La RD-Congo attend voir un nouveau gouvernement dirigé par lOpposition, organiser les élections suivant le nouveau délai proposé par les résolutions du dialogue jusquici le plus pragmatique. Pour ce faire, le pays aura plus que besoin dune volonté politique qui certes, est un élément déclencheur mais également des moyens pour faire sa politique
Au lendemain du dialogue de la Cité de lUnion Africaine, plusieurs langues se sont déliées soit pour taxer dinconstitutionnelle, soit pour encourager loption levée par les dialogueurs en confiant à lOpposition, la primature. Au cur de la crise politique due à limpossibilité dorganiser les élections dans le délai constitutionnel, lOpposition au dialogue a tenu mordicus à ce quelle soit directement impliquée dans les affaires -gage de sécurité- pour la concrétisation du prochain calendrier électoral. Le gouvernement actuel ayant échoué à cette mission, est réputé démissionnaire et doit laisser les rennes à une autre équipe « plus motivée » qui aura la responsabilité doffrir aux congolais des élections. Du coup, il se pose linévitable question du profil du prochain Premier ministre successeur de Matata Ponyo. Cette interrogation défraie encore la chronique plus de 21 jours après la signature du dialogue et, personne ne sait dire. Qui sera le prochain Premier-Ministre?
Lorsque des sons doutre-Mer convergent à ceux dici
Dans son extrait du revu de presse intitulé «Au Congo, Le Lait est renversé», Colette Braeckman traite lUDPS dÉtienne Tshisekedi dune association qui négociait déjà lété dernier avec les représentants ou envoyés de la Majorité présidentielle -MP- pour que son fils Félix Tshisekedi devient Premier ministre de Monsieur Kabila. Elle va plus loin jusquà désavouer le comportement de Tshisekedi qui, depuis le Maréchal Mobutu, ne fait que fuir les rendez-vous en faisant des volte-face répétés. Elle se demande si cela pourra jouer à lapaisement
Une corroboration nette aux propos de Bruno Mavungu sur Top Congo FM qui sen est pris aux proches et à lactuelle direction de lUDPS quil accuse de vouloir privatiser le parti dEtienne Tshisekedi. Lancien Secrétaire général du parti de Tshisekedi a insisté sur le fait que le dialogue était bloqué parce que Felix Tshisekedi navait pas obtenu le poste de Premier ministre. Même si Edem Kodjo na jamais dévoilé les détails de ce deal, un accord secret aurait été conclu à Paris à l’hôtel Raphaël entre l’UDPS et la délégation de la MP, conduite par Néhémie Mwilanya, le directeur du cabinet du Chef de l’État. Cest ce qui explique les propos du facilitateur à louverture du dialogue lorsquil s’est dit étonné que l’UDPS, premier parti à prôner le Dialogue et à le recevoir pendant que les autres partis de l’Opposition le contestaient, soit le premier à le rejeter. Et la théorie du régime spécial soutenue par le Rassemblement où lon assisterait à une table rase des institutions au 19 décembre prochain, en faveur dune entrée en fonction dune nouvelle classe politique dont la mission serait dorganiser les élections, sans Joseph Kabila aux commandes, consolide lidée selon laquelle la primature -surtout- intéresserait même les absents au dialogue.
La Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) a abordé dans le même sens lorsquelle établit quil y a des points de convergence à prendre en compte, dans la recherche dune sortie de crise pacifique tant attendue par notre peuple notamment sur le respect absolu de la Constitution et sur limpossibilité des protagonistes à organiser matériellement, les élections avant la fin de lannée 2016 et, de fait, ils acceptent une période de transition.
Fort de tous ces éléments, la question que daucuns ne se poseraient est celle de savoir pourquoi la Primature reviendrait à lUDPS exclusivement et surtout pourquoi seulement au fils?
Le mérite de lUDPS est son combat à travers lhistoire dont voici les faits marquants: lUDPS a contribué grandement à lémergence en 1990 de plusieurs forces politiques et sociales acquises au changement et fonctionnement progressif de la société comme toute société démocratique moderne; la tenue de la Conférence Nationale Souveraine en 1991 qui a fixé les bases dune Transition voulue démocratique qui aura à la clé, la réussite du Dialogue Inter-congolais de 2003 et le démarrage de la Transition daprès- guerre vers des élections libres et démocratiques. Le contexte actuel oblige tout observateur averti à placer tout parti politique dans un paradigme de circularité à travers lequel sa survie -politique- tiendrait de la conjugaison des actions des autres partis politiques. Autrement dit, de la même manière lon soutiendrait que le Rassemblement est une plate-forme politique qui influe sur lopinion publique, de la même également il faudrait accepter quun parti à lui-seul, UDPS soit-il, ne se suffirait à lui seul: tout est question donc déquipollence dans le respect de statut et rôle que fixe lenjeu de lheure. Cest ce qui expliquerait les remue-ménages au sein du Rassemblement, actuellement car, certains partis-membres se sentiraient manipuler par dautres. Avec tout ça, il faudra prendre en compte la fixité sur le fils Tshisekedi qui, suivant des indiscrétions, serait lhomme providentiel à défaut du Pater. Daprès toujours ces sources, cest en connaissance de sa posture quil aurait engagé des pourparlers hors-micro avec le pouvoir en place avant le dialogue sous la bénédiction de sa famille biologique. Reste plus quà espérer que la RD-Congo ne sombre pas dans un feuilleton à la Corneille basé sur la quête de lhonneur du père rendu par le fils.
Et dans tout ça, que devient lUNC de Vital Kamerhe ?
Tout le monde sait quen RD-Congo, lOpposition politique a toujours eu du mal à se choisir son leader et ça, même les rébellions armées nont pas pu doter la RD-Congo dun chef de file de lOpposition à même dincarner les aspirations du peuple. En acceptant de prendre part au dialogue, lUNC -ainsi que tous les autres partis présents au dialogue- a joué sa carte du pragmatisme en politique: tout le monde était davis quil fallait un dialogue avec le pouvoir afin déviter la crise mais personne ne prenait le courage de linitier. Par contre, toute la classe politique observait passivement la distanciation des positions qui ne cessait de samplifier entre les protagonistes avec comme conséquence, limprobabilité dun dialogue. Cest dans ce sens quil faut placer la position de Vital Kamerhe lorsquil parle dun élan de décrispation de la scène politique de la part du pouvoir en place: ce qui aurait été à la base de son engagement à prendre part au dialogue. Avait-il raison ou pas? Ne serait peut-être pas la bonne question qui intéresse les congolais aujourdhui, qui ne demandent pas mieux que des élections. Lhistoire retiendra que la participation de lUNC -tout comme ceux de tout autre opposant- au dialogue a ouvert la voie à des pistes claires de sortie de crise, à défaut du non. Cest sur base de cette leçon politique magistrale que daucuns saccordent à dire que la primature reviendrait à juste titre à lUNC: tout parti politique digne de ce nom est en perpétuelle quête du pouvoir et une fois gagnée, veille à le conserver le plus longtemps possible. Il est aussi vrai que le jeu dalliances et des tractations encours puisse surprendre plus duns au sein de la classe politique de lOpposition, Rassemblement y compris. La CENCO en a déjà donné le ton en allant poursuivre les discussions avec les acteurs de cette plate-forme politique.
Quattendre du prochain Premier-Ministre ?
Au point où nous en sommes, la RD-Congo attend voir un nouveau gouvernement dirigé par lOpposition, organiser les élections suivant le nouveau délai proposé par les résolutions du dialogue jusquici le plus pragmatique.
Pour ce faire, la RD-Congo aura plus que besoin dune volonté politique qui certes, est un élément déclencheur mais également des moyens pour faire sa politique. Le nouveau “Contractualisme” contrat social, sil se veut être le garant de lidée dautolégislation -selon laquelle les destinataires des lois doivent aussi pouvoir se regarder comme leurs auteurs-, doit faire des sociétés civiles, interagissant dans les espaces publics, des interlocuteurs privilégiés en tant quelles constituent le socle et la substance de lémergence des formes modernes de démocratie et de politique délibératives. Il est important de souligner que la crise politique actuelle est surtout une crise fonctionnelle que structure dans la mesure où le fonctionnalisme appréhende les sociétés à partir des institutions assurant leur stabilité et structurant les comportements individuels aux travers de rôles et de statuts. Il serait donc logique que le prochain Premier-Ministre fasse participer les différentes composantes socioculturelles, politiques, économiques à la tâche.
Un autre défi majeur est celui lié aux moyens financiers à réunir quant on sait que les caisses de lEtat sont presque vides et que léquipe gouvernementale sortante a déposé en octobre dernier au bureau de lAssemblée nationale, le projet de loi de finance pour lannée 2017. Ce budget est évalué à cinq cent milliards et sept cent millions de Francs Congolais (4,5 milliards de dollars américains). Selon le Premier ministre, ce budget, comparativement à celui de 2016, sera en diminution de 15%. Une diminution que Matata Ponyo justifie par la chute des cours des matières premières. Cest clair, la tâche ardue à remplir par le prochain Premier-Ministre pourrait relever,- si on y réfléchit de près,- dune mission impossible à comparer aux 12 travaux dHercules.
Mais lon sait aussi quavec ses 80 millions dhectares des terres arables, de lavis de nombreux spécialistes, la RDC a des capacités de couvrir les besoins de près dun tiers de la population mondiale en produits agricoles -céréales, légumes, légumineuses et fruits- et en produits délevage des volailles, des bovins, des caprins, des ovins et des porcins. Ses potentialités halieutiques sont estimées à 700.000 tonnes par an contre de besoins de 425.000 tonnes par an. Avec une réserve deau douce estimée à 8.75 millions Km/3 -8750milliards M3-, la RD-Congo dispose dun potentiel hydroélectrique de 100.000MW, soit 876 milliards KWh. Située au confluent des réseaux de transport transafricains -avions, routes et chemins de fer- qui sintègrent à ses 16.238 km de voie navigables, 5.033 km de voies ferrées, 270 aéroports dont 5 internationaux et 145.000 km de routes nationales et régionales et des pistes secondaires, le pays peut mettre ses vocations à la disposition des autres pays de la Région, qui faute dun marché intérieur important et suite à la concurrence très serrée au niveau du trafic international, font faillite malgré le fait quils disposent des compagnies aériennes qui, malgré limportance et la modernité de leurs flottes.
En plus de tout ça, notre pays dispose dimportantes réserves de pétrole brut, de cassitérite, de cuivre, de cobalt, de diamant, de fer, de lithium, de manganèse, de niobium, dor, de wolframite, de zinc et de produits miniers radioactifs comme le cobalt et luranium. Faut-il encore parler du tourisme car la RD-Congo possède de nombreux sites luxuriants dont 9 parcs nationaux et une forêt qui représente 6% des réserves tropicales du monde et 47% du massif forestier tropical de lAfrique. Bref, lintégration des stratégies de développement du tourisme pourrait aider considérablement la RD-Congo à rentabiliser, son marché contre paiement des taxes et redevances, de la TVA et de limpôt sur le bénéfice professionnel « IBP » sur le chiffre daffaires réalisées.
Ces quelques pistes conjuguées me laissent à penser quil est possible de réunir les précieux 2 milliards nécessaires pour lorganisation des élections en RDC. Le Chef de lEtat dans son pouvoir discrétionnaire devrait prendre en compte tous ces paramètres objectifs au moment de la nomination du prochain Premier-Ministre car ce dernier doit au-delà de toute pression politique, avoir létoffe.
Quant à moi, jinvite les Congolais à prêter main forte à la prochaine équipe gouvernementale quelle que soit son obédience afin de relever ce nouveau challenge qui du reste, est encore réalisable. Lunion fait la force, dit-on.
Jean-Serge Onyumbe Wedi
Analyste politique Indépendant &Expert en communication

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