Le TP Mazembe a validé, samedi 24 février, son ticket pour les quarts de finale de la Champions league africaine, après une victoire sans appel, 3-0, face aux Égyptiens de Pyramids FC, dans son antre de Kamalondo. Unique représentant RD-congolais à cette étape de la compétition, le club de Lubumbashi a vu son succès sportif être occulté par des restrictions extra-sportives. Au pays, le public a été privé de suivre le spectacle. La RTNC, chaine nationale, a étrangement imposé un blackout à ce match de haute facture, privant, par ricochet, au pays une fenêtre pour dénoncer, une nouvelle fois, le silence de la communauté internationale face au génocide vécu dans l’Est alors que les trois buteurs ont esquissé, à la manière des Léopards, le «geste de la tempe».
Avant la rencontre, le club de Lubumbashi dénonçait, dans une lettre adressée au Premier ministre, «l’élan d’injustice» dont il est victime depuis maintenant trois ans, espérant être «rétabli» dans ses droits. Parmi les «injustices» décriées par le staff dirigeant des Corbeaux, figure notamment le manque d’assistance financière et administrative. «Voici bientôt trois ans qu’aucune prise en charge n’est allouée à notre équipe malgré notre permanente présence sur l’échiquier africain. Nous ne figurons nulle part dans la chaîne des dépenses publiques du pays», lit-on dans la correspondance. Si Mazembe est blacklisté, d’autres clubs du pays «bénéficient de subsides de l’État». Une «indifférence» que le staff de Mazembe n’arrive à comprendre et qui persiste, malgré plusieurs rappels.
Le dernier point noir dans le dur traitement imposé à Mazembe est le refus d’autorisation de survol pour son avion en partance vers l’Afrique du Sud. Derrière cette mesure administrative, le club pointe du doigt le patron des Renseignements RD-congolais. «Le cas le plus récent est cette interdiction imposée pour embarquer une partie de notre délégation dans l’aéronef du président du club pour notre prochain match du 2 mars 2024 en Afrique du Sud. Plus de quatre demandes nous sont refusées», déplore le club, désormais confus sur son appartenance ou pas à la RD-Congo. «Ce sont des moments très difficiles, l’équipe est abandonnée par le gouvernement. Je crois que Mazembe n’est plus une équipe RD-congolaise», a commenté, pour sa part, Moïse Katumbi, le président de cette formation, également le chef de file de l’Opposition parlementaire en RD-Congo, au terme du match de samedi.
Gare à la politisation du sport
Mazembe n’est nullement à son premier calvaire. L’année passée, en pleine période de turbulences politiques au pays, le club a dû essuyer plusieurs revers de l’administration. En février, son avion a été empêché puis autorisé tardivement d’atterrir alors que la direction avait déjà «trouvé une solution de rechange», émettant dans la foulée le vœu de ne plus vivre le même «calvaire dans l’avenir». «L’époque ‘pasi na yo, pasi na nga -traduisez: ton malheur est le mien’ n’est désormais qu’un lointain et vilain souvenir. Katumbi qui s’est montré récemment très critique envers le régime Tshisekedi, est désormais muselé dans ses faits et gestes», commentait à l’époque un chroniqueur sportif sur Twitter.
Dix jours plus tard, Mazembe a été de nouveau victime de «la politisation du sport» suite à des «obstacles montés par des services étatiques». Son président Moïse Katumbi a dû parcourir le chemin de la croix pour se voir renouveler son passeport. En ces temps-là déjà, le club dénonçait le non-paiement de ses «quotes-parts» par le gouvernement. Une année plus tard, la situation n’a guère et évolué. De quoi faire parler le président du club qui a appelé, en ce temps de martyre, à «faire la part des choses» et ne pas «mélanger la politique au sport».
Le péché de Mazembe serait, selon des indiscrétions, son appartenance au clan Katumbi. Certains soutiens du pouvoir ne digèrent pas de voir le club le plus en vue du pays échapper au contrôle du pouvoir alors que le football est devenu un véritable instrument de propagande politique dans le monde.