«Le décès du père de la céramique RD-congolaise moderne est une énorme perte pour l’académie des Beaux-arts de Kinshasa. Il est vrai que nous souffrons dans nos cœurs mais cette souffrance est incapable de nous faire oublier tous ces moments merveilleux qui nous avons eu à passer avec Me Bamba. Ces propos sont du Professeur Henri Kalama Akulez, directeur général de l’Académie des beaux-arts de Kinshasa, contenus dans l’oraison funèbre prononcé au cours de la séance académique organisée dans l’enceinte de l’ABA, samedi 4 février dernier, en présence des corps enseignant, scientifique… de différentes personnalités et des membres des membres de famille de Maître Bamba Ndombasi, un des pères de la céramique RD-congolaise moderne, décédé le 23 février dernier à l’âge de 80 ans.
Enseignant à l’Académie des beaux-arts de Kinshasa, Maître Ignace Bamba Ndombasi Kufimba, céramiste de renom, a été inhumé dimanche 5 mars à la Nécropole Entre terre et ciel après des obsèques émouvantes organisées en sa mémoire. D’abord, une séance académique organisée en sa mémoire juste après la levée du corps de la morgue de la Clinique Ngaliema. Une cérémonie qui a connu la présence non seulement de la grande communauté de l’ABA mais aussi celui artistique venue de différentes institutions. Le Professeur Bamba a donc droit aux hommages dignes.
Ce qui a impressionné même sa famille biologique qui, finalement, a compris que le céramiste n’appartenait plus qu’à sa famille mais plutôt à la nation RD-congolaise. Un patrimoine national. Pour le Professeur André Yoka Lye Mudaba, directeur général de l’Institut national des arts -INA- où Me Ignace Bamba a passé une douzaine d’années en qualité de secrétaire général académique -un recors depuis la création de l’INA-, l’illustre disparu avait un mélange de sagesse bantou, une rationalité cartésienne. Une séparation que rend compte l’Association congolaise des artistes plasticiens -ACAP-, conduite par Me Alfred Liyolo qui invite chacun à préserver cet héritage abondant légué par Mee Bamba. «Me Bamba a pratiqué son art et a enseigné plusieurs générations. Cet atelier -céramique- est devenu orphelin d’un de ses pères, mais nous pouvons se consoler de savoir que la mort n’est qu’un déplacement de l’individualité… Le décès du père de la céramique RD-congolaise moderne est une énorme perte pour l’Académie des beaux-arts de Kinshasa.
Il est vrai que nous souffrons dans nos cœurs mais cette souffrance est incapable de nous faire oublier tous ces moments merveilleux qui nous avons eu à passer avec Me Bamba», a reconnu le Prof Henri Kalama, DG de l’ABA dans son oraison funèbre. Puis: «En dépit de son âge, il était -Me Bamba- actif, répondant chaque fois que cela était nécessaire à ses obligations professionnelles et sociales. Pour preuve, le professeur Bamba présent lors de la cérémonie d’échange de vœux, lundi 20 février dernier dans notre salle de promotion. Qui d’entre nous auraient pu imaginer que c’était sa dernière participation à une manifestation regroupant toute la communauté de l’ABA. Ce jour-là, avant de monter sur l’estrade, il a salué l’assistance, une fois sur l’estrade, il a encore salué l’assistance. Personne alors ne s’est réalisé que par ce geste, le grand-père, le père, l’artiste, le maître, l’écrivain, le critique d’art nous disait au revoir».
L’éclatement du talent
Auteur de plusieurs publications entre autres «Initiation à l’art zaïrois d’aujourd’hui», parue en 1973; «Anthologie de sculpteur et peintre zaïrois contemporain», en 1987; «Art plastique congolais: itinéraire et tendance», en 1998; «Nshole, le peintre du terroir Mai-Ndombe », en 2008; «Critique d’art et expérience de l’AICA/RD-Congo couvrant la période de 1972 à 1992», en 2009. Né le 2 février 1937 à Kimpongo Nsona, dans la province du Kongo Central, Bamba Ndombasi Kufimba a fait ses études primaires chez les Pères Jésuites dans l’actuelle province du Kwango avant de s’inscrire au Collège Notre Dame de Mbansa Boma où il opta pour les humanités latines. Le talent d’artiste coulant dans ses veines, Bamba Ndombasi a été orienté par les autorités de ce dernier établissement scolaire, après l’avoir découvert, à l’Ecole Saint Luc, qui deviendra plus tard l’Académie des beaux-arts. Là, il va décrocher deux diplômes: un en technique professionnelle en céramique avec mention grande distinction et un autre de capacité en enseignement de dessin avec la même mention. Cela a jalonné son parcours scolaire, académique et professionnel.
Gradué en Art plastique, option céramique de l’Institut supérieur des arts plastiques en 1972 avant d’obtenir une licence, en 1998, à l’Université chrétienne Cardinal Malula. Sans pour autant le souhaiter, Maître Bamba a débuté sa carrière d’enseignant, en 1960, juste après le départ précipité des colonisateurs belges, à la suite des troubles politiques qu’a connu le pays. Et Ignace Bamba finit par remplacer un enseignant belge à l’Institut des Beaux-arts de Kinshasa. En 1967, il est nommé chargé des pratiques professionnelles à l’Institut supérieur des arts plastiques, actuelle ABA. Depuis, le père de la céramique RD-congolaise moderne est resté toujours attaché à la formation des étudiants jusqu’au moment où il a tiré sa révérence. En tant qu’artiste, Me Ignace Bamba a participé à plusieurs expositions au pays comme à l’étranger. Partout où il est passé, l’artiste a laissé des bonnes traces. Un des lauréats du «Prix national du mérite de la culture et des arts», le Prof Bamba a été élevé, de son vivant, au grade de Chevalier de l’ordre des héros Mzee Kabila, Patrice Emery Lumumba. Vive l’artiste!
Patrick NZAZI
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