C’est sur le coup de 15h00’, heure de Kinshasa, que l’avion transportant le Roi Philippe Léopold Louis-Marie de Belgique et son épouse, la Reine Mathilde d’Udekem d’Acoz, s’est posé sur le tarmac de l’Aéroport international de N’Djili à Kinshasa, capitale de la RD-Congo, mardi 6 juin, où les têtes couronnées belges sont venues pour une visite officielle de six jours. C’est une première historique.
Le président de la République Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo et la première Dame Denise Nyakeru Tshisekedi ont effectué le déplacement pour accueillir leurs hôtes de marque au pied de l’aéronef, avant de les recevoir pour un bref entretien au salon présidentiel et ce, après la gerbe de fleurs leur offerte en guise de bienvenue, l’exécution des deux hymnes nationaux, le passage des troupes en revue par sa majesté le Roi et les honneurs leur rendus par le gratin politique national présent. Il y a lieu de relever la présence remarquée de danseurs traditionnels ayant brièvement agrémenté l’arrivée du couple régnant à Kinshasa.
Durant leur séjour de six jours, le Roi et la Reine de Belgique ont prévu, en plus de Kinshasa, de visiter Lubumbashi, dans la province du Haut-Katanga, et Bukavu, au Sud-Kivu. A Kinshasa, d’abord, ils visitent, ce mercredi 7 juin, le Musée national. Le même jour, le Roi prononcera un discours sur l’esplanade de l’Assemblée nationale. A Lubumbashi, le Roi Philippe prévoit une intervention, vendredi 10 juin, devant les étudiants de l’université et, enfin, à Bukavu, il visitera, avec sa délégation, dimanche 12 juin dans un quartier périphérique, la clinique du gynécologue Denis Mukwege, colauréat du prix Nobel de la paix en 2018 pour son action en faveur des femmes victimes de viols.
Une visite sur fond de travail de mémoire et de réconciliation
Septième souverain belge depuis le 21 juillet 2013 après l’abdication de son père, le Roi Albert II, le Roi Philippe II répond ainsi à l’invitation que le Chef d’État RD-congolais lui avait adressée lors de son voyage de 2019 en Belgique, au lendemain de son accession à la magistrature suprême. Ce déplacement historique et symbolique du Roi Philippe a été reporté à plusieurs reprises, notamment en raison de la pandémie de Covid-19, en 2020, puis à cause de la guerre déclenchée par la Russie en Ukraine au début de cette année.
Mais cette fois, la visite du Roi belge, accompagné de la Reine Mathilde et du premier ministre, Alexander De Croo, s’est concrétisée et marque un tournant décisif dans les relations entre de deux pays, à savoir: la RD-Congo et la Belgique. Car, il revêt un caractère hautement symbolique de par les activités multiples et variées qui jalonneront son périple. Cette visite officielle à la mémoire apaisée est également l’occasion de renforcer les liens économiques et commerciaux entre les deux pays. Le Roi Philippe est accompagné d’une délégation d’entrepreneurs belges, prêts à faire de la RD-Congo un partenaire privilégié de la Belgique. Il veut donner un «nouveau souffle» au partenariat avec Kinshasa sur la santé, l’éducation, la formation, la protection des forêts… Philippe et son épouse devraient avoir un aperçu des secteurs où s’exerce l’aide au développement. La Belgique est le quatrième bailleur de fonds de la RD-Congo après les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne.
Un discours très attendu au Parlement
Selon «RFI», couronné en 2013, le monarque ne s’était encore jamais rendu dans l’ancienne colonie belge, devenue indépendante l’année de sa naissance, une indépendance prononcée par son oncle. «Le Congo accède, ce 30 juin 1960, à l’indépendance et à la souveraineté internationale», avait alors déclaré le Roi Baudoin. 62 ans plus tard, lors de son voyage, le Roi Philippe s’adressera, ce mercredi 7 mai 2022, au Parlement RD-congolais. Un discours très attendu: RD-Congolais et Belges veulent savoir si le roi belge gardera la ligne qu’il avait adoptée à l’occasion des 60 ans de l’indépendance du Congo en juin 2020. «Fait inédit, il avait présenté pour la première fois ‘’ses plus profonds regrets pour les blessures’’ infligées lors de la période coloniale, dans une lettre adressée au président Félix Tshisekedi», a rappelé la radio française.
Le souverain, qui règne depuis 2013, a fait savoir «AFP», avait regretté les «actes de violence et de cruauté» commis à l’époque où son ancêtre Léopold II avait fait du Congo sa propriété personnelle entre 1885-1908, avant le demi-siècle de présence de l’État belge dans l’immense pays d’Afrique centrale. «Je pense que parfois, pour pouvoir construire un bon futur, il faut affronter le passé», a déclaré à la «RTBF» le premier ministre belge, Alexander De Croo, mardi matin avant son départ de Bruxelles pour Kinshasa, évoquant lui aussi la lettre tout à fait historique du Roi Philippe en ces termes: «Aller en RD-Congo et porter un message en prolongement de cette lettre est un moment très, très important… un moment historique». «Il y a eu des regrets, c’est le début d’un nouveau partenariat qui va aller en se consolidant», a estimé le porte-parole du gouvernement RD-congolais, Patrick Muyaya, lors d’un point de presse consacré à cette visite, lundi 5 juin soir à Kinshasa. «Nous n’oublions pas le passé, nous regardons l’avenir», a-t-il poursuivi, se félicitant des «relations raffermies avec la Belgique, alors qu’elle étaient par le passé au bord de la rupture».
Selon le Palais royal belge, le passé colonial, avec entre autres la question de la restitution des œuvres d’art à l’ancienne colonie, devrait de nouveau être évoqué durant ce voyage du roi belge.
Christian BUTSILA