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Contrat chinois: Alingete lève le voile sur un scandale financier retentissant, il dresse une longue des transgressions commises par la partie chinoise

Le contrat conclu entre la RD-Congo et la Chine en 2008 est, selon Alingete, largement à l’avantage de la partie chinoise. Il s’agit, de son avis, d’«une colonisation économique inacceptable» qu’il faille vite mâter pour rétablir un équilibre entre les intérêts du pays et ceux de la partie chinoise. C’est ainsi qu’Alingete exige USD 20 milliards de la part des entreprises du GEC

Les conclusions de l’Inspection générale des finances -IGF- sur le fameux «contrat du siècle», conclu entre Kinshasa et Pékin, a révélé une forêt de désavantages pour la partie RD-congolaise. Au finish, le pays a perdu 3 5000Km de route, autant de kilomètres de chemin de fer, 31 hôpitaux et 145 centres de santé. Ces différentes infrastructures qui devraient coûter 6,5 milliards, n’ont pu bénéficier que de 4,47 m dont seulement 822 millions ont réellement utilisés. Où sont passés le reste? «Jeune Afrique» a fait des révélations au sujet de ce dossier. Lisez.

Dans une partie encore confidentielle de l’audit remis au président Félix Tshisekedi, Jules Alingete Key, le patron de l’Inspection générale des finances, détaille les exigences de l’institution pour rétablir l’équité entre les intérêts congolais et chinois. Explications.

Le 15 février, l’Inspection générale des finances -IGF- a publié les conclusions finales du rapport d’audit commandé par le président Félix Tshisekedi sur la convention passée en 2008 entre Gécamines et le Groupement d’entreprises chinoises -GEC-, qui a donné lieu à la création de la coentreprise congolo- chinoise Sicomines. À la suite de cet accord, la Chine est devenue le premier destinataire des exportations minières congolaises.

En 2021, les services de la ministre des Mines, Antoinette N’Samba Kalambayi, avaient déjà remis un rapport estimant que les entreprises chinoises n’avaient pas tenu leurs engagements en contrepartie de l’exploitation du cuivre et du cobalt des gisements détenus par Sicomines.

«Colonisation économique»

Désigné comme «le contrat du siècle» par le gouvernement de Joseph Kabila lors de sa signature, la convention est en réalité largement à l’avantage de la partie chinoise. Pour Jules Alingete Key, patron de l’IGF, c’est même «une colonisation économique inacceptable». Dans un document confidentiel que Jeune Afrique a pu consulter, l’économiste dresse une liste d’exigences pour rétablir un équilibre entre les intérêts de la RD-Congo et ceux de la partie chinoise.

Parmi elles, la révision de la répartition du capital de Sicomines par la prise en compte de la valeur des gisements apportés par Gécamines, mais aussi la réévaluation du montant des infrastructures à financer par la partie chinoise. Ce ne sont plus 3 milliards de dollars, mais 20 milliards, qui sont demandés aux entreprises du GEC. Par ailleurs, un milliard de dollars devra être débloqué par Sicomines dès cette année pour financer les chantiers d’infrastructures, dont la moitié reviendra à des entreprises congolaises.

Il est aussi demandé à la coentreprise de permettre dorénavant à Gécamines de commercialiser elle-même sa quote-part de production et que cesse les ventes de minerais à des tarifs négociés sans mise en concurrence. En effet, l’audit a mis en évidence un déséquilibre flagrant en faveur des intérêts chinois. Ainsi, dans ses calculs, l’IGF évalue le gain du GEC à 76 milliards de dollars, quand la RD-Congo a, elle, obtenu un gain de 3 milliards de dollars.

Il apparaît ensuite que lors de la création de Sicomines, l’apport de Gécamines, constitué par des gisements de cuivre et de cobalt, n’a pas été pris en compte. Selon l’IGF, ces actifs peuvent être évalués à 90,936 milliards de dollars. De fait, le capital de la coentreprise a été fixé de manière arbitraire à 100 millions de dollars. Surtout, le GEC, constitué notamment par China Railway Group -Crec- et Power Construction Corporation of China, a obtenu d’en détenir 68%, quand seulement 32% ont été accordés à la RD-Congo. C’est d’ailleurs la partie chinoise qui a prêté les 32 millions de dollars nécessaires à Gécamines pour apporter sa part. Des fonds que la société à capitaux publics a dû rembourser, payant près de 11 millions de dollars d’intérêts, retenus sur ses dividendes.

Longue liste d’infractions

Dans le cadre du contrat, le GEC s’est engagé à construire 3 500 km de routes, autant de kilomètres de chemins de fer, 31 hôpitaux et 145 centres de santé. Des infrastructures évaluées à 6,5 milliards de dollars. Un montant à investir qui a ensuite été revu à la baisse de moitié.

Au final, Sicomines n’aura mobilisé en quatorze ans que 4,47 milliards de dollars, dont seulement 822 millions ont servi à financer la construction d’infrastructures. Des investissements dont il est d’ailleurs difficile d’apprécier la réalité, dénonce Jules Alingete Key. Il apparaît aussi que c’est Sicomines qui s’est endettée, alors que les financements devaient initialement être apportés par le GEC, lequel n’a par ailleurs pas d’existence légale en RD-Congo, faisant ainsi peser sur Sicomines des charges que le groupement chinois aurait dû endosser.

L’IGF dénonce également la vente par Sicomines de sa propre production aux entreprises du GEC à des prix inférieurs au marché. Le manque à gagner est estimé à 7,37 milliards de dollars. Et la liste des infractions à législation et de l’inexécution par le groupement chinois de ses engagements est encore longue.

À l’heure où nous publions cet article, le gouvernement congolais n’avait pas officiellement confirmé les nouvelles exigences formulées par Jules Alingete Key.

L’ambassade de Chine en RD-Congo a, quant à elle, pas tardé à réagir en publiant le 17 février sur les réseaux sociaux un communiqué, par lequel elle dit regretter un rapport de l’IGF «dont le contenu est plein de préjugés» et qui «ne correspond pas à la réalité». Dans son texte, la représentation diplomatique chinoise réaffirme que le contrat signé entre le GEC et Gécamines constitue «un bel exemple de partenariat gagnant-gagnant». L’ambassade conclut en affirmant être prête à riposter «à toutes les violations des droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises».

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