
«Nous sommes parfois obligés de tolérer certaines choses qui nous font mal pour ne pas être transférés à la Cour pénale internationale, pour ne pas être sanctionnés…», a lâché mardi en conférence de presse le VPM UDPS en charge de l’Intérieur
Il a fallu 4 jours pour que le vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur et Sécurité, Peter Kazadi, puisse se prononcer sur la marche de l’Opposition réprimée à Kinshasa le samedi 20 mai dernier. Les témoins ainsi que les observateurs ont parlé d’un samedi sanglant pour les opposants et leurs partisans.
Alors que le monde entier a fustigé «l’usage disproportionné de la force face à ces manifestants», voilà que le patron de l’Intérieur les sert sur un plateau d’or, leur ouvrant la brèche. En tout cas, le point de presse de mardi 24 mai à l’Immeuble de la Territoriale, du député provincial de l’UDPS/ Tshisekedi, promu à la commande du méga ministère de l’Intérieur et Sécurité, est un aveu de la peur ou l’embarras du Régime face à l’offensive des opposants. Et l’Opposition y a décelé une faille à exploiter notamment organiser encore des marches et des sit-in, quitte à subir la répression et en tirer profit.
Et pour cause, cette déclaration tonitruante du chef de la territoriale: «Nous sommes parfois obligés d’accepter certaines choses qui nous font mal pour ne pas être transférés à la Cour pénale internationale, pour ne pas être sanctionnés». Le vent en poupe, l’Opposition pense encore acculer le Pouvoir. Après près de trois heures d’une nouvelle explication avec la Police sur le Boulevard du 30 juin, paralysé et barricadé dans son tronçon situé entre l’immeuble Equity-BCDC et la Gare centrale, l’Opposition a dû jubiler, annonçant un nouveau sit-in jeudi prochain et une nouvelle série d’actions de rue, jusqu’à obtenir gain de cause.
Les critiques sévères et les accusations portées contre le régime Tshisekedi par les uns et les autres, selon leur catégorie, pour avoir réprimé brutalement la marche pacifique de l’Opposition le samedi 20 mai dernier, ont poussé le VPM Kazadi à la faute! Pardon à réagir! A la faveur d’un point de presse, donné le mardi 24 mai, Peter Kazadi a dû avouer le point faible du système: la peur des sanctions des partenaires et de la justice internationale vers lesquelles l’Opposition attend l’entraîner. «Les faits et gestes mieux les propos du n°1 de la Territoriale traduisent visiblement vraisemblablement cette peur qui s’empare du régime de Kinshasa», se félicite un bonze du CLC, allié des opposants dans cette bataille contre le Pouvoir.
En disant «nous sommes parfois obligés d’accepter certaines choses qui nous font mal pour ne pas être transférés à la CPI», devant les caméras du monde, le nouveau warrior a-t-il tourné sa langue sept fois avant de prononcer cette phrase? Peter Kazadi, réagissant en combattant de l’UDPS de l’avis d’un bon nombre d’analystes, a craché tout ce qui lui est passé par la tête. Pour lui, la peur d’être déféré à la Haye prime sur la sécurisation et la protection des RD-Congolais, peu importe leurs tendances. Surtout qu’une délégation de la CPI est attendue en RD-Congo dans les prochains jours.
Malgré cette crainte de la CPI, face aux accusations d’usage disproportionné de la force contre les manifestants pacifiques, le gouvernement, par l’entremise de Kazadi, est passé à l’offensive, pointant d’un doigt accusateur les opposants, les donnant pour les premiers responsables de la situation désastreuse et déplorable d’une journée ensanglantée. «Le gouvernement n’entend pas se laisser faire», a prévenu le VPM Kazadi au cours de son point presse. Puis: «Il n’entend ni se laisser intimider, ni se laisser faire du chantage».
Selon lui, ce chantage consiste à dire que le pouvoir de Tshisekedi est un pouvoir dictateur, qui opprime sa population, qui étouffe les libertés, qui envoie sa police commettre des bévues.
Outre les opposants, Kazadi s’en est pris à certains médias qualifiés par lui de «tendancieux», à savoir acquis à la cause de l’Opposition désemparée. «Ce qui est à déplorer dans cette campagne médiatique, c’est que certains professionnels des médias ont perdu le sens de l’équilibre dans la diffusion de ces informations. Ils sont devenus tendancieux. Ils n’ont montré que les bévues, du reste condamnables… mais jamais ils n’ont diffusé les images où les manifestants se sont attaqués aux policiers». Les contradicteurs du VPM n’ont pas manqué de rappeler les années Presse rouge, celle jadis alignée exclusivement derrière les thèses de l’UDPS, alors dans la lutte contre les régimes Mobutu puis Kabila père et fils. En ce temps-là, chaque publication des médias internationaux favorable aux opinions défendues par l’UDPS, était abondamment relayé à la 10ème rue.
Aux propos de l’Opposition selon lesquels la répression de samedi a fait de nombreux blessés, et plusieurs de ses membres ont été arrêtés, Peter Kazadi n’a pas manqué de se défendre. «La RDC n’est pas le seul pays au monde où les forces de sécurité ne se sont pas bien comportées lors des manifestations. On a vu ça aussi en France. Aux États-Unis, on tue des citoyens américains par des policiers, mais jamais on a cherché à mettre ça sur le dos des autorités. Mais en RDC, lorsque quelques éléments de la police se méconduisent, on accuse l’État congolais. On accable le Chef de l’État et ses ministres, comme si c’était eux qui étaient descendus sur le terrain», a fustigé le VPM de l’Intérieur.
Il est revenu sur le refus opposé à Moïse Katumbi pour se rendre au Kongo Central. «Je viens d’écouter le gouverneur du Kongo-Central avec tous les services de sécurité. Il m’a laissé entendre qu’il n’a jamais refusé l’organisation des manifestations dans sa province, mais qu’il avait posé quelques préalables, notamment ajourner la tenue des manifestations de deux jours et indiquer le lieu -à cause de l’insécurité», a-t-il dit pour prendre la défense du gouverneur Guy Bandu, auteur de la décision refusant à Katumbi de fouler le sol du Kongo Central.
Concernant la situation sécuritaire dans l’est de la RD-Congo, le patron de l’Intérieur a une fois de plus pointé du doigt les Rwanda, qui occupe selon lui des pans du territoire congolais «sous couvert du mouvement terroriste M23».
«L’insécurité de l’Est s’étend vers l’Ouest avec l’accompagnement de certains acteurs politiques qui sont même au Parlement», a-t-il dénoncé.
Kazadi a aussi évoqué les violences dans le territoire de Kwamouth, dans la province du Maï-Ndombe, où une milice fétichiste dénommée «Mobondo», sème la terreur et a étendu son rayon d’action au Kwango et au Kwilu, et même à une partie de la ville de Kinshasa, à Maluku.
«Les renseignements à notre disposition indiquent l’implication de certaines personnalités politiques et notabilités, qui entretiennent ce conflit, intoxiquent des populations, les incitent à massacrer les autres, croyant ainsi fragiliser les institutions de l’État et saboter l’autorité de l’État», a révélé Peter Kazadi.