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Salomon Kalonda: un règlement de comptes

Deuxième audience, deuxième renvoi dans le procès Salomon Kalonda, poursuivi pour ses prétendus «contacts» avec Kigali qui aurait pour objectif «d’engager des hostilités contre la RD-Congo». Comme pour la première audience, le 18 août, le rendez-vous du 19 septembre a été marqué par une nouvelle demande de remise, sollicitée par l’accusation, encore une fois. De quoi susciter des interrogations autour des intentions du Ministère public qui semble, selon le camp adverse, être «à court d’éléments et des preuves». «Le dossier est vide», affirme-t-on dans l’entourage de la défense.

Pourtant, Salomon Kalonda, terrassé par la maladie, est allé à l’encontre de l’avis de ses médecins et est sorti de son lit d’hôpital pour venir en découdre, une manière pour lui de «résister au régime et cracher sur le procès» qui prend, selon certaines langues, des allures d’un règlement des comptes. C’est un Salomon Kalonda «très affaibli» qui s’est présenté devant la Cour militaire.

«Monsieur le président, je me présente ici devant vous. Je suis malade. Contre l’avis de mes médecins, je ne devais pas me présenter ici parce que mes médecins ont voulu me maintenir. Autant la mort peut m’emporter par la maladie, autant cette situation que je vis aujourd’hui avec ce procès de la honte peut m’emporter. Tout homme a des limites. Je ne saurai pas me mettre debout pendant toute la durée, si vous pouvez me permettre que je puisse m’asseoir», tels ont été les premiers mots du Conseiller spécial de Katumbi, depuis son arrestation le 30 mai sur le tarmac de l’Aéroport de N’Djili, suivie de sa désormais longue période de détention.

«Procès de la honte», c’est aussi l’avis de Me Hervé Diakese, membre du collectif d’avocats de Kalonda, convaincu de la finalité du «complot» orchestré contre son client: «éliminer un adversaire politique et, à travers lui, à inhiber toute initiative d’opposition dans ce pays susceptible d’amener une crédibilité à l’alternance qui, de toutes les façons, viendra». La défense a notamment dénoncé le rôle de Dany Banza, ambassadeur itinérant du Président de la République qui «a instrumentalisé un agent ANR pour clouer Salomon».

Dans son mémoire unique, la défense a ainsi démonté les accusations portées contre Salomon du fait de la «nullité des procès-verbaux dressés au niveau de l’Etat-Major Renseignements Militaires tirée notamment du défaut de qualité d’OPJ et violation des prescrits constitutionnels et légaux relatifs à la détention». De plus, argumentent les avocats de Kalonda, la Cour militaire est réputée «incompétente» pour juger un civil, en l’occurrence leur client.

Pour étayer la thèse du complot, la défense a évoqué le rôle suspect de Patrick Nyundo, cet agent de l’ANR «chargé, depuis 2018, par l’ambassadeur itinérant du Chef de l’Etat, Dany Banza, de filer Salomon Idi Kalonda et de lui tendre des pièges par des messages insidieux» qui «est en liberté». Le camp Kalonda voit également un «raccordement frauduleux» entre Salomon et Moise Katumbi dans le fait que la Demiap ait sollicité en date du 06 juin 2023 «d’imposer une interdiction de sortie à Moïse Katumbi».

«Ce dossier est marqué par des multiples violations des droits», a expliqué la défense dans son mémoire unique, appelant la Cour à se dessaisir du dossier, du reste marqué par plusieurs «violations des droits du prévenu tels que garantis par la Constitution, notamment lors de son enlèvement suivi d’une détention plus qu’irrégulière» et ainsi  «ordonner la libération du prévenu».

Le rendez-vous est pris pour le 25 septembre pour la réplique du Ministère public. Arrêté le 30 mai alors qu’il s’apprêtait à destination de Lubumbashi, Salomon Kalonda, conseiller spécial et bras droit de l’opposant Katumbi, était un premier temps accusé pour détention illégale d’arme à feu, le pistolet «Jericho», plus tard revendiqué par l’ancien Premier ministre Matata Ponyo. A la première audience, cette accusation a mystérieusement disparu de l’acte. Pour ses avocats, Kalonda est victime d’un «montage» et d’une «manipulation». Ils exigent depuis le début du procès la libération de leur client, car poursuivi pour des faits «postérieurs» à l’objet de son arrestation.

Natine K.

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