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Affaire Bukangalonzo : Grobler, le coaccusé parle pour la première fois!

Il rompt enfin le silence pour donner sa version des faits dans l’affaire Parc agro-industriel de Bukanga Lonzo qui fait couler beaucoup d’encre et de salive, provoquant une vive polémique et tant de commentaires dans les médias traditionnels et sur la toile. Surtout après l’épisode de la Cour constitutionnelle, qui s’est déclarée incompétente de juger un ancien premier ministre.

L’homme d’affaires sud-africain Christo Grobler, administrateur de la Société Africom commodities, a eu le temps de cracher ses vérités et de faire de donner des versions inédites. Occasion: le plateau de la télévision lui offert par les journalistes Christian Bosembe et Floride Zantoto. Grobler relate d’abord comment il est arrivé en République démocratique du Congo en 2013, avec, dans ses valises, l’objectif de mettre en place des usines de fabrication des fertilisants dans le pays.

Sur place à Kinshasa, Christo Grobler révèle qu’il a soumis sa proposition au gouvernement RD-congolais pour implanter son usine et créer des emplois. «Le gouvernement est venu vers nous pour nous demander la hauteur du financement. Nous leur avions communiqué le montant, c’était autour de 40 millions de dollars», dévoile -t-il. Selon lui, en vue de la réalisation de ce projet, le gouvernement central avait sollicité sa participation en détenant quelques parts sociales. «Après cet accord-là, nous avions commencé avec le projet», précise Grobler, précisant qu’en 2014, le gouvernement a parlé à Africom commodities, pour la première fois, de manière générale, du Parc agro-industriel de Bukanga Lonzo.

Qu’est-ce qui a été convenu réellement? Réponse de Grobler: «Ils nous ont demandé si nous pouvions apporter notre assistance pour conceptualiser le projet, mais aussi leur donner des idées pour la faisabilité de ce projet pour la simple raison que nous comme Africom nous étions dans le secteur agricole, nous pouvions effectivement donner tout ce dont ils avaient besoin, que ça soit au niveau des matériaux, des pesticides, des insecticides jusqu’au niveau de la plantation même».

À cette fin, le gouvernement congolais avait jugé, selon le Sudaf, bon de dépêcher une délégation en Afrique du Sud, pour inspecter et vérifier ce que l’entreprise faisait déjà dans ce pays de Mandela. «C’est alors que nous avions entamé les négociations sur le projet Bukanga Lonzo -phase une et phase deux-», dit-il. Et d’ajouter: «le travail avait commencé aux alentours de mai 2014». Puis: «Quand nous nous sommes mis d’accord sur le montant du projet, le gouvernement a proposé le contrat que nous avions signé en 2015».

Grief de manque d’expérience rejeté

Sur le manque d’expérience et la naissance tardive de la société Africom, y compris le non-respect de la procédure de passation des marchés publics, Grobler balaye botte en touche, affirmant que sa société est un «groupe des sociétés» qui est opérationnel depuis les années 1960. Concernant le contrat, le patron d’Africom s’explique: «Avec le gouvernement congolais, il s’est agi d’un contrat de partenariat… Il n’y avait pas de passation de marchés».

Au sujet de la surfacturation des équipements telle que dénoncée par l’Inspection générale des finances -IGF-, Grobler évoqué la différence qui devrait être faite déjà en amont sur le prix des tracteurs en Afrique du Sud et en RD-Congo. Il avance ses chiffres. «Ce tracteur-là qui coûterait 25 mille dollars, c’est en Afrique du Sud, pas dans la ferme de Bukanga Lonzo, ici en République démocratique du Congo. Autre chose, le contrat avec le gouvernement était un projet, donc le tracteur que nous avions livré à 45 mille dollars au gouvernement comprenait une transaction avec une bonne garantie, la maintenance,…».

Donc tous frais et toutes charges compris. Grobler ne se limite pas là. Selon lui, la raison d’être de ce projet et de cette facturation est que, dans un investissement agricole en République démocratique du Congo, les ingénieurs pour réparer et suivre de près la maintenance, garantie par la société, de tous ces équipements devraient venir d’ailleurs. «Ce sont des ingénieurs qui venaient d’Allemagne, d’Afrique du Sud ou des États-Unis qui pouvaient réparer ces tracteurs, sur le plan local il n’y avait personne qui pouvait les réparer… Sinon comment est-ce que nous devrions assurer la pérennité du projet?», interroge-t-il, affirmant que c’était ça la raison d’être de ce contrat. «Il n’y avait pas de passation de marchés», insiste-t-il.

Démenti formel

Tout en rejetant les allégations de l’Inspection générale des Finances, l’administrateur du groupe Africom commodities évoque la raison du débâcle du projet Bukanga Lonzo et dit avoir investi plus de 30 millions de dollars dans ce projet. «Nous avons payé tout le monde pour que ce projet soit opérationnel, y compris les employés du gouvernement», note-t-il, relevant que Africom ne détenait que 30% des parts du projet Bukanga Lonzo, 70% revenaient à l’État RD-congolais.

Selon lui, «Africom n’avait aucune raison d’abandonner le projet après avoir investi des telles sommes d’argent». Entre février et mars 2016, Africom avait officiellement signifié au gouvernement, actionnaire majoritaire, qu’il ne payait plus ses parts. «Nous étions des actionnaires minoritaires, nous payions nos factures, le gouvernement ne payait pas», dénonce-t-il, rappelant que le dernier paiement effectué par le gouvernement RD-congolais avait eu lieu en février 2016. «Entre septembre et octobre 2016, Africom avait écrit au Président de l’époque, sollicitant son implication pour que la situation soit décantée, malheureusement, nous n’avons jamais reçu gain de cause», raconte-t-il.

Prétendue implication de Matata Ponyo

Au sujet de l’implication présumée de l’ancien premier ministre Matata Ponyo, Christo Grobler rigole en apprenant que lui et l’actuel sénateur se seraient distribués l’argent dans un restaurant en Afrique du Sud. «Vous savez, c’est vraiment amusant. Premièrement, personne ne m’a jamais demandé d’aller prendre de l’argent chez le premier ministre Matata ou quoique ce soit. C’est au travers de la presse que j’ai appris tout ça», réagit-il. À en croire Grobler, avec la rigidité du système bancaire sud-africain, toute transaction financière irrégulière est d’office vouée à l’échec. «Si nous avions reçu les 280 millions de dollars, je pense que le pays, surtout la ville de Kinshasa, ne serait pas comme elle est aujourd’hui. Tout ce qui est produit alimentaire allait diminuer de moitié››, regrette-t-il.

Concernant les études préalables qui n’auraient pas été faites sur le sol de Bukanga Lonzo, étant agriculteur, Christo Grobler fait savoir qu’il n’existe pas de sol magique. Au vu de son immensité, ce projet gouvernemental avait des bonnes perspectives, mais hélas! «Bukanga Lonzo n’était peut-être pas le meilleur sol du pays mais dans l’agriculture il n’y a pas de terre extraordinaire», explique Grobler avant de conclure: «Avec la technologie aujourd’hui, toute terre peut être fertile. C’est ce qui est fait en Afrique du Sud». Des explications techniques venues remettre en cause les conclusions du rapport IGF sur Bukanga Lonzo.

Natine K.

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