
Le Parquet général près la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe a mis la main sur deux anciens responsables de l’Agence congolaise des grands travaux -ACGT- présumés impliqués dans la surfacturation des marchés d’infrastructures réalisées en exécution du contrat chinois, avant de les transférer à Makala samedi autour de 21 heures. Des sources judiciaires citent l’ancien Directeur général Roger Busima Kataala, en poste du 17 novembre 2008 au 21 janvier 2011, et son successeur direct, l’ancien Directeur général Charles-Médard Ilunga Mwamba, en fonction du 21 janvier 2011 au 22 novembre 2022.
A les en croire, le Parquet a également interpellé et emprisonné un troisième suspect, Willy Monda, ancien chef de section Voirie à l’Office de voirie et drainage -OVD-, où Roger Busima avait également été Administrateur-Directeur général peu avant sa nomination à l’ACGT.
Créée en août 2008, l’ACGT avait reçu mandat d’exécuter le projet de construction des infrastructures prévu dans le contrat minerais contre infrastructures signé entre la RD-Congo et le groupement d’entreprises chinoises -GEC. Au départ, le programme sino-congolais avait la prétention de mobiliser 9 milliards de dollars américains, dont 6 milliards pour le projet d’infrastructures de base et 3 pour le projet minier. Ce budget a été réduit à 6 milliards de dollars, pour tenir compte des exigences conjoncturelles liées à la soutenabilité de la dette.
De ce montant, 3 milliards de dollars devaient concerner le secteur des routes, voiries, chemins de fer, bâtiment, énergie, port et aéroports. Les modalités pratiques de cette coopération ont été rendues possibles par la création d’une joint-venture dénommée Sicomines, du bureau de coordination du programme sino-congolais ainsi que de l’ACGT dont les deux premiers directeurs généraux, Roger Busima et Charles-Médard Ilunga, ont eu un mandat cumulé de 14 ans dont 11 pour le deuxième.
Pendant ces 14 ans, l’ACGT a pu, à en croire les informations glanées sur son propre site, exécuter 101 projets mis en œuvre, représentant un portefeuille de 2 milliards 950 millions 907 mille 376,48 dollars. De ces 101 projets, 49 relèvent des concessions, 42 du programme sino-congolais pour environ 825 millions de dollars américains et 10 sous financement du Trésor public. «AfricaNews» a appris également que les premières sommes sorties entre 2008 et 2010 dans le cadre des travaux d’urgence en prévision du Cinquantenaire de la RD-Congo sont tombées directement dans les caisses des sociétés chinoises CREC-7 et SZTC avec la complicité des responsables de l’ACGT et du Secrétariat exécutif du Bureau de coordination et de suivi du programme sino-congolais.
Enquête du Parquet et arrestations déclenchées à la suite d’un travail abattu par l’IGF!
Ces 14 ans de gestion du duo Busima-Ilunga ont coïncidé avec une enquête de l’Inspection générale des finances -IGF- dont les conclusions ont fait état du déséquilibre du contrat chinois et de la surfacturation des marchés d’infrastructures y découlant. Si la République n’a bénéficié que de ces 825 millions de dollars, la partie chinoise a, retour, empoché plus de 10 milliards de dollars. Inéquitable. Tout est donc parti du rapport des hommes de l’inspecteur général-chef de service Jules Alingete Key, qui a demandé à voir clair sur ces facturations excessives et exigé, en même temps, le réexamen du contrat chinois en vue de rétablir dans ses droits la RD-Congo.

Le Parquet général près la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe a aussitôt lancé ses investigations, sur demande de l’IGF. Voici que ces enquêtes ont débouché sur l’interpellation et le mandat d’arrêt lancé à l’encontre de Busima, Ilunga et Monda, tous emprisonnés à Makala depuis samedi soir. Les éléments en possession de la justice font justement état de surfacturation des marchés d’infrastructures dans le cadre de la convention de collaboration portant sur le contrat chinois, d’inachèvement et inexécution des travaux pourtant déjà financés.
La surfacturation dénoncée provient de plusieurs artifices mis en œuvre à l’occasion de la conclusion des contrats des travaux et leur exécution. Des sources judiciaires précisent qu’il s’agit, en effet, de l’exagération des coûts unitaires et de certains frais normaux, de l’introduction dans les coûts des travaux des rubriques inexistantes dans les marchés du genre «sommes à valoir». Selon ces sources, tous ces faits laissent présumer un détournement des deniers publics étant donné que ces investissements sont des fonds prêtés à la RD-Congo, qui les rembourse avec intérêts sur ses minerais cédés à la Gécamines.