La RD-Congo roulée par les membres du gouvernement depuis 2007
La RD-Congo est un Etat de droit. Tous les textes de loi du pays l’affirment avec force. Dans le vécu quotidien individuel et collectif des personnes qui détiennent l’impérium à divers niveaux de responsabilités, les actes posés tendent beaucoup plus à démentir la matérialisation de cette disposition légale. Sous d’autres cieux où les valeurs morales, spirituelles et culturelles positives servent de balises à toutes les actions des institutions de la République, la loi s’impose à tout le monde du sommet à la base sans atermoiement.
Les exemples abondent. Lorsque le Président sud-africain Jacob Zuma s’est fait aménager un nouveau ranch en puisant énormément dans les finances de l’Etat, cela a provoqué une levée des boucliers dans tout le pays. Les opérateurs politiques sud-africains en commençant par sa propre famille, sont montés au créneau pour fustiger cette attitude du chef de l’ANC. La pression des autres partis politiques aidant et celle des populations entières, la justice a dû se saisir du dossier et trancher net. L’homme d’Etat sud-africain a été sommé de rembourser une bagatelle somme de près d’USD 500.000. Il s’est plié devant ce verdict.
En France, présentement, François Fillon, candidat de la droite à la prochaine élection présidentielle, a maille à partir avec les enquêteurs de l’Office central de lutte contre les infractions financières et fiscales. Son épouse Penelope doit justifier les montants perçus pour des emplois qualifiés de fictifs par une certaine opinion. Ce qui place son mari dans une position inconfortable dans la poursuite de la campagne du ralliement des Françaises et Français à sa candidature au cas où ce couple ne parviendrait pas à présenter des preuves irréfutables sur la régularité des prestations fournies par Mme Fillon.
Aux Etats-Unis d’Amérique, le nouveau locataire de la Maison Blanche peine à faire passer son décret sur l’interdiction d’immigration des ressortissants de sept pays musulmans l’Irak, l’Iran, la Libye, la Somalie, le Soudan, la Syrie et le Yémen. Le Président Donald Trump s’est attiré les foudres des maires démocrates de Los Angeles, New York ou Chicago, sans oublier les groupes de défense des droits de l’Homme. Plus intéressant, des juges américains ont décidé la non-application de ce décret discriminatoire dans certains Etats. Des choses inimaginables en Afrique Centrale. La liste serait longue. Ce détour sous d’autres cieux démontre qu’à l’heure où le monde est devenu un grand village à l’échelle planétaire, ce que les autres dirigeants posent comme actes pour le mieux-être de leurs peuples et leurs pays, peut aussi être accompli en RD-Congo. L’Etat de droit ne peut se limiter aux dimensions de simples professions de foi pendant que leur effectivité pose problème.
Déclaration du patrimoine familial à l’entrée en fonction et à l’expiration de celle-ci
Comme le dit si bien un vieux dicton, l’exemple vient d’en haut. Les RD-Congolaises et RD-Congolais assistent régulièrement aux shows médiatiques des membres du gouvernement qui se sont succédés depuis 2013 lorsqu’ils se plient à la contrainte de la première partie de l’article 99 de la Constitution qui stipule: «Avant leur entrée en fonction et à l’expiration de celle-ci, le Président de la République et les membres du gouvernement sont tenus de déposer devant la Cour constitutionnelle, la déclaration écrite de leur patrimoine familial, énumérant leurs biens meubles, y compris actions, parts sociales, obligations, autres valeurs, comptes en banque, leurs biens immeubles, y compris terrains non bâtis, forêts, plantations et terres agricoles, mines et tous autres immeubles, avec indication des titres pertinents. «Le patrimoine familial inclut les biens du conjoint selon le régime matrimonial, des enfants mineurs et des enfants, mêmes majeurs, à charge du couple.
La Cour constitutionnelle communique cette déclaration à l’administration fiscale. Faute de cette déclaration, endéans les trente jours, la personne concernée est réputée démissionnaire. «Dans les trente jours suivant la fin des fonctions, faute de cette déclaration, en cas de déclaration frauduleuse ou de soupçon d’enrichissement sans cause ou de soupçon d’enrichissement sans cause, la Cour constitutionnelle ou la Cour de cassation est saisie selon le cas».
Les gouvernements Gizenga, Muzito et Matata affranchis de cette disposition de la Constitution?
A l’expiration de leurs fonctions, les membres des gouvernements Gizenga I et II, Muzito I et II ainsi que Matata I, II et III n’ont pas procédé à la déclaration écrite de leur patrimoine familial. Connaissant le penchant des membres de l’Exécutif à la publicité tapageuse dès lors qu’ils posent des actes de haute portée patriotique, ces ministres ne se seraient nullement privés de démontrer leurs mains propres. Force est de noter qu’à ce jour, aucun indice n’ose contredire ce que le commun des mortels fustige tout bas. Au moment où nous couchons ces lignes, l’opinion généralement bien informée ne cesse de pointer du doigt l’accroissement exponentiel des biens du patrimoine de certains anciens ministres venus au gouvernement dans un état de précarité notoire.
Aujourd’hui, comme pour paraphraser l’ancien chantre de la rigueur, nombreux sont ceux qui ont installé, se sont installé, roulent carrosse, avec des grosses cylindrées, etc. Des villas et immeubles poussent comme des champignons dans les quartiers huppés de la capitale et dans certains chefs-lieux des provinces de l’intérieur en l’espace d’un mandat. L’acquisition des appartements et l’émigration des membres de la famille sous d’autres cieux vont bon train, avec des émoluments qui ne justifient nullement de telles dépenses somptueuses.
Le peuple, ce fonds de commerce intarissable
Pendant ce temps, le peuple, ce fonds de commerce intarissable sur lequel se fondent tous les discours démagogiques, vit dans l’extrême pauvreté. La recommandation formelle donnée au gouvernement Samy Badibanga de tout mettre en œuvre pour améliorer le social en est une preuve éloquente. Le pays a grandement besoin de toutes ses ressources pour une justice distributive. Dès lors que les personnes qui détiennent une parcelle de responsabilités dans les hautes sphères de décision, ne peuvent nullement se plier aux prescrits de la loi, quelle leçon les RD-Congolaises et RD-Congolais peuvent-ils dégager de ces écarts de comportement? A lire de près l’article 99 de la Constitution, une chose est de déclarer son patrimoine familial à l’entrée en fonction.
Mais le plus important, c’est à la fin du mandat que s’observent de grands écarts dans la constitution du patrimoine familial qui, malheureusement, ne passent entre les mailles des filets de la justice. Ce qui donne libre cours à tous les commentaires. Et la meilleure façon de tordre le cou aux rumeurs incendiaires fondées ou infondées, c’est la stricte application de l’article 99 dans son intégralité. La grande question qui reste suspendue sur toutes les lèvres est celle de savoir quand est-ce que la Cour constitutionnelle, le ministère de la Justice, le Procureur général vont prendre le taureau par les cornes pour faire respecter cet article 99 de la Constitution in extenso? Lex dura, sed lex.
Tino MABADA
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