L’Est de la RD-Congo est traversé par de conflits intenses depuis plus de 20 ans. Aux conflits initiaux, souvent basés sur les manipulations de clivages dits ethniques, se sont greffés des processus de prédation des ressources, notamment minières, dont le sol RD-congolais est l’un des plus riches au monde.
Préoccupé par cette situation, le député français Carlos Martens Bilongo vient de proposer une Résolution à l’Assemblée nationale française, condamnant le soutien du Rwanda aux rebelles du M23. Ces derniers ont ressurgi depuis novembre 2021 dans l’Est de la RD-Congo, dix ans après leur première rébellion. Carlos Bilongo a, dans son document, rappelé que le M23 s’est rendu coupable d’exactions d’une rare cruauté: massacres, viols de masses ou encore pillages et ce sur des populations vulnérables qui souffraient déjà bien avant ces crimes.
«Ce groupe a répandu l’horreur et la désolation dans la région», a-t-il déploré, soulignant qu’«il est admis depuis longtemps que ce mouvement n’agit pas seul mais dispose de relais dans la région». Selon le député français, la République du Rwanda fait en particulier l’objet d’accusations de la part de plusieurs pays ou encore d’ONG Human Rights Watch, dans son rapport publié le 25 juillet 2022, faisait ainsi référence à un soutien étranger -sans viser le Rwanda à ce stade- lequel fournirait un appui militaire substantiel aux rebelles.
Par la voix du ministère des affaires étrangères, a-t-il poursuivi, la France a ensuite indiqué le 19 décembre 2022 qu’elle condamnait le soutien de Kigali à ce mouvement: «le Rwanda, car il faut le nommer, doit cesser son soutien au M23. Il faut en finir avec la répétition de l’histoire dans cette région… le M23 doit cesser les combats, se désengager et rendre les territoires occupés».
Parallèlement, et après un travail minutieux, a-t-il encore rappelé, les enquêteurs de l’ONU ont explicitement confirmé que la République du Rwanda apportait un soutien aux rebelles du M23. Les conclusions du rapport de l’ONU publié le 16 décembre 2022 reposent ainsi sur «… des éléments de preuves écrits, photographiques et vidéo, des images aériennes, des missions sur le terrain menées par le Groupe d’experts dans le territoire de Rutshuru et à Goma, à Bukavu et à Kinshasa en RD-Congo ainsi qu’à Kisoro et à Bunagana en Ouganda, et des entretiens avec plus de 230 sources».
Les experts de l’ONU affirment sans détour que le Rwanda soutient le M23: «La fréquence, la durée et la force des attaques menées par le Mouvement du 23 mars/Armée révolutionnaire du Congo -M23/ARC-, groupe armé faisant l’objet de sanctions, se sont considérablement intensifiées et le territoire que celui-ci contrôle s’est agrandi de façon significative. Le Groupe d’experts a trouvé des preuves substantielles de violations de l’embargo sur les armes et du régime de sanctions, notamment l’intervention directe de la Force de défense rwandaise sur le territoire de la RD-Congo, soit pour venir en renfort au M23/ARC…».
Pour Bilongo, les experts explicitent également dans ce rapport l’aide et la participation de l’armée rwandaise à des attaques sur des militaires congolais. Sont notamment évoquées des images de drones attestant de la présence de forces rwandaises sur le territoire RD-congolais, ou encore des arrestations de soldats rwandais en RD-Congo. «Ce soutien de Kigali s’inscrit dans un certain contexte. Une importante communauté rwandaise réside dans l’Est du Congo, notamment des suites du génocide. Dès lors, il est légitime pour la République du Rwanda de souhaiter entretenir un lien avec ces populations héritières d’une période tragique de son histoire. Mais il est inacceptable que le Rwanda transforme ce lien, légitime, avec les populations issues de son sol en appui à un groupe armé responsable d’atteintes fondamentales aux droits humains et à la souveraineté RD-congolaise», a signifié Carlos Martens Bilongo.
Ce dernier invite la France à devoir s’associer aux efforts des autres pays pour la paix à l’Ets de la RD-Congo. Pour lui, les liens historiques qu’entretient la France avec les pays de la zone en proie aux conflits de l’Est RD-congolais, couplée à sa volonté de promouvoir la paix, l’obligent à agir pour mettre fin au soutien rwandais en faveur du groupe rebelle du M23. «En outre, la RD-Congo est le premier pays francophone du monde. L’importance de la Francophonie dans cette zone implique que la France ne se cantonne pas à une place de second plan. Un défaut de soutien français à ces populations dont nous sommes proches serait une faute», a souligné Bilongo.
Et de renchérir: «cette responsabilité a été reconnue par le Président de la République, et toutes les conséquences doivent en être tirée s’agissant de notre politique dans la région. En revanche, cette responsabilité ne saurait en aucun cas excuser une quelconque mansuétude vis-à-vis des agissements du régime rwandais en RD-Congo depuis deux décennies. La gravité de ces agissements a été incontestablement documentée par le rapport Mapping de l’ONU, défendu par le Prix Nobel de la paix RD-congolais, le Docteur Mukwege».
Pour lui, la France doit tirer les conséquences de ses propres constatations s’agissant du soutien rwandais au M23, a fortiori dès lors qu’elles ont été confortées par l’ONU. «Une résolution de l’Assemblée nationale demandant le renforcement du soutien de la France aux efforts de rétablissement de la paix en RD-Congo, donc ‘’condamnant le soutien du Rwanda au M23, recevrait un grand écho au sein du peuple congolais, et renforcerait l’amitié entre nos deux pays’’», a conclu le député français Carlos Martens Bilongo.