiques tout en crachant sur les Lois nationales, traités et accords internationaux ainsi que les recommandations pertinentes des Concertations nationales et du Sénat en faveur de sa réhabilitation, sa modernisation et sa relance.
Au cours d’une émission diffusée il y a deux semaines sur les antennes de Radio Okapi, trois débatteurs de taille se sont penchés sur le début de l’exploitation des aéronefs de Congo Airways dont les conditions d’acquisition et d’importation continuent de faire couler beaucoup d’encre et de salive. Ce soir-là, les auditeurs de la radio onusienne ont eu droit à un flot d’informations inédites qui ont soulevé beaucoup d’interrogations demeurées sans réponse. L’administrateur délégué de LAC-SARL qui assume en même temps les fonctions de directeur commercial et marketing de Congo Airways -où est passée la bonne gouvernance?- a échangé avec le directeur technique de LAC-SARL et un journaliste chroniqueur économique de Télé7.
Des inquiétudes ont été formulées sur la création ex-nihilo d’une compagnie aérienne ne disposant pas d’infrastructures de base, ni équipements, ni matériels, ni personnel qualifié dont la formation peut s’étendre de trois à quatre ans, à fortiori neuf responsables aguerris aux «post holder». Ceci fait qu’au stade actuel, le nouveau transporteur aérien ne peut satisfaire aux contraintes règlementaires d’exploitation.
Les prescrits de la loi sur l’aviation civile bafoués
Nous avons poussé plus loin nos investigations pour en savoir davantage sur cette épineuse question. Sur le plan des normes et règlements aéronautiques, les autorités congolaises semblent jouer une partition qui consacre l’anarchie en foulant aux pieds certaines lois de la République et internationales.
La loi sur l’aviation civile en RD-Congo exige que toute nouvelle compagnie aérienne créée puisse obligatoirement disposer d’un certificat de transporteur aérien, CTA avant de prétendre opérer un quelconque vol. -RACD 9.1.1.6.2. Cette même loi contraint tout exploitant aérien d’être porteur d’un certificat de transporteur aérien 90 jours avant le début de l’exploitation -RACD 9.1.3.2. Congo Airways peut-elle exhiber ce document indispensable pour l’exploitation aérienne?
L’opinion se souviendra que sur base de ces dispositions légales, le ministre des Transports et Voies de Communication a usé de son impérium pour envoyer à la trappe toutes les compagnies aériennes de droit congolais n’ayant pas rempli les critères exigés dans le processus de certification piloté dans un premier temps par l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale -OACI- avec le concours des experts de l’Association Internationale du Transport Aérien -IATA- et dans un second temps par l’APAVE.
Dix experts RD-congolais de grande notoriété certifiés par l’IATA
Pendant leur séjour en RDC, les experts de l’IATA ont assuré l’encadrement et décerné des certificats d’homologation à dix experts aéronautiques congolais triés sur le volet sur base de leurs connaissances, compétences et expertise avérée en la matière dans tous les domaines du transport aérien.
Un premier lot de cinq compagnies aériennes congolaises a subi l’épreuve de la certification. Si Air Tropiques a réussi avec brio, Kin Avia, Itab, Korongo Airlines et Compagnie Aérienne Africaine CAA ont été recalées. Cependant, elles ont bénéficié d’un moratoire leur permettant de continuer l’exploitation des vols tout en se mettant en phase avec la règlementation aéronautique.
Après le départ des experts de l’IATA pour des raisons évidentes, l’APAVE a pris la relève et s’est penché, avec le concours des dix experts congolais précités, sur les dossiers des 29 transporteurs aériens ci-après: 1. Air Baraka 2. Malu Aviation 3. Sion Airlines 4. Swala Aviation 5. Mango Airlines 6. Blue Airlines 7. Gisair 8. Blue Sky Airlines 9. Busy Bee Congo 10. Cetraca Aviation 11. LAC 12. Pegasus 13. Transair Cargo Service 14. Air Fast Congo 15. Doren 16. Congo Express 17. Lubumbashi Air Services 18. Biega Airways 19. Goma Express 20. Services Air 21. Katanga Express 22. Tracep Congo 23. Air Kasaï 24. Getra Airways 25. Gomair 26. Dakota Aviation 27. Okapi Airlines 28. Air Katanga 29. Will Airlift.
Elimination sans complaisance des prétendants à chaque phase de la certification
L’examen approfondi de chaque cas a abouti à l’élimination de près de la moitié des compagnies dont seules 14 sont restées en lice. Il s’agit en l’occurrence : 1. Air Katanga 2. Mango Airlines 3. Blue Sky Airlines 4. Will Airlift 5. Gomair 6. Blue Airlines 7. LAC 8. Malu Aviation 9. Services Air 10. Air Fast Congo 11. Busy Bee Congo 12. Transair Cargo Service 13. Doren 14. Dakota Aviation 15. Swala Aviation 16. Air Kasaï.
A chaque phase de la certification, des prétendants ont dû laisser des plumes. Les derniers qui ont gardé le haut du pavé sont Transair Cargo Service, Air Kasaï, Services Air, Blue Sky Airlines, Blue Airlines, Will Airlift et LAC. Ce travail s’est arrêté en chemin. Outre les problèmes de primes des experts congolais disparues au niveau du ministère des Transports et Voies de Communications, les experts de l’OACI qui sont passés récemment à Kinshasa, ont remis en cause l’expertise des délégués de l’APAVE. A leurs yeux, seuls les rapports des dix experts congolais comptent. Un point. Un trait.
La grande question que l’on se pose est celle de savoir qui doit maintenant certifier les compagnies aériennes de droit congolais quand on sait que l’Autorité de l’Aviation Civile de la RDC se trouve dans l’œil du cyclone des institutions aéronautiques internationales.
LAC-SARL seule compagnie à disposer d’infrastructures adéquates
Congo Airways que les gouvernants veulent propulser au-devant de la scène, doit être une compagnie de référence qui opère de façon normalisée telle que l’a toujours été Air Congo/Air Zaïre/LAC. En effet, avec LAC en activité, qui pouvait mettre en doute les capacités de la RDC d’opérer selon les normes pertinentes de l’OACI ? AIR CONGO/LAC faisait partie de toutes les organisations professionnelles au même titre que les grandes compagnies aériennes mondiales telles que AIR France, LUFTHANSA, ALITALIA, KLM, SAS, BRITISH AIRWAYS, etc. et ses avions étaient aux mêmes standards.
Au cours de la certification des compagnies aériennes congolaises exigée par le ministre des Transports et Voies de Communications, LAC-SARL se trouvait devant un « free way », un boulevard pour que, in fine, soient confirmées ses capacités opérationnelles conformes aux normes pointilleuses de l’aviation civile internationale.
Il sied de noter qu’à plusieurs reprises des hauts responsables de ce ministère sont intervenus personnellement pour obtenir de leur consultant APAVE, qui s’en est plaint, l’exclusion pour non-conformité de LAC-SARL. Malheureusement, même les experts d’APAVE ne pouvaient accéder à leur demande parce que Air Congo/LAC a toujours été une compagnie aux standards internationaux. Elle est, en plus, la seule compagnie en RDC, en Afrique Centrale et au-delà, à disposer d’infrastructures pouvant satisfaire aux diverses contraintes de l’exploitation aérienne normalisée.
L’Autorité de l’Aviation Civile/RDC a du pain sur la planche
Maintenant, en autorisant Congo Airways d’opérer sans respect des normes et règlements aéronautiques, le ministère qui a dans ses attributions l’activité aéronautique, vient de jeter l’opprobre sur l’aviation civile congolaise dont la RDC devra payer un lourd tribut. L’AAC/RDC a du pain sur la planche, elle qui doit justifier ce passage en force sur base des preuves implacables. Dommage que la politique, par ses injonctions irrationnelles, vienne s’immiscer dans ce domaine fortement règlementé au risque de faire clouer davantage au pilori le pays pendant que des efforts louables sont fournis depuis quelque temps pour l’en extraire et ramener la RDC dans le cercle des pays éligibles à l’aviation civile sûre et sécurisée.
Les compagnies aériennes privées de droit congolais jadis écartées du processus de la certification sont en train de ronger leur frein face à cette politique de deux poids deux mesures. La logique, à laquelle nous ne souscrivons nullement, voudrait que là où les gouvernants ont laissé les coudées franches au nouvel opérateur aérien, tout le monde soit logé à la même enseigne. Dans les milieux de la Fédération des Entreprises du Congo, FEC, beaucoup de membres et exploitants concernés par cette mesure discriminatoire, ont peur d’élever le ton au regard des menaces qui pèsent sur quiconque oserait dénoncer cette supercherie. La sanction est nette : retrait ou refus de bénéficier d’une licence d’exploitation sous cette administration. Ce dossier est tellement grave que nous allons y revenir avec force détails.
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