Le processus d’identification et d’enrôlement des électeurs en cours depuis décembre 2022 est en train de virer au chaos. Après l’épisode de Tshikapa et de Masimanimba, c’est autour d’Ilebo de connaitre sa dose de scandale. Un procès-verbal daté du 5 mars et attribué à l’Agence nationale de renseignements -ANR- et au Chef de secteur du sud Banga, relayé par plusieurs médias et journalistes, fait état de la saisine «deux ordinateurs de la CENI auprès du parti politique ACI» dont l’autorité morale est le député La Jeunesse Mandjuandjua, élu d’Ilebo et membre de l’Union sacrée de la Nation.
Quatre personnes, présumés auteurs du forfait, ont également été interpellés dans ce coup de filet: le fédéral secteur de Banga d’ACI, un certain Trésor Makutu Mayembe; le président cellulaire de Banga, Nestor Ngwama Pitshiawoto; la présidente des mamans, Brigitte Nyamashi Ngwapitshi et son adjointe, Kinda Bukoko. «Il s’agit bien de la bande à Theo Kazadi. Tous ont créé des partis fantômes et ne comptent que sur la tricherie», ont fait savoir des élus du Kasai trouvés dans un salon à Tshikapa.
Des proches de Kadima ont tenté de minimiser l’incident, disant tantôt qu’il s’agit d’un document sorti des laboratoires, d’un fake, se basant sur le manque d’en-tête. Réplique du groupe des députés de Tshikapa: «Ils oublient que, dans nos provinces et territoires, les choses se passent ainsi, plusieurs services de l’Etat sont dépourvus de tout. Dès lors que les responsables cités n’ont apporté aucun démenti, nous tenons ce document pour authentique. Et, encore une fois, la CENI doit nous expliquer comment du matériel que seule elle doit détenir et manipuler se retrouve entre les mains des privés».
Ce nouveau vacarme intervient moins d’une semaine après la sortie à la Ponce Pilate de Denis Kadima au cours de laquelle il avait banalisé les soupçons de fraude après la découverte, le 15 février, des matériels électoraux à Tshikapa, toujours dans la province du Kasaï. «Aucun kit électoral n’a été découvert lors de l’accident survenu le 20 février à Tshikapa. Il y avait que des fiches d’inscription et non des kits électoraux», avait-t-il expliqué sans autre forme de procès. Comme quoi, les fiches d’inscription ne faisaient pas partie des matériels électoraux. Placé cette fois-ci devant un autre fait, le président de la Centrale électorale «n’inspire plus confiance» alors que le processus en cours vire en un chaos, pire un scandale! «Quand les gens voient la fraude déjà préparée, Kadima crie au sabotage du processus électoral. Peut-être que les gens avaient peur de dénoncer ces pratiques aux époques de Nangaa et autres. Si de petits partis de l’USN ont leurs machines, que dire de l’UDPS, de l’UNC, de l’AFDC?», s’est-interrogé Charly Muamat sur Twitter.
Comme lui, plusieurs voix s’élèvent désormais pour exiger des explications sur ces multiples fuites des matériels électoraux, censés avoir été conçus sur mesure et uniquement pour la CENI. Le mois passé, la CENCO et l’ECC avaient déjà exprimé des inquiétudes sur le déroulé du processus. «Si les choses ne sont pas clarifiées à ce stade, ce serait irresponsable de la part de tous d’avancer dans un processus électoral où la crédibilité est sérieusement mise en cause», avaient-ils fait observé dans un communiqué conjoint. La situation au Kasaï n’est d’ailleurs pas isolée. A Masimanimba, les mêmes dénonciations ont été faites par des acteurs politiques ayant pignon sur rue.
L’équipe de Denis Kadima est également soupçonnée de tenter de gonfler le nombre d’électeurs dans les provinces de l’ex-Kasaï, réputées pro-Félix Tshisekedi. Au Kasaï-Oriental, le ratio affiche un centre d’inscription pour 17Km² contre un centre pour 240Km² dans le Haut-Katanga qui, en plus, ne voit fonctionner régulièrement que la moitié de 551 centres ouverts suite aux complications des kits déployés.