Après l’affaire Vital Kamerhe, dont le procès est arrivé à la deuxième audience lundi, un bond en avant est en train de se produire en matière de transparence des politiques et de lutte contre la corruption.
Retour sur ces contrats et paiements à l’origine de l’instruction judiciaire en cours à la prison de Makala. L’affaire Kamerhe est sur le point d’engendrer un énorme retentissement politique. Et pourquoi pas une loi de transparence de la vie publique. Alors que s’est tenue lundi la deuxième audience du procès du Directeur de Cabinet du Président de la République pour détournement présumé de deniers publics, les conséquences risquent de se faire sentir pendant longtemps au sommet du pouvoir.
Les effets risquent d’être terribles. La Présidence de la République, celle dont l’administration est chargée de promouvoir la bonne gouvernance, pourchasser la fraude et la corruption, est présentée comme le haut lieu de détournement. Devant ses juges, Kamerhe demande à l’accusation de démontrer, sur base des pièces probantes, comment il a pu détourner 48 millions de dollars destinés à la construction des logements sociaux. Le Directeur de Cabinet décline toute responsabilité. Pourtant, des paiement ont été effectués par des ministres de la République et le caissier de l’État, la Banque centrale du Congo, pour un contrat et un avenant signés par un autre ministre de la République! Mais qui a donc fauté? Alors que Kamerhe plaide non coupable, clame son innocence et continue d’affirmer qu’il agi au nom du Président de la République dont il est encore le Directeur de Cabinet, pas besoin d’une prophétie pour dire que les ministres et les autres mandataires publics conviés à la barre dès le 3 juin ont presque tous un argument en béton armé: «nous étions tous démissionnaires et des simples exécutants à l’époque des faits». Question: parce qu’il n’y avait pas un gouvernement, qui a géré la République au quotidien et au nom de qui?
La réponse est connue. Pendant près de huit mois, le pays a été dirigé depuis la Présidence de la République, pour le compte de l’Institution «Président de la République», garant du bon fonctionnement de toutes les institutions.
Comment dès lors laisser la République faire un procès à un individu qui a opéré pour le compte du garant du bon fonctionnement des institutions de la République? Le Directeur du Cabinet du Président de la République est-il comptable de sa gestion? Lui appartient-il de faire des vérifications d’usage face à un contrat engageant la République ou un paiement destiné à honorer ce contrat? Le procès Kamerhe ne serait-il pas le procès du Président Félix Tshisekedi qu’on voudrait subtilement accuser d’avoir lancé son programme d’urgence pendant que le pays n’avait pas un gouvernement en vue de favoriser la chienlit? Bien malin qui saurait y répondre avant le verdict du tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe.
Pour rappel, dans un communiqué lu le vendredi 25 janvier 2019 à la télévision publique, le Président Félix Tshisekedi, par la voie de son Directeur de cabinet, Vital Kamerhe, a annoncé la suspension des dépenses publiques et des recrutements au sein des instituions étatiques.
«Aux membres du gouvernement et dirigeants des entreprises, établissements ainsi que des services publics de l’État, à dater de ce jour jusqu’à nouvel ordre, les recrutements et les mises en place du personnel sont suspendus», a dit ce communiqué.
«Il en est de même des engagements et liquidations de dépenses autres que celles liées aux charges du personnel. Les cas exceptionnels sont soumis à l’autorité préalable de son excellent monsieur le Président de la République», a-t-il ajouté.
Voici qu’au cours d’un récent Conseil des ministres, ce communiqué a été évoqué pour demander aux ministres de la République de ne pas prendre certains actes de disposition leur reconnus par la Constitution.
AKM