Il est mort le 1er février 2017 à Bruxelles d’une embolie pulmonaire. Pourtant plus de trois mois après, la dépouille d’Etienne Tshisekedi wa Mulumba, leader incontesté de l’Opposition politique en RD-Congo et icône de la lutte pour la démocratisation du pays, traine toujours dans un frigo en Belgique, à des milliers de kilomètres de la terre de ses ancêtres. Entretemps, un bras de fer déplacé entre le pouvoir et la famille politique et biologique du feu président du Conseil de sages du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement, ponctué de marchandage, surenchère, chantage,…, et/ou rigueur de la loi, continue.
Une aberration qui étonne plus d’un, surtout quand on se remémore ce qui a causé, dès le départ, cette situation: la tentative de troquer le corps du sphinx contre la primature, comme en témoigne le tweet de Martin Fayulu, membre du Rassemblement, posté le 3 février, deux jours après le décès de Tshisekedi: «Le peuple exige que Félix Tshisekedi soit nommé Premier ministre avant le rapatriement du corps du sphinx de Limete. Nous sommes d’accord avec lui». Comment s’était-il pris pour consulter le peuple? Était-ce plutôt son avis? Les choses ne s’arrangent pas.
Après plusieurs reports de son rapatriement, Félix Tshisekedi affirmait sur «Top Congo» que le corps de son défunt père serait bientôt acheminé à Kabeya Kamwanga dans le Kasaï pour sa mise en terre. Puis Kabund a Kabund, secrétaire général de l’UDPS, viendra annoncer l’arrivée des restes de Tshisekedi pour ce vendredi 12 mai à Kinshasa. Dans la foulée, il avait souligné qu’il sera exposé au Palais du peuple et inhumé au siège du parti à la 11ème rue Limete. Et finalement, dans un communiqué, le parti et la famille de Tshisekedi ont une fois encore reporté le retour du corps du Lider maximo à une date ultérieure. La cause: le lieu de l’exposition et celui de l’enterrement ne leur ont pas été accordés.
Le ton est loin de la diplomatie. Dans une correspondance de l’UDPS adressée au gouverneur de la Ville de Kinshasa, André Kimbuta, on peut lire: «la décision de reporter le rapatriement de la dépouille d’Etienne Tshisekedi vise à faire échec au plan machiavélique du pouvoir en place d’engager le pays dans une voie de la violence lors des obsèques de Tshisekedi». En effet, le SG Jean-Marc Kabund avait notifié le gouv’ Kimbuta sur le choix d’enterrer le Lider maximo à Limete, choix qui résulte, selon lui, non seulement de la volonté de la veuve du défunt et sa famille biologique, mais aussi de l’opinion générale du «peuple». Ce qui a été rejeté le gouvernorat. Réagissant à cette demande de l’UDPS, Kimbuta a été clair. Pour lui, cette proposition de l’UDPS n’est pas conforme à la Loi.
Il recommande à Kabund de «respecter les prescrits de la Législation en matière d’inhumation». Kimbuta s’est appuyé sur les Textes, insistant sur l’Ordonnance du 4 septembre 1909 sur les cimetières dans les villages indigènes, l’Ordonnance du 15 mars 1950 sur le service des inhumations et polices des cimetières, l’Ordonnance du 14 février 1914 sur les services des inhumations et police des cimetières et l’arrêté du gouverneur général du 16 mai 1907 sur les concessions de sépultures: «L’inhumation ne pourra avoir lieu que dans un terrain affecté aux inhumations. Aucune habitation ne peut être élevée à une distance inférieure à 50 mètres des cimetières».
Et le n°1 de la ville de conclure: «votre proposition de procéder à l’inhumation de l’illustre disparu au siège de votre parti ne saurait être retenue pour non-conformité à la loi». La pullule a du mal à passer à Limete. En plus, Kimbuta a recommandé à l’UDPS de fournir à l’Hôtel de ville de Kinshasa tous les détails sur le plan de rapatriement de la dépouille d’Etienne. Il a également exigé l’itinéraire à suivre par le cortège funèbre ainsi que la confirmation du lieu d’exposition.
Le respect strict des lois et règlements de la République
Dans ce bras de fer entre les deux partis, pouvoir et UDPS, la tentative d’imposer à l’Etat les obsèques de Tshisekedi est butté à un grand obstacle: la loi. Le choix d’exposer le Sphinx au Palais du peuple, siège du Parlement, n’a pas non plus été accepté. Le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku, a, à son tour, présenté des arguments légaux l’obligeant à ne pas répondre favorablement à l’UDPS.
«La sollicitation de l’UDPS sur le choix d’exposition de la dépouille d’Etienne Tshisekedi requiert une autorisation conjointe des speakers des deux chambres législatives», avait-il souligné. Et d’ajouter: «je note que les deux chambres ont un agenda à respecter. Il y a donc lieu de nous faciliter la tâche en communiquant promptement le jour et la date de la levée effective du corps aux fins d’inhumation, dans le respect strict des lois et règlements de la République».
Dans l’entre-temps, certains cadres de l’UDPS annoncent la fermeture du siège du parti. Ils exigent sans délai, la libération de la permanence du parti ainsi que la restitution de tous ses biens. La permanence de l’UDPS aurait été scellée après que le poste de police en face du siège de l’UDPS ait été incendié. L’UDPS dit avoir sollicité auprès de la MONUSCO, la mission onusienne en RD-Congo, une «mesure de sécurisation accrue» autour de son quartier général.
Schilo TSHITENGA & HRM
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