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Kasaï Oriental: les grands défis de Ngoyi Kasanji

Le gouverneur de la province du Kasaï Oriental, Alphonse Ngoy Kasanji
 Alphonse Ngoy Kasanji
Le démembrement est effectif depuis quelques mois. Il aura apporté des changements notables: la reconfiguration de la carte administrative du pays et l’irruption des commissaires spéciaux du gouvernement, ces «gouverneurs» nommés par ordonnance présidentielle en exécution de l’arrêt de la Cour constitutionnelle,  faute, pour la CENI de pouvoir organiser les élections des gouverneurs, conformément à la loi de programmation d’installation de nouvelles provinces. Du coup, le Kasaï-Oriental, comme toutes les autres provinces issues de ce redimensionnement, est entré dans une nouvelle ère.
Un détail précieux: la terre luba est devenue l’espace le plus enclavé du pays, le centre du centre, sans routes, sinon celles défoncées, notamment la RN1 qui la relie au Kasaï-Central et à l’Ouest de la RD-Congo et la RN2,  sensée la maintenir au contact du Maniema et des provinces de l’Est. Le chemin de fer, palliatif idéal, n’est pas non plus en parfait état alors que la SNCC,  relancée avec l’acquisition d’une vingtaine de locomotives neuves, est confrontée aux problèmes de carburant et wagons, tant au départ de Lubumbashi, dans le Haut-Katanga, qu’à celui du port d’Ilebo, dans la province du Kasaï. Sans attendre, le nouveau Commissaire spécial,  Alphonse Ngoyi Kasanji doit se mettre au travail afin de relever le défi du désenclavement.
 
Un challenge tant tout parait prioritaire. Mais Ngokas et ses deux adjoints, Jean-Pierre Mutanda, ancien parsec du ministre des Affaires étrangères, Raymond Tshibanda, et cadre de son parti ULDC, ainsi que Mme Antoinette Kapinga, membre du PANU de feu André Philippe Futa, ont déjà un canevas de travail bien ficelé. «Nous comptons sur la poursuite des travaux de réhabilitation de la RN1 déjà arrivés à l’étape de Tshikapa pour nous ouvrir vers le port de Matadi. Nous fondons également nos espoirs sur la réhabilitation de la RN7 pour être en contact avec le port de Mombasa via le grand Kivu. Nous saluons les travaux exécutés par une ONG sur financement du gouvernement central sur la RN2 pour nous relier avec le Maniema et les Kivu», fait savoir Ngoy Kasanji à la faveur d’un entretien exclusif accordé à «AfricaNews».
Si l’industrie minière se meurt alors que la province regorge d’importants gisements de cuivre, de calcaire, de nickel… outre le diamant, le commissaire spécial prend le pari de batailler pour lui redonner des forces. Passage obligé: le défi énergétique. «L’électricité favoriserait l’investissement et occasionnerait l’éclosion de l’industrie et la création de plusieurs emplois», se convainc Kasanji, diamantaire de carrière. Conscient que le déficit en électricité décourage les investisseurs disposés à mettre de l’argent,  notamment dans la production minière et de ciment gris, le numéro 1 de la province exhorte le gouvernement central à  reprendre et accélérer les travaux de construction du barrage de Katende. Il annonce qu’avec l’aide de la Coopération technique allemande -GTZ-, la province est très avancée dans le projet de construction du barrage de Tshala, 12 MW. «Ces équipements,  ajoutés à la centrale de Tshala 1 et le projet de Tshipasa, vont, à coup sûr, aider le Kasaï-Oriental à avoir un courant électrique favorable à l’investissement.
Côté eau, les travaux d’agrandissement de la station de captage et de distribution locale avancent grâce à un financement de la Banque arabe pour le développement. Les équipes, à pied d’œuvre, posent progressivement la tuyauterie pour adapter la production au nombre d’habitants de la ville de Mbuji-Mayi, passés à 3 millions. Une attention particulière est accordée à la desserte des quartiers non branchés au réseau. Avec l’appui de la Coopération technique belge, il est prévu de forer des puits pour fournir l’eau potable à tous les 5 territoires dans le souci, entre autres, d’épargner la population des maladies d’origine hydrique.
Le quatrième défi est l’agriculture, appelée à être mécanisée. Si quelques tracteurs disponibilisés par le gouvernement central peuvent contribuer à la matérialisation de ce vœu, les finances font défaut pour l’acquisition des engrais et des intrants, le renforcement des capacités des paysans.
Alors qu’il a tous les atouts pour produire et vendre le maïs,  le manioc, l’huile de palme et l’ananas en grande quantité, le Kasaï-Oriental a également le défi de réhabiliter et construire les routes de desserte agricole en plus de résorber le chômage. Pour ce faire, Ngoyi Kasanji envisage de mettre un point d’honneur à la formation technique avec l’objectif de susciter l’entreprenariat, essentiellement les PME. Très présents dans le reste du pays, l’INPP et JICA ont balisé la voie avec un financement d’USD 5 millions destinés à la construction des bâtiments pour assurer la formation professionnelle. L’apport de la province consiste à chercher le terrain. Et des pourparlers sont en cours avec la MIBA. Ngoyi ambitionne aussi de construire plusieurs écoles pour dépeupler les carrières et y ré diriger les jeunes et les sauver d’une grosse désillusion dans la recherche inespérée du bonheur dans l’exploitation artisanale. Dans le canevas,  la relance des activités sportives ainsi que la construction d’au moins un centre de santé et une maternité dans chaque territoire. Engagé dans l’administration des soins de qualité et d’une meilleure prise en charge des femmes en instance d’accoucher, Ngoyi a envoyé six accoucheuses en formation aux USA. Il compte sur leur expertise pour la mise à niveau de leurs collègues.
Ngoyi affirme que ce projet costaud n’est nullement une ambition démesurée. Son financement sera assuré en partie par la rétrocession et les fonds attendus de la prochaine Caisse de péréquation, les recettes provinciales qu’il espère accroitre avec la construction d’un port sur la rivière Lubi, les taxes attendues de la production minière. Ngoyi projette aussi d’organiser un forum de planification avec des partenaires et les forces vives de la province afin de réfléchir sur l’avenir du Kasaï-Oriental à l’horizon 2030.
 
Achille KADIMA MULAMBA

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