Pour se débarrasser des gouverneurs devenus indésirables, le Vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur n’a pas trouvé mieux comme allié que le président de la CENI qui a préféré ôter sa tenue d’indépendant afin de prêter main forte au gourou du PPRD et de la MP qui a visiblement du mal à se défaire des certains copains devenus incontrôlables.
En RD-Congo, la Commission électorale nationale indépendante -CENI- s’apprête à organiser des élections des gouverneurs dans les provinces où les gouverneurs n’ont jamais été déchus par assemblées provinciales soit démissionné d’eux-mêmes, moins encore empêchés définitivement à exercer leurs fonctions. Une situation insolite qui peut faire rire certaines personnes, pourtant lourde des conséquences, à en croire le député et avocat Stanley Mbayo qui appelle à l’annulation de ce scrutin qui va engendrer énormément de problèmes de droit. Il est vrai que certains partis politiques sont en difficulté avec leurs gouverneurs devenus sources des tensions permanentes, mais qui survivent miraculeusement à des motions de défiance intempestives de leurs élus provinciaux. Au lieu de jouer à l’apaisement, le patron de la territoriale a visiblement choisi la confrontation.
Usé visiblement, le ministre de l’Intérieur ne veut plus se battre seul. Il s’est décidé d’associer le président de la CENI à sa cause afin de se débarrasser des gouverneurs indésirables alors que ces derniers sont toujours en fonction. Dans sa communication, la centrale électorale dit pourtant organiser des élections dans les provinces où le vide a été juridiquement constaté. Sauf que sur la liste de 11 provinces publiées, il n’y a qu’une seule province, le Sud-Ubangi, où le vide a été juridiquement constaté, le gouverneur Makila ayant été nommé depuis décembre 2016 au Gouvernement central.
Le Haut Katanga et la Tshuapa ont vu leurs gouverneurs déchus être réhabilités par la Cour constitutionnelle pour vice de procédure dans les motions ayant conduit à leur éviction. Sauf que le ministre de l’Intérieur, Emmanuel Shadari, bloque jusqu’aujourd’hui l’application de ces arrêts de la Haute Cour. C’est également le cas pour la Mongala où le vice-gouverneur a été aussi réhabilité après sa déchéance. Le gouverneur déchu du Haut Lomami a, lui aussi, introduit un recours devant la Cour constitutionnelle qui doit se prononcer dans quelques jours. L’affaire étant pendante devant la justice, l’élection d’un nouveau gouverneur ne peut être organisée. C’est du droit.
Le Bas-Uele, l’Equateur, le Kasai central, le Kwilu, la Mongala, le Sud-Kivu et la Tshopo ont leurs gouverneurs en place. Aucun d’entre eux n’a démissionné, aucun n’a été définitivement empêché à occuper ses fonctions, aucun n’a été non plus déchu par son assemblée provinciale. Dans ces conditions, impossible d’organiser ces élections annoncées avec pompe par Shadari et Nangaa. Les gouverneurs des provinces concernées peuvent d’ailleurs attaquer en inconstitutionnalité cette décision de la CENI. Et la Cour qui a déjà réhabilité certains d’entre eux ne pourra se dédire.
Pire, affirme Stanley Mbayo, le ministre de l’Intérieur et le président de la CENI se sont rendus passibles des poursuites pour outrage à la justice. Les arrêts de la Cour constitutionnelle sont immédiatement exécutoires, dit la Constitution. Mais dans les cas du Haut Katanga et de la Tshuapa, le ministre de l’Intérieur a préféré passer outre ces arrêts.
«Imaginez aujourd’hui que nous qui gouvernons -Majorité et Opposition- bafouons les arrêts de la Cour constitutionnelle. Que ferions-nous si jamais demain, ceux qui ne gèrent pas avec nous contestaient les résultats définitifs des élections législatives et présidentielle qui seront proclamés par la Cour constitutionnelle? Aurions-nous le courage de leur dire que les arrêts de la Cour constitutionnelle sont immédiatement exécutoires? Non. Il se serviraient de ces cas de jurisprudence qui constituent un précédent dangereux», alerte Stanley Mbayo qui affirme défendre le droit et non des individus.
Pour ce député donc, tous ceux qui font ombrage à l’application des arrêts de la Cour constitutionnelle conspirent contre la République. «La Cour constitutionnelle doit urgemment demander une réunion inter institutionnelle afin d’exposer cette situation devant le garant de la Nation afin de suspendre les élections des gouverneurs là où la loi ne le permet pas pour l’instant. Ceux qui ont bénéficié des arrêts de la Cour doivent être réhabilités. Si leurs partis ne veulent plus d’eux, les assemblées pourront cette fois-ci initier des motions contre eux en suivant toute la procédure. Nous devons défendre le droit. Nous devons éviter cette anarchie qui veule à ce qu’il y ait d’un côté les gens qui doivent respecter les arrêts de la Cour constitutionnelle et de l’autre, ceux qui ont le droit de ne pas les respecter», conclut l’avocat et député président du Mouvement des indépendants réformateurs -MIR.
Henry MBUYI
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