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Dénis Kadima loin de rassurer: Sortie à la Ponce Pilate du président de la CENI alors que le matériel électoral est scandaleusement dans la rue et persistent les soupçons sur les bureaux fictifs

«Aucun kit électoral n’a été découvert lors de l’accident survenu le 20 février à Tshikapa. Il n’y avait que des fiches d’inscription», a maladroitement justifié mardi le patron de la Centrale électorale, sans dire ce que les fiches d’enregistrement faisaient dans le véhicule d’un acteur politique, prenant le contrepied de son propre communiqué du 22 février 2023…

Des kits d’enrôlement des électeurs sont dans la rue, entre les mains des acteurs politiques, renforçant les doutes sur le caractère régulier et transparent du processus électoral. La Commission électorale nationale indépendance -CENI- a voulu se couvrir en publiant le 15 février un communiqué demandant à la justice d’enquêter et punir éventuellement les coupables. La Société civile a vite rétorqué, estimant que ces kits sont dans la rue «grâce à des complicités internes au sein de la CENI». Elle a pointé du doigt le président de la Centrale électorale, Dénis Kadima, et son staff, tenus pour responsables de cette situation dangereuse.

Réponses désinvoltes livrées avant le verdict de la justice

A la faveur de sa conférence de presse, mardi 28 février 2023 à Kinshasa, Kadima a essayé de dédouaner et la CENI et le propriétaire du véhicule accidenté sur la route de Tshikapa, dans lequel les colis suspects ont été découverts. Sans attendre le verdict de la justice, il a fait des affirmations en totale contradiction avec le communiqué du 22 février dans lequel il reconnaissait lui-même qu’il y avait du matériel électoral dans l’un des véhicules entrés en collision le 15 février à Tshikapa. «Aucun kit électoral n’a été découvert lors de l’accident survenu le 20 février à Tshikapa. Il y avait que des fiches d’inscription et non des kits électoraux», a-t-il expliqué, jouant les Ponce Pilate.

Des fiches d’inscriptions de la CENI se trouvent à bord d’un véhicule d’un acteur politique d’un camp bien identifié, alors qu’il n’appartient pas au personnel de la centrale électorale, voilà bien qui expose la CENI et renforce les accusations de complicité interne et de connivence avec une partie au jeu électoral. Voilà qui fait dire que la CENI est partiale et manque de neutralité.

Réagissant le même mardi à la sortie du président de la CENI, Me Hervé Diakiese de la Société civile a eu un sentiment de révolte: «C’est inquiétant comme explication. Ce sont des réponses désinvoltes. Le débat ce n’est pas qu’il s’agit du matériel sensible ou non sensible. Il doit plutôt dire comment la CENI qui dispose des moyens alloués pour sécuriser et transporter et les kits d’enrôlement et les fiches d’inscription, peut admettre que les matériels électoraux, sensibles ou non sensibles, se retrouvent entre les mains des acteurs politiques. Une telle désinvolture ne saurait pas rassurer les partenaires et les autres parties impliquées au processus électoral. Ça discrédite Kadima et son équipe».

Formel, Me Diakiese n’a trouvé autre responsable que Kadima et son bureau, appelant à la mise en place d’une commission d’enquête indépendante pour faire la lumière sur cet épineux problème, qui porte atteinte à la crédibilité et l’intégrité du processus électoral. «Nous allons nous mobiliser au niveau de la Société civile pour la mise en place d’une commission d’enquête indépendante pour inventorier les matériels électoraux… Nous devons démasquer les complicités internes qui ont remis ces matériels aux politiciens. Les politiciens impliqués doivent être interpellés», a-t-il soutenu, non sans émettre le vœu de la tenue des audiences publiques.

Outre Me Diakiese, la CENCO et l’ECC ont également exprimé des inquiétudes. Seule la CENI a passé commande auprès du groupe coréen Miru System. Comment retrouver des kits d’enrôlement et des cartes d’électeur dans la rue, chez des particuliers sans soupçonner des responsables et des complicités au sein de la CENI? «Si les choses ne sont pas clarifiées à ce stade, ce serait irresponsable de la part de tous d’avancer dans un processus électoral où la crédibilité est sérieusement mise en cause», ont noté les deux mastodontes confessions religieuses.

Partout, des alertes de planification de la fraude électorale

La réaction de la Cenco et de l’ECC est consécutive aux alertes lancées de partout au sujet de la détention illégale des matériels électoraux et de planification de la fraude électorale. A Masimanimba, des acteurs politiques ayant pignon sur rue ont dénoncé la détention des cartes d’électeurs vierges par certains individus. Des dénonciations confirmées par la CENI par un communiqué faisant état de l’arrestation d’un individu en possession d’un lot de 300 cartes d’électeur en provenance de Masimanimba.

Des faits réels, des casus belli que Kadima a entrepris de banaliser lors de son briefing, estimant qu’il s’agit des faits mineurs qui ne sauraient atteindre l’intégrité des élections, laissant entendre que partout à travers le monde les élections posent des problèmes de contestation, allant jusqu’à évoquer le cas Trump aux Etats-Unis…

Questions: Donald Trump avait-il contesté l’élection de Joe Biden parce que le matériel électoral courait les rues et à la portée exclusive du camp des Démocrates? Avant cette élection, les Américains avaient-ils trouvé des fiches d’inscription dans des véhicules et des cartes d’électeurs entre les mains des particuliers étrangers au service public en charge de l’organisation des scrutins? Kadima peut-il démentir que 300 cartes d’électeurs et 300 fiches d’inscription peuvent représenter autant de voix potentielles dans un bureau fictif alors que persistent les soupçons sur l’existence des bureaux fictifs, au moins sept par membre du camp politique au pouvoir? Pourquoi la CENI ne s’indigne-t-elle pas face à ce pertinent constant de sieur Olivier Kamitatu selon lequel il y a un centre d’inscription par 17km2 au Kasaï Oriental, où sont attendus environ 1,3 million d’électeurs, et un centre d’inscription par 240 km2 au Haut-Katanga pour presque 3 millions d’électeurs?

Favorable lui aussi à un probable report des élections à cause de la guerre à l’Est, Kadima est de loin de rassurer avec des réponses peu convaincantes face à toutes ces précédentes remarques fondées, légitimes et objectives qui donnent, toutes, matière à réflexion et renforcent les soupçons de planification de la fraude électorale alors qu’il y a un autre dossier qui préoccupe et fait craindre: ces pannes récurrentes des machines dans plusieurs aires opérationnelles.

Dans le Haut-Katanga, ont rapporté des acteurs de la Société civile, 260 machines sur les 551 y envoyées, sont tombées en panne et se retrouvent sans pièce de rechange. Leur réparation, ont-ils ajouté, nécessite la présence des Coréens de Miru System, constructeur desdites machines. Ce qui impacte négativement sur le processus d’inscription d’électeurs dans cette province réputée favorable à un candidat déclaré à la présidentielle, avec comme conséquence directe: faible nombre d’enrôlés.

Le camp d’un candidat déclaré à la présidentielle ne dissimule plus sa révolte face au déséquilibre constaté dans l’établissement de la cartographie électorale «Considérant que les Centres d’inscription -CI- deviennent des Centres de vote, il y a un CI par 17km2 au Kasaï Oriental, et un par 240 km2 au Haut-Katanga. Ceux du Kasaï Oriental ont moins de la moitié d’électeurs attendus», a fait savoir Olivier Kamitatu d’Ensemble pour la République, sollicitant de la CENI de «rééquilibrer le nombre de bureaux d’enrôlement à travers la République en renforçant le nombre de bureaux et de machines au Grand Katanga particulièrement dans le Haut-Katanga».

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