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Lokondo: sa formule a qui a sauvé Kitebi…

Henri Thomas
Quand on dit qu’il a sauvé Kitebi des griffes de l’Opposition, l’élu MP de Mbandaka répond humblement: «c’est la procédure»
Le 10 novembre au Palais du Peuple. Charles Mwando, le 1er vice-président de l’Assemblée nationale, annonce les résultats du vote. Patrice Kitebi Kibol Mvul est soulagé. Un homme, un député de la Majorité, Henry Thomas Lokondo vient d’inverser la tendance. De par sa brillante et pertinente intervention devant le pupitre, l’élu de Mbandaka permet d’anéantir la motion de défiance levée contre le ministre délégué aux Finances par l’UDPS/Opposition Samy Badibanga.
Moins de 25 minutes ont suffi et Henry Thomas Lokondo est devenu la terreur de l’Opposition. L’ancien conseiller de Kabila a acquis la maturité que seul autorise un parcours inhabituel. Il a beaucoup appris à la chambre haute du Parlement, où il a siégé de 2007 à 2011. A la chambre basse, il crève l’écran: trop fréquent devant le pupitre, inspiré, raisonnable, juste, franc, courageux, il a une abondante production législative à son actif.
Indépendant d’esprit, parfois traité d’opposant par ses amis de la Majorité présidentielle pour ses interventions embarrassantes, il évoque le lien fort qui l’unit à son camp politique mais dit s’en tenir à la procédure et à l’objectivité. Les sceptiques en ont eu la preuve quand il a sorti sa motion incidentielle dont il a, du reste, prévenu l’Opposition lors du dernier huis clos présidé par Aubin Minaku.
Approché mardi par AfricaNews, Lokondo a dévoilé sa recette: sur le fond de la motion Badibanga, il n’a presque rien dit. Il s’est surtout basé sur la procédure pour tout détruire. Si l’on dit qu’il a sauvé Kitebi, il a cette réponse humble: «c’est la procédure». L’élu de Mbandaka a fait son travail de parlementaire. En notant que la motion décriée ne portait pas seulement sur le compte de l’Opposition mouvementé mais posait la question de l’exécution générale de la partie «Dépenses» du budget 2013 -des paiements sans crédits et des dépenses non exécutées…
En faisant aussi remarquer que les articles 138 et suivants du Règlement intérieur de la chambre basse évoqués au premier paragraphe de la motion de Badibanga n’ont rien à avoir avec la motion de défiance, consacrée, elle, par les articles 209 et suivants. Voici que Lokondo a fait l’essentiel de son travail d’anéantissement de l’initiative de l’Opposition. Voici que sur la forme, Badibanga avait tout faux. Voici qu’en droit le principe est sacré: «la forme lie le fond».
Il est évident que même côté fond, Lokondo a jugé la motion précoce, mal dirigée et immorale. Précoce parce qu’en demandant des justifications au ministre délégué auprès du Premier ministre chargé des Finances, «les signataires de la motion se sont basés fondamentalement sur deux textes: le projet de loi portant reddition des comptes de la Loi de finances 2013 et le rapport de la Cour des comptes», a-t-il asséné, non sans rappeler sa motion exigeant l’examen préalable du rapport de la Cour des comptes avant l’examen du projet de loi portant reddition des comptes, conformément au Règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
Notamment l’article 142 portant sur les projets et propositions de loi, où il est stipulé: «Lorsqu’une Commission saisie d’un projet ou d’une proposition de loi conclut à la non adoption de celui-ci, le président invite l’Assemblée plénière, aussitôt après la clôture du débat général, à se prononcer par vote. En cas de renvoi à la Commission, il appartient au président de séance de fixer la date à laquelle la Commission présente son nouveau rapport».
 
Précieux ralliement du MLC Nzangi
Mais qui a donc inspiré une motion de défiance sur une matière -le projet de loi portant reddition des comptes de l’exercice 2013- encore en examen à la Commission Ecofin et sur laquelle la plénière ne s’est pas encore définitivement prononcée. Lokondo en a déduit que la démarche de Badibanga est biaisée, estimant que le président du groupe parlementaire UDPS et Alliés devait attendre l’adoption du rapport de la Commission Ecofin, du reste déjà transmis aux députés.
Lokondo a également indiqué que la motion était mal dirigée dès lors que son auteur a ciblé le ministre des Finances alors qu’il devait viser le Premier ministre, seul habilité à affronter l’Assemblée pour les matières concernant les 4 lois de finances, à savoir la loi de finances de l’année -budget-, les lois des finances rectificatives, la loi portant reddition des comptes et la loi portant ouverture des crédits provisoires, toutes placées sur un même pied d’égalité, préparées par le gouvernement, présentées et défendues par le chef du gouvernement.
De l’avis de Monsieur Procédure, la motion aurait dû, à la limite, être dirigée à l’endroit du ministre du Budget, seul compétent en la matière et ordonnateur des dépenses.
Selon Lokondo, le caractère immoral de la motion se justifie par «la saga de retraits et de réintroduction des signatures, de surséance et ensuite de ré-réintroduction des signatures qui a fait perdre à ce contrôle parlementaire sa valeur éthique». Pour l’honneur et la dignité de la chambre, le casseur de la motion s’est gardé d’évoquer le scandale de corruption qui a suivi.
Un élu de l’Opposition resté dans la salle, le député MLC Nzangi a donné davantage de relief à la motion incidentielle quand il a fait savoir qu’il avait dénoncé les malformations congénitales de la motion de défiance initiée par l’UDPS Samy Badibanga. Un précieux ralliement. Sans nul doute, si Nzangi a brisé un tabou, provoquant la colère de la hiérarchie de son parti, Lokondo a fait mouche. Et la Majorité, fière de compter un député de cette trempe dans ses rangs, a eu beau jeu de faire le reste, même si les opposants avaient déjà quitté l’hémicycle.
Tino MABADA  

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