C’est une compétence exclusive de la Direction générale des impôts -DGI- que veut s’arroger le ministre des Finances, Nicolas Kazadi, sous couvert d’une commission contrôle-qualité, tonne la journaliste et influence Denise Mukendi…
Dans une correspondance adressée au Directeur général de la DGI, l’argentier national annonce la mise en place de cette structure ad-hoc, composée notamment, en plus des délégués de la DGI, des experts de la Direction générale des douanes et accises -DGDA-, des inspecteurs de l’Inspection générale des finances -IGF-, des émissaires du Conseil permanent de la comptabilité du Congo ainsi que des membres du cabinet du ministre des Finances. L’idée a beau être géniale dès lors qu’elle paraît être lancée pour renforcer le contrôle et éventuellement booster les recettes mais elle énerve la Loi.
Si Nicolas Kazadi évoque, dans son courrier datant du 9 août, les «recommandations retenues lors de la réunion de mobilisation des recettes du 9 mai», le Directeur général de la DGI ne l’entend pas de cette oreille, car ayant déjà brandi la Loi en juin dernier pour faire constater l’illégalité de cette conclusion. Selon Barnabé Muakadi, les déclarations fiscales sont du «pouvoir exclusif» de sa régie, aux termes de l’article 25 de la Loi n°004/2003 du 13 mars 2003 portant réforme des procédures fiscales.
«Toutefois, elle -la DGI- peut faire appel aux conseils techniques des agents de l’Etat ou des établissements publics lorsqu’une vérification de comptabilité ou une procédure de redressement requiert des connaissances techniques particulières, suivant les prescrits de la Loi sus-évoquée», avait rétorqué Barnabé dans une correspondance adressée à la tutelle le 9 juin. Malheureusement, Nicolas Kazadi reste de marbre et appuie désormais sur l’accélérateur, quitte à empiéter les platebandes de la DGI avec, selon certaines langues, l’objectif de s’accaparer la gestion de l’administration fiscale.
«Au-dessus des lois de la République»
Lundi à la réunion convoquée, des experts ont tenté en vain de faire raisonner le ministre en le décourageant cette mise en place «illégale». Selon les indiscrétions des participants, l’argentier national aurait sèchement repris ses interlocuteurs. «Il s’en fout de la Loi et des textes. Selon lui, cette commission est la volonté du Président de la République», confie un des participants à «AfricaNews». Une autre source confirme cependant que cette tentative d’user du nom du Chef de l’Etat est un trafic d’influence sans soubassement car, ce dernier est un «défenseur des textes».
«Certes, le Président Tshisekedi encourage toutes les mesures de maximisation des recettes mais à condition qu’elles soient conformes à la loi», recadre-t-il. L’enfer étant pavé de bonnes intentions, même si l’intention du ministre semble noble car visant les intérêts de la République, il se retrouve bloqué suite aux limites fixées par le législateur. «La logique voudrait qu’il se plie et abandonne cette démarche suicidaire», avance-t-on dans les rangs des syndicalistes de la DGI, jaloux de leurs attributions.
Aussi, les syndicalistes rappellent l’existence depuis belle lurette d’une étroite collaboration entre la DGI et la DGRAD. Ils disent ne pas comprendre le bien-fondé de la commission contrôle-qualité, du reste, illégale selon eux. «La DGDA collabore étroitement avec la DGI via la plateforme numérique Sydonia, le CPCC a formé plusieurs vérificateurs d’impôts, l’IGF travaillent déjà à l’encadrement des recettes, et le cabinet du ministre travaille avec les inspecteurs sur l’impôt sur les superprofits -ISP», rappelle un syndicaliste qui alerte que la mise en place d’une nouvelle structure va être budgétivore, en plus de gripper la machine.
Dans l’opinion, les réactions fusent de partout pour dénoncer l’attitude du ministre. Journaliste et influenceuse, Denis Mukendi est d’avis que la Loi n’est pas du côté du ministre des Finances dans cette «guéguerre». «L’argentier national semble travailler contre les intérêts du Président de la République», fait-elle remarquer. Convaincus que les compétences sont d’attribution, les syndicalistes de la DGI exhortent la Direction générale au légalisme. «L’article 28 de la Constitution est clair, nul n’est tenu d’exécuter un ordre manifestement illégal», souligne un autre syndicaliste qui en appelle à «l’arbitrage» du Chef de l’Etat afin de «rappeler Nicolas Kazadi à l’ordre».
A la DGI, syndicalistes et travailleurs sont d’avis que la paix sociale et le maintien de la lancée des mobilisations records dépendent également de cette affaire qui plombe le bon climat de la régie.