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Maguy Kalombo: «Dans notre pays, les artistes sont délaissés pour compte»

Elle est polyvalente. C’est ainsi qu’elle joue tantôt le rôle d’actrice comédienne, metteure en scène et assistante à l’Institut national des arts -INA. Maguy Kalombo, puisque c’est d’elle que nous parlons est mariée et mère. Dans un entretien avec «AfricaNews», elle évoque les contraintes liées à son métier. «En RD-Congo, plus précisément à Kinshasa, on a du mal à se retrouver dans ce métier parce que la prise en charge ou mieux la politique culturelle n’existe pas», explique-t-elle, demandant au gouvernement à y penser. Elle regrette du fait que la plupart des femmes abandonnent le métier une fois mariée. Interview.   

Combien d’années avez-vous faites dans la comédie?

J’ai commencé le théâtre en tant que professionnelle au sein de l’Ecurie Maloba en 1994, alors que je venais de décrocher mon bac à l’Institut des arts du spectacle, qui est au fait, l’Ecole d’application de l’INA. Donc, aujourd’hui, je totalise 27 ans de carrière professionnelle au théâtre.

Comment arrivez-vous à tirer profit de votre métier?

En RD-Congo, plus précisément à Kinshasa, on a du mal à se retrouver dans ce métier parce que la prise en charge ou mieux la politique culturelle n’existe pas. Déjà notre métier de comédien n’est pas valorisé. Le ministre de la Culture, chez nous, n’arrive pas à satisfaire les besoins des artistes faute du budget qui lui ai alloué, qui est insuffisant. Mais au-delà de tout cela, la volonté de mettre en place des structures de recherche de fonds pour les artistes n’existe pas. On peut dire qu’on ne vit pas absolument de notre métier comme il se doit. Néanmoins, nous arrivons à subvenir à nos besoins grâce à ce que nous appelions «le Zonzing», un système de création et de participation dans des petits marchés d’àcôté, de prendre part à des projets connexes: publicité, pose de voix, participation dans des séries tv ou films, etc. ou carrément faire le commerce pour essayer de joindre les deux bouts du mois.

La plupart des femmes échouent dans ce métier. Comment vous en sortez-vous?

Oui, je l’affirme, le métier de comédien est très difficile pour la femme comme partout ailleurs. Quand on est femme, il faut juste savoir exactement ce que l’on fait et où l’on va en tenant compte des obstacles divers liés à la famille, au mariage, à la maternité… mais surtout aux harcèlements. Ce sont des pratiques qu’on rencontre dans touts les corps de métier. Et, pour s’en sortir, il faut juste savoir se battre et s’imposer dans ce milieu dominé par la gente masculine. Il faut juste mettre en confiance son conjoint, car la plupart des femmes abandonnent le métier une fois mariée vu que certains hommes ne supportent pas voir leurs épouses s’exposer à la télévision ou sur une scène de théâtre. Il faut aussi de la rigueur et savoir se faire respecter par son comportement.

Un constat montre que la plupart des spectacles de théâtre ou films RD-congolais sont sponsorisés par les étrangers. Qu’en pensez-vous?

Les sponsors RDcongolais ne s’intéressent qu’à la musique. Avec le cinéma et le théâtre, c’est compliqué. Dans le temps, il y avait des structures étrangères qui finançaient les productions théâtrales et cinématographiques mais, aujourd’hui, les politiques ont complètement changé. Plus de financement. Les artistes qui évoluent dans ces secteurs, sont obligés de mendier par-ci par-là pour créer ou produire nos œuvres artistiques. Nous n’avons pas de moyens pour créer une vraie industrie cinématographique à l’instar de la Côte d’Ivoire et du Sénégal où les gouvernements essayent aujourd’hui de s’impliquer activement dans la culture. Car, ils ont compris que le cinéma est une vraie vitrine pour la promotion des patrimoines culturels, traditionnels et des valeurs d’un pays. En RD-Congo, nous sommes encore très loin malgré les efforts d’acteurs et opérateurs culturels.

Comment conciliez-vous l’assistanat à l’INA et votre métier d’actrice?

Cela se passe très bien du fait que j’évolue toujours dans mon domaine. A l’INA, je forme les jeunes qui aspirent au métier. C’est vraiment passionnant. Etant comédienne, je continue à jouer et à monter des spectacles parce que je suis aussi metteure en scène. Je me passionne beaucoup à la formation des jeunes pour assurer la bonne relève. Malheureusement, les jeunes filles ne sont pas nombreuses.

Pensez-vous qu’un jour les acteurs RD-congolais et l’industrie de production arriveront à avoir une renommée au niveau de Hollywood?

L’espoir fait vivre. Il faut que nos autorités nous accompagnent. La RDCongo regorge de multiples talents et atouts artistiques mais les moyens et les infrastructures manquent pour un meilleur rendement.

Pouvez-vous nous citer quelques films et pièces de théâtre dans lesquels vous figurez?

Il y en a beaucoup. Mais je vais vous citer quelques-uns. Coté cinéma, il y a entre autres, «Le calvaire» réalisé par Austin Kashala; «Le cœur d’Afrique» par Tshoper Kabambi; «Alone in Strange world» par Joël Sansi; «M’pangi’ami»; «Amour à 200 m»; «La femme du pasteur est ma rivale». Pour le théâtre, je vais citer «Bongolatrices» dans une mise en scène de Iria Diaz en Suisse; «Transes infernales» mise en scène de Maguy Kalomba; «Te voir dressé…» mise en scène de Maguy Kalomba; «Nazali Kinshasa» mise en scène de Michel Faure en Suisse; «Nazali lokola yo» mise en scène de Michel Faure en Suisse; «Une saison au Congo» mise en scène de Norbert Viminde, assisté par Maguy Kalomba au Théâtre national congolais et «La tragédie du roi Christophe» mise en scène de Norbert Viminde.

Propos recueillis par Ketsia EKALA IFOLE

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