La Fecofagate connait plusieurs rebondissements. Contrairement aux contrevérités répandues en grande pompe sur les réseaux sociaux, Constant Omari Selemani, président de la FECOFA, remis en liberté pour des raisons humanitaires liées aux soins de santé sur présentation d’un tableau médical que l’on ne saurait publier par contrainte éthique, pourrait voir son dossier atterrir sur la table du juge unique de la FIFA. A Kinshasa, les autorités compétentes envisagent sérieusement cette option, selon plusieurs sources concordantes. En vertu des pouvoirs lui confiés par l’ordonnance présidentielle n°16/065 du 14 juillet 2016, le conseiller spécial du chef de l’Etat en matière de bonne gouvernance et lutte contre la corruption a entre autres la latitude d’entrer en contact avec des structures de contrôle pour ouvrir des investigations. Une probabilité renforcée par l’évolution de la situation au ministère des Sports où le comptable public y affecté a été sanctionné par sa hiérarchie pour n’avoir pas été en mesure de produire des rapports mensuels à l’absence des justifications régulières des fonds publics alloués aux fédérations sportives dont la FECOFA.
AfricaNews a eu accès à une copie du document officiel de transfèrement, au Parquet de Matete le 17 avril 2018, du président de la FECOFA Constant Omari, ses deux vice-présidents Roger Bondembe et Théobald Binamungu ainsi que du secrétaire général aux Sports Barthélemy Okito. Une copie fuitée au moment où l’on a appris les informations selon lesquelles des autorités envisageraient de saisir le juge unique de la FIFA dans le cadre de la Fecofagate. Ces informations circulent en même temps que celles des sanctions récemment infligées au comptable public affecté au ministère des Sports par sa hiérarchie. Sa faute: n’avoir pas transmis au Secrétaire général aux Finances les rapports mensuels sur les justifications des fonds publics mis à la disposition des fédérations sportives. Selon une source proche du dossier, le comptable puni a justifié cette situation par l’absence des pièces justificatives des fédérations. Le ministère des Sports cumule des mois de retard des frais de fonctionnement du fait de cette situation.
Il se raconte également la découverte des dossiers liés au double décaissement des fonds pour certaines manifestations sportives internationales. Ici, des questions directes sont posées à Constant Omari, en sa qualité de président de la FECOFA. Comment Omari peut-il expliquer les décaissements de l’argent public pour certaines compétitions prises en charge par la CAF, cas des fonds reçus pour la participation de TP Mazembe à deux éditions de la Super Coupe d’Afrique pendant que la CAF a supporté 25 membres de la délégation du club lushois? La même interrogation vaut pour le CHAN Rwanda 2016 remporté par les Léopards de la RD-Congo.
Début avril, Luzolo Bambi a ouvert une enquête sur les fonds publics alloués aux Léopards foot. Il a lancé des invitations à 4 personnalités dans le cadre de ces investigations: le secrétaire général aux Sports, Barthélémy Okito, le président de la Fédération congolaise du football -FECOFA-, Constant Omari, ainsi que ses deux vice-présidents Roger Bondembe et Théobald Binamungu.
Les inspecteurs judiciaires rattachés aux services du spécial, menés par l’inspecteur judiciaire en chef, Denis Konde dit Colombo, ont plusieurs fois entendu ces personnalités sur procès-verbal.
A l’issue de ces auditions, le spécial Luzolo a déféré, mardi 17 avril 2018, le dossier accompagné des auteurs présumés d’infractions à l’office du Procureur général près la cour d’appel de Matete, sis 4ème rue Limete, où ces quatre personnalités ont été placées en garde à vue.
Le Procureur général près la cour d’appel de Matete a ouvert un dossier RMP, confié à un magistrat instructeur qui a entendu les prévenus toute la journée du 18 avril. Au terme de cette première journée audition, compte tenu de la gravité des faits leur reprochés, le Procureur a levé l’option de placer ces personnes sous mandat d’arrêt provisoire -une mise en arrestation.
Les avocats des prévenus ont alors adressé une demande de remise en liberté provisoire au Procureur. Il sied de noter qu’en droit judiciaire RD-congolais, le principe c’est la liberté et la détention, une mesure d’exception. On accorde une liberté provisoire à toute personne en mesure de verser une caution, qui a une adresse connue, une identité fiable et dont la fuite n’est pas à craindre.
Ces conditions remplies et au regard de son état de santé, le Procureur a accordé une liberté provisoire à Omari le 18 avril vers 18h -de Kinshasa- et le 19 avril à ses codétenus. Chacun a versé au Parquet général de Matete une caution de CDF 1.600.000, équivalent à USD 1.000. Omari a été libéré pour des raisons humanitaires liées aux soins médicaux sur présentation d’un tableau médical qu’on ne saurait publier par contrainte éthique.
Dans l’entre-temps, l’instruction au Parquet suit son chemin. Contrairement aux fausses déclarations sur la toile, l’affaire est loin de se terminer.
Laurent OMBA