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Faillite de la BIAC: la part de Mutombo!

Des rebondissements, des menaces qui pèsent sur les comptes bancaires et les avoirs de ses anciens administrateurs et des sociétés apparentées suite à une plainte du gouverneur de la Banque centrale du Cogo, le feuilleton BIAC n’est visiblement pas à son dernier épisode
Il y a 3 mois, quand Africanews annonçait la faillite de la BIAC, le gouvernement et la Banque centrale du Congo avaient multiplié des communiqués dans la presse nationale et internationale, affirmant que «les fondamentaux de la BIAC étaient solides» et cela, conformément à l’audit réalisé au sein cette troisième banque du pays entre juin 2015 et février 2016 par la BCC. Aujourd’hui, c’est un revirement à 360°. Tout le monde se dédit et tire la couverture de son côté. Dans un long communiqué publié début avril, le Premier ministre avait ouvertement chargé le gouverneur de la BCC d’avoir fermé les yeux sur le cas BIAC. Quelques semaines après, devant les élus du peuple, Déogratias Mutombo a, à son tour, chargé Matata Ponyo, désigné comme l’un des principaux fossoyeurs de la BIAC, du fait d’avoir suspendu brutalement la ligne de crédit de cette banque au mois de février dernier. Le gouverneur était tellement serein qu’il avait même réinstallé cette ligne de refinancement de la BIAC début avril… avant de rebondir quelques jours après, le 30 mai, dans une plainte à charge des administrateurs et de l’ancienne direction de la banque, accusés de «mégestion ayant suscité la banqueroute de la BIAC». Drôle! «Banqueroute et mégestion». Des termes jusqu’ici bannis du vocabulaire officiel mais qui font finalement irruption dans la plainte du gouverneur adressée au Procureur général de la République. Etrange revirement de la part de Mutombo! Que s’est-il exactement passé? Décryptage!
La Banque internationale pour l’Afrique au Congo -BIAC- est dans la tourmente. Placée sous administration de la Banque centrale du Congo -BCC- en attendant un repreneur, l’ex BIAO défraie la chronique sans avoir livré tous ses secrets… après une si riche histoire ponctuée de succès…et échecs. Après le départ de son DG, Michel Losembe, pourtant recruté sur conseil de la Banque centrale du Congo pour non seulement redresser la machine mais aussi faciliter l’arrivée d’un nouvel actionnaire de référence dans le capital de la BIAC, après la nomination d’Anne Mbuguje comme DG intérimaire, toujours sur proposition de la Banque centrale, qui n’aura finalement régné que quelques semaines, après sa mise sous tutelle et la nomination d’une nouvelle équipe dirigée par Israël Tsasa Bilo Ngabul, dont la mission est de présenter un plan de relance endéans 180 jours, après l’annonce d’une plainte du gouverneur de la Banque centrale contre les administrateurs et l’ancienne direction, après la demande du gel des comptes bancaires des administrateurs et avoirs en banques des sociétés leur apparentées, la saga BIAC est loin d’avoir tout livré.
Plainte ou coquille vide?
Dans sa plainte pour «mégestion ayant suscité la banqueroute de la BIAC, avec pour conséquence, la dilapidation de l’épargne du public», Déogratias Mutombo affirme que les faits reprochés aux anciens administrateurs de la BIAC «méritent des sanctions pénales au regard des articles 27, 79, 80 et 85 de la loi bancaire». Outre qu’il est étonnant de la part du gouverneur de parler de «banqueroute» pour une banque qu’il a lui-même placée sous tutelle aux fins de redressement, le gouverneur ne donne aucun exemple de la mégestion fustigée. A scruter bien le rétroviseur, on comprend facilement pourquoi il est si difficile pour Mutombo d’avancer ne serait-ce qu’une petite preuve sans pouvoir se brûler les doigts. Il y a peu, mains sur le cœur, il affirmait que la BIAC allait mieux, qu’il n’y avait rien de grave, que c’était juste un petit vent passager provoqué par la suspension du refinancement, qu’aucun épargnant ne courait à un seul risque. Comment alors expliquer ce rebondissement alors que l’audit a été réalisé par la Banque centrale? La mégestion, dont il est question, a-t-elle existé avant ou après l’audit? Pas de réponse du côté de la BCC. Il faut dire que si mégestion il y a, le Gouv’, qui a un regard sur la situation en temps réel de toutes les banques, était au courant et a dû fermer les yeux et a donc sa part de responsabilité. Dans ce cas, même les conclusions de l’audit de la BCC sont à remettre en cause. Et les inspecteurs qui ont participé à cette aventure ainsi que le gouverneur de la BCC, à l’instar des anciens administrateurs de la BIAC, devraient, eux-aussi, être poursuivis pour complicité. «Si vraiment il y a eu mégestion et que cela n’a pas été dit dans le rapport d’audit, ils -le gouv, les inspecteurs et les anciens administrateurs de la BIAC- se sont tous rendus coupables de l’infraction d’association de malfaiteurs», analyse un avocat.
Autre hypothèse, jugée probable très probable par un expert du secteur, le gouverneur «serait activé par une banque concurrente pour charger la BIAC et acculer ses administrateurs», certainement dans l’objectif de la reprendre à vil prix. «La BIAC a toujours été suivie par la BCC. Les difficultés de gestion de la BIAC étaient parfaitement identifiées et connues. Un plan de redressement a été élaboré. Parler aujourd’hui de mégestion et de banqueroute est un coup de poignard dans le dos», explique un cadre de la BIAC.
 
Entre le marteau et l’enclume
Pendant ce temps, faisant suite à l’instruction ouverte par le PGR sous le numéro D.023/41540/PGR/NKM, l’Avocat général de la République Joseph Nsabua a enjoint aux banques le gel des avoirs 7 personnes physiques visées par la plainte ainsi que leurs entreprises apparentées. Sur la liste, figure aussi un centre médical de référence. On imagine ce que le gel de ses avoirs peut avoir comme conséquences. De milliers d’emplois en péril. Aussi, peut-on lire parmi les 23 sociétés concernées, COBRA et COBEGA, deux entreprises pourtant liquidées, des sociétés qui ne sont en rien apparentées ou d’autres, qui n’ont rien à voir avec les administrateurs. «Quoiqu’il en soit, il est surréaliste de s’en prendre à des sociétés sous le seul prétexte que leurs propriétaires seraient aussi administrateurs d’une banque sur laquelle il y a un contentieux. Ces sociétés sont en droit de se retourner contre la BCC», explique un autre avocat.
La bataille va être longue. Elle promet de l’être. A moins qu’une entente à l’amiable soit trouvée. Lundi 06 juin devant les élus des lus, le Premier ministre a encore chargé le gouverneur de la BCC, l’accusant de n’avoir pas collaboré dans le dossier BIAC et que les mesures prises maintenant étaient préconisées par le gouvernement depuis plusieurs mois. Une véritable guerre de communication entre les deux personnalités qui ne se ratent pas mutuellement lorsqu’elles en ont l’opportunité. Hélas! Tout cela ne règle rien de la situation des épargnants de la BIAC, qui ne savent toujours pas accéder à leurs épargnes en temps voulu. Il est temps que ce dossier soit géré avec responsabilité. Il s’agit de la vie de plus de 400.000 clients, ayant chacun des dépendants, auxquels s’ajoutent de dizaines de milliers d’employés des sociétés aujourd’hui menacées.
Henry MBUYI         

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