Nation

Loi électorale, Muzito a eu raison

«Gouverner c’est prévoir», dit-on. Après avoir assumé les fonctions de ministre du Budget, puis de Premier ministre de la RD-Congo, une expérience cumulée de 5 ans, Adolphe Muzito, disciple d’Antoine Gizenga, patriarche de Gungu, a su en tirer une vision panoramique de la gestion de la res publica. Depuis son départ du gouvernement pour siéger comme député à l’Assemblée nationale, l’homme s’est livré à produire des tribunes qui appellent une remise en question de la gouvernance politique en RD-Congo en vue d’atteindre le bien-être de la population réclamé à cor et à cri. Il a été l’un des rares sinon le premier à lancer le débat autour de la représentativité au Parlement, à travers sa 8ème tribune. Aujourd’hui, les esprits éclairés s’en servent pour recadrer leur gestion de la cité. «RDC: un royaume des aveugles conduit par des borgnes», ce titre paraissait fort osé mais son contenu était éloquent. Personne ne pouvait s’imaginer que la crème politique en serait bouleversée. Une tribune au départ, bien sûr que c’était une réflexion, une idée de Muzito. Une question qui préoccupait presque tous mais que personne n’a osé dénoncer tout haut avant l’ancien Premier ministre issu du Parti lumumbiste unifié -PALU.  Dans cette cogitation aux allures d’une projection pour l’avenir, ce cadre du PALU a analysé les résultats des élections législatives organisées en RD-Congo en 1960, 1965, 2006 et 2011 avant de proposer des pistes de solution. Aujourd’hui, Muzito peut se sentir heureux, car le projet de loi modifiant la loi électorale adopté au Parlement et transmis au Président de la République pour promulgation est une réponse à sa tribune rendue publique le 21 septembre 2015. Evoquant la représentation de la population à l’issue des législatives de 2011 ayant crédité le parti présidentiel, le PPRD, de 12% suivi de l’UDPS avec 9%, Mfumu Mpa est arrivé à la conclusion selon laquelle tous les grands partis réunis n’ont pu réaliser que 50% des suffrages. Conséquence immédiate: le PPRD a pu négocier avec les autres partis pour obtenir la majorité parlementaire et former le gouvernement dit de coalition mais dont les faiblesses sont connues de tous. En droit constitutionnel, le gouvernement de coalition a toujours été qualifié de fragile à cause des caprices de petits partis qui y prennent part. «Ils peuvent menacer de quitter la coalition à tout moment s’ils n’obtiennent pas les postes qu’ils désirent et priver le grand parti de la majorité pour gouverner. Ce qui conduit souvent à une crise gouvernementale», a expliqué à AfricaNews, un juriste. Aux dires de plusieurs analystes avertis, Adolphe Muzito a eu le mérite de précéder les événements. C’est synonyme de clairvoyance. Rien d’autre.
La loi électorale, révisée et adoptée par les deux chambres du Parlement, fixe le seuil légal de représentativité au niveau national à 1%. A considérer les projections de la CENI d’enrôler 45 millions d’électeurs sur l’ensemble du territoire national, seul un parti qui aura au moins 450.000 voix aux législatives nationales pourra siéger à l’Assemblée nationale. «L’option d’un seuil légal de représentativité conforte la position que notre camarade Muzito a défendue il y a deux ans dans une de ses tribunes», s’est réjoui un cadre du PALU, estimant que son parti a des assises sur l’échiquier national.  A ce stade, l’UDPS, le PPRD ainsi que le PALU émettraient sur la même longueur d’ondes bien que des nuances soient enregistrées, question d’assurer une représentativité significative à l’Assemblée nationale des forces politiques ayant une vision commune. A ce niveau, les émiettements des votes à la base du vagabondage vont disparaître et une ligne claire sera dessinée pour les partis ayant une discipline pour éviter l’instabilité gouvernementale.Même si la pilule est amère à avaler par les hommes politiques, la RD-Congo tend à la bipolarisation de la vie politique.
Dans cette perspective, le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement n’a rien à craindre s’il parvient à mettre d’accord ses sociétaires et coordonner la présentation de ses listes en tenant compte du poids politique de chacun dans son fief politique.
Pour le PPRD, le pouvoir ayant été considéré comme un gâteau à partager avec les alliés durant les deux dernières législatures, l’idée d’un pouvoir totalement contrôlé comme dans un parti-Etat a guidé l’option du seuil légal de représentativité. Au PALU, où l’on donne désormais l’impression de saisir la portée exacte de la tribune de Muzito, on mesure le bénéfice que ce parti historique tirerait de cette clarification des rôles au niveau de différents fiefs.
Quitte aux autres partis qualifiés de mallettes de former des ensembles s’ils ne veulent pas disparaitre.
Les partis représentatifs peuvent se frotter les mains. Cette représentativité ne tient pas à l’ancienne ou à la nouveauté, car Emmanuel Macron a su déjouer tous les pronostics en France et gagner la présidentielle avec un nouveau-né dans le gotha politique français.

Octave MUKENDI

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