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Les pro-Kabila et pro-Tshisekedi se font la guerre de positionnement

C’est pour la énième fois que la classe politique RD-congolaise est mise face à ses responsabilités devant le peuple, la nation et l’histoire. Depuis l’élection présidentielle controversée du 28 novembre 2011, la crise a éclaté. Pour la résoudre, toutes les tentatives se sont avérées vaines. Il y a eu d’abord les Concertations nationales à Kinshasa boycottées par l’UDPS, l’UNC et autres mais ayant abouti à la mise en place du gouvernement Matata II avec l’entrée au gouvernement de certains membres de l’Opposition -MLC et Opposition républicaine de Kengo. Puis, le dialogue de la Cité de l’Union africaine, boycotté par le Rassemblement et alliés et appuyé par la MP et l’UNC et leurs alliés ayant abouti à l’Accord sous la facilitation du Togolais Edem Kodjo. Enfin, c’est les pourparlers du Centre interdiocésain. A 11 jours de la date fatidique du 19 décembre, les RD-Congolais ont les yeux rivés vers le centre interdiocésain catholique où se sont réunis depuis hier jeudi 8 décembre, d’un côté, les partis et regroupements politiques de la Majorité et de l’Opposition et la Société civile signataires de l’Accord du 18 octobre de la Cité de l’Union africaine, et de l’autre, les partis membres de l’Opposition radicale, le Rassemblement, et du Front pour le respect de la Constitution dans le but de relever le défi de se mettre d’accord sur une sortie pacifique de la crise politique qui sévit dans le pays et d’éviter un bain de sang, qui sans nul doute ne profitera pas aux RD-Congolais lambdas. Et ça, en trois jours. Ce qui n’est pas impossible si jamais ceux qui y négocient au nom du peuple sont réellement des hommes d’Etat et non des simples opérateurs politiques. Mais en attendant des travaux proprement dits, les premières réactions des participants à ces discussions menées sous l’égide de la Conférence épiscopale nationale du Congo -CENCO-, le jour de validation de leurs mandats sont loin de rassurer. Preuve: Alors que les signataires de l’Accord issu du dialogue de la Cité de l’Union africaine s’attendent à ce que les autres y adhèrent, les délégués du Rassemblement parlent des pourparlers francs dont le leitmotiv ne sera pas le partage du gâteau mais plutôt le respect strict de la Constitution. Réactions chaudes.
 
 
 
Le Camp Kabila
 
Lambert Mende, ministre de la Communication et médias tient coûte que coûte à l’accord scellé à la Cité de l’Union africaine. «Le consensus du 18 octobre continue de demeurer la seule feuille de route pour nous. Nous espérons pouvoir élargir ce consensus à la faveur de ces contacts», a-t-il confié à la presse le jeudi 8 décembre au centre interdiocésain. Et de poursuivre: «nous sommes autour d’une table pour résoudre un problème technique mais que personne ne se croit plus propriétaire du pays par rapport à d’autres, autrement c’est le désordre». Mende est optimiste au déroulement des travaux. «Ce n’est que par le consensus que nous allons trouver des solutions, sinon c’est le désordre, c’est la confusion, c’est la violence. Et dans cette violence n’est pas forcément gagnant celui qui le croit», a-t-il dit en puisant dans le discours du président de la CENCO. «L’appel à l’apaisement lancé par les évêques, est un appel de bon sens», a-t-il interprété, estimant qu’«il va toujours falloir parler entre RD-Congolais, au-delà même du 19 décembre».
 
Vital Kamerhe, co-modérateur de l’Opposition au dialogue sous l’égide d’Edem Kodjo, rejoint Mende dans ses propos. «Si ce énième débat a lieu aujourd’hui, c’est parce qu’il y a eu l’Accord du 18 octobre», a-t-il déclaré en signifiant que «le mérite en revient aux hommes et femmes courageux qui ont accepté de mettre en danger leur crédibilité et leur popularité». Le président de l’Union pour la nation congolaise -UNC- a noté qu’«aujourd’hui, l’histoire nous a tous rattrapé» précisant que «quand il s’agit de la paix, quand il s’agit de sauver des vies humaines, il n’y a point de calculs».
 
José Makila Sumanda, président national de l’ATD, a abondé dans le même sens: «Ce dialogue est une rencontre entre les RD-Congolais pour pouvoir harmoniser les points de vue». Et de renchérir: «nous n’avons qu’un seul document qui s’appelle l’Accord politique que nous avons signé à la Cité de l’UA. Aujourd’hui, il faut définir les divergences -entre les différents acteurs- pour le bien du RD-Congolais». Une question talonne son esprit «la seule interrogation qui prévaut, est de savoir ce qui nous divise réellement, on ne vient pas pour se partager le gâteau mais pour qu’enfin la Constitution soit respectée et que la démocratie marche», s’est-il demandé
 
 
 
Les Tshisekedistes s’annoncent
 
Jean-Pierre Lisanga Bonganga, coordonnateur du Front populaire, une structure de soutien à Etienne Tshisekedi, jubile parce que, selon lui, la CENCO a eu la bénédiction de toutes les couches. «La médiation des évêques est acceptée par le Président Kabila et son camp ainsi que par le président Tshisekedi et les siens. Tout cela avec l’appui de la Communauté internationale aussi. Edem Kodjo n’a pas bénéficié de ce soutien. Nous l’avions récusé», a-t-il dit en émettant le vœu de voir tout le monde s’accorder pour sauver le pays après le 19 décembre prochain.
 
Pour Delly Sessanga de l’ENVOL, le choix est clair. «Nous n’avons qu’une seule attente face à la crise créée artificiellement et entretenue pendant longtemps par la MP, nous voulons que dans le cadre d’un dialogue ouvert sur les vraies questions qui se posent dans ce pays on puisse trouver une solution définitive», a-t-il souhaité. Et de préciser: «dans une négociation il y a une nécessité de compromis mais j’ai aussi entendu les évêques appeler à la consolidation de l’Etat de droit, à la consolidation de la démocratie, valeurs essentielles qui font que nous nous battons pour la tenue des élections». Pour ce juriste, «face à cet échec de la Majorité -absence d’élection à l’issue du deuxième et dernier mandat du Président Kabila-, nous sommes obligés comme classe politique de trouver une solution sans sacrifier ni notre engagement pour l’Etat de droit ni notre engagement pour les libertés et la démocratie». Sessanga reste prudent: «Un appel à l’apaisement ne pourrait être que la conséquence des discussions, mais il est prématuré de prévoir ce type d’appels aujourd’hui».
 
Olivier Kamitatu Etsu, membre du G7, n’est pas du reste. Pour lui, le Rassemblement n’est pas allé au Centre interdiocésain pour le partage du gâteau mais plutôt pour négocier le respect de la Constitution.
 
Une démarche que Valentin Mubake, secrétaire général adjoint de l’UDPS, défend de toute sa force: «Une Constitution d’un pays, on ne la négocie pas, on l’applique. Il n’y a pas en cette matière, à faire mal ou plaisir à qui que ce soit». Il est clair dans ses propos: «Quand vous avez épuisé deux mandats successifs comme Chef de l’Etat, vous n’avez plus le droit à rester un jour de plus. Cela s’appelle article verrouillé par la Constitution. Si vous voulez rester une République bananière, tripotez la Constitution mais ne comptez pas sur le Rassemblement». Selon Mubake, «faire des concessions ne signifie pas tuer la RD-Congo, ne signifie pas violer sa propre Constitution. Nous sommes venus parce que nous ne devons pas nous décourager mais pour faire appliquer la Constitution». Et de préciser: «le Rassemblement n’a pas de ligne rouge, car le 19 décembre, le Président Kabila va déposer son mandat et la population est prête pour ça».
 
Pour sa part, Martin Fayulu complète ses compères. «Nos attentes sont que la Constitution soit respectée et que le Congo se retrouve respecté dans le concert des nations. Le 19 décembre, faute d’élections, à cause de certains RD-Congolais, notamment la CENI qui a violé l’article 73. Ce qu’il nous faut savoir maintenant est comment gérer le pays à partir du 20 décembre», a-t-il dit estimant que «le seul objectif est de satisfaire le peuple».
 
 
 
Propos recueillis par
 
Octave MUKENDI
 
Hugo Robert MABIALA

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