
Brandissant l’article 6 point 2 de la Loi organique n°18/023 du 13 novembre 2018, le président du Conseil national de suivi de l’accord et du processus électoral -CNSA- réclame la correction du travail de la Centrale électorale par la reprise des tripartites consacrées à son évaluation régulière, au moins une fois tous les deux mois…
La réaction de Joseph Olenghankoy, président du Conseil national de suivi de l’accord et du processus électoral -CNSA-, a été musclée et proportionnelle aux dégâts constatés sur le terrain des opérations électorales et qui présagent le chaos à travers le pays. «Le CNSA a le regret de constater que ce processus électoral lancé par la CENI depuis la publication du calendrier électoral se déroule en violation flagrante des lois liées au processus électoral», a, d’entrée de jeu, avancé Olenghankoy dans sa communication du 28 février dernier consécutive à une session hebdomadaire du CNSA. Un acte assez rare pour être souligné. En effet, en dépit des dérapages constatés depuis le début du lancement des opérations d’identification et d’enregistrement des électeurs, aucun chef d’institution ni un officiel n’a pipé mot. Le CNSA et Olenghankoy ont le mérite de l’avoir fait pour la première fois, brandissant l’article 6 point 2 de la Loi organique qui donne à cette autre institution d’appui à la démocratie «le pouvoir de communiquer la vérité sur le processus électoral».
Joignant désormais sa voix à celle de l’Eglise, la Société civile et l’Opposition, Olenghankoy a fustigé et compté ces ratages les uns après les autres. Il a notamment évoqué «la découverte des kits d’enrôlement, des cartes d’électeurs et des fiches d’enrôlement vierges auprès des tierces personnes; le dysfonctionnement de certains centres d’inscription et l’existence de centres d’inscription fictifs, ainsi que les violences physiques orchestrées par des milices des partis politiques de tous bords observées dans certains centres d’inscription des électeurs».
Tous ces échecs font craindre le pire dans le chef de certaines parties au processus qui remettent déjà en cause «la crédibilité et l’impartialité» de Denis Kadima. «Ces incidents connus créent une inquiétude dans l’opinion sur la crédibilité du processus électoral», a dit Olenghankoy sur un ton qui rappelle les dénonciations déjà faites par certaines formations politiques de l’Opposition, structures de la Société civile ainsi que les églises catholique et protestante. Le président de la Centrale électorale, Denis Kadima, s’est «discrédité» davantage lorsqu’à la faveur de sa conférence de presse, mardi 28 février 2023 à Kinshasa, il a essayé de dédouaner et la CENI et le propriétaire du véhicule accidenté sur la route de Tshikapa, dans lequel des kits d’enrôlement des électeurs ont été découverts.
«Aucun kit électoral n’a été découvert lors de l’accident survenu le 20 février à Tshikapa. Il n’y avait que des fiches d’inscription», a-t-il maladroitement justifié, sans dire ce que les fiches d’enregistrement faisaient dans le véhicule d’un acteur politique, prenant le contrepied de son propre communiqué du 22 février 2023. Par ce communiqué, la CENI a demandé à la justice d’enquêter et punir éventuellement les coupables. La réponse de Kadima a poussé Me Hervé Diakiesse de la Société civile à sortir de ses gongs pour fustiger la «désinvolture» du patron de la CENI.
«C’est inquiétant comme explication. C’est une réponse désinvolte. Le débat c’est pas qu’il s’agit du matériel sensible ou non sensible. Il doit plutôt dire comment la CENI, qui dispose des moyens alloués pour sécuriser et transporter et les kits d’enrôlement et les fiches d’inscription, peut admettre que les matériels électoraux, sensibles ou non sensibles, se retrouvent entre les mains des acteurs politiques. Une telle désinvolture ne saurait pas rassurer les partenaires et les autres parties impliquées au processus électoral. Ça discrédite Kadima et son équipe», a-t-il indiqué.
Communication-du-CNSA-n°-016-du-28-fev-2023De leur côté, les églises catholique et protestante qui, bon gré mal gré, ont cautionné l’entérinement de Kadima à la tête de la CENI, ont eu comme réaction: «Si les choses ne sont pas clarifiées à ce stade, ce serait irresponsable de la part de tous d’avancer dans un processus électoral où la crédibilité est sérieusement mise en cause». Ça urge donc, à moins de 10 mois de l’organisation des élections quasi-générales, de rectifier les tirs et de reconstituer le tissu de la confiance et de ré-attiser la flamme de la crédibilité dans le chef des parties prenantes. Laquelle flamme est en extinction, si elle n’est déjà pas éteinte, estime-t-on.
Pour ce faire, le CNSA, à travers son président Joseph Olenghankoy, a notamment recommandé la reprise de la tenue des tripartites CNSA-gouvernement-CENI conformément à l’article 6 point 2 de la Loi organique n°18/023 du 13 novembre 2018 portant institution, organisation et fonctionnement du CNSA. Cette disposition impose de «réaliser des évaluations régulières du processus électoral au moins une fois tous les deux mois avec la CENI et le gouvernement». Son bénéfice, a-t-il soutenu, est d’assurer la transparence du processus au risque que cela serve de germe à une guerre civile.