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Luzolo Bambi formule deux requêtes pour renforcer l’Etat de droit

Dans l’optique de promouvoir l’Etat de droit en RD-Congo, Luzolo Bambi a formulé deux requêtes. Voilà pourquoi il a tenu mordicus, mercredi 2 mars dernier, à éclairer la presse sur deux questions, à savoir: le dossier relatif au juge naturel de l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo et l’état de siège encore en vigueur dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu. «Dans un Etat de droit, il n’y a pas d’intouchables. Dans un Etat de droit, il n’y a pas de vide juridique», a-t-il souligné devant les professionnels des médias. Dans l’entendement de cet ancien ministre de la Justice, l’état de siège doit être maintenu dans les deux provinces tout en ajoutant une dose de justice transitionnelle. Ces deux requêtes portent sur le fait que personne ne doit se dire être intouchable dans un Etat de droit et l’instauration d’une justice transitionnelle dans les provinces sous état de siège.

Devant la presse, Luzolo Bambi Lessa s’est exprimé essentiellement sur deux dossiers. Le premier portait sur la question relative au juge naturel de l’ancien premier ministre Augustin Matata Ponyo, qui est toujours dans le viseur de la Justice même si la Cour constitutionnelle s’est déclarée incompétente pour le juger dans le cadre du Projet Bukanga Lonzo. «Pour certains juristes de renom, dans le contexte actuel, un ancien premier ministre ne peut pas être poursuivi en République démocratique du Congo, faute de juge naturel. D’où, la théorie du vide juridique qu’ils évoquent», a-t-il expliqué avant de rejeter carrément et avec force ce point de vue rejeté.

«Il n’y a pas d’intouchables dans un État de droit. Dans un Etat de droit, il n’y a pas de vide juridique», a martelé ce juriste de renom de la tolérance zéro. Et de poursuivre: «tout le monde est redevable devant la justice. Les tenants de la thèse du vide juridique ne rentrent pas dans l’esprit d’un État de droit. Autrement dit, peut-on considérer que le Président de la République connaisse son juge naturel et que quiconque après n’ait pas de juge naturel? Peut-on comprendre cela? Il appartient à la justice de s’assumer en donnant une réponse simple à la population. Nous sommes un État de droit, et dans un État de droit, il n’y a pas d’intouchables».

L’ancien ministre de la Justice a fait savoir que la réponse sur l’identité du justiciable de chaque citoyen RD-congolais est à trouver au niveau du Palais de la justice. «Et alors qui est le justiciable de chaque citoyen RD-congolais qu’il soit ordinaire ou qu’il soit bénéficiaire du privilège de juridiction? La réponse se trouve de ce point de vue là au Palais de justice. Et ce type d’interpellation lorsqu’il n’y a pas de réponse c’est vrai que ça gêne et la population peut se plaindre, je comprends cette plainte là. Mais j’exhorte les magistrats à travailler et à encourager l’esprit de l’État de droit en faisant en sorte qu’en RD-Congo, toute personne n’échappe pas au droit congolais, n’échappe pas à la justice congolaise et que tout Congolais, qu’il soit citoyen ordinaire, qu’il soit une autorité politique quelconque puisse connaître son juge naturel», a martelé l’ancien patron de l’opération Tolérance zéro.

Avec la volonté politique affichée par le Chef de l’État Félix-Antoine Tshisekedi, a-t-il renchéri, il y a lieu de croire en la justice et à son efficacité. Faut-il espérer ou pas à l’Etat de droit? A cette question, Luzolo Bambi a été affirmatif avant de préciser: «oui, de toutes les façons on n’a pas de choix. Il faut espérer parce que la volonté politique y est, largement exprimée par le président de la République. Il y a de l’espoir parce que la volonté politique est clairement exprimée et le contexte politique est clair: une forte attente de la population et des dirigeants pour aller de l’avant. Je pense que notre justice n’est pas condamnée, elle est à même de pouvoir fonctionner, il faut la mettre en ordre de bataille avec les armes qu’il faut et elle donnera les résultats escomptés, et c’est possible maintenant».

Ancien juge à la Cour constitutionnelle, il a appelé les magistrats à faire un effort pour répondre aux attentes de la population en s’inscrivant dans l’esprit de l’avènement de l’État de droit. Abordant le deuxième dossier relatif à l’état de siège décrété au Nord-Kivu et en Ituri pour mettre fin à l’activisme des groupes armés qui dure depuis des décennies, ce pénaliste et criminologue de formation a rejeté la position de ceux qui pensent qu’il faut lever l’état de siège. Pour lui, il faut maintenir l’état de siège dans les deux provinces parce qu’il estime que cette mesure exceptionnelle est une réponse de gouvernance sécuritaire.

«Il faut maintenir l’état de siège. Pourquoi? Parce que les raisons qui ont milité à son institution n’ont pas encore disparu certes, mais ce n’est pas ça simplement la raison. La raison c’est justement le contexte de notre pays, le contexte politique et sécuritaire par rapport à la paix, par rapport aux droits de l’homme. Depuis 25 ans, les différents conflits armés que nous connaissons dans notre pays ont occasionné de nombreuses pertes en vies humaines. Quelles ont été les réponses de toutes ces tueries? J’ai toujours salué le décret de l’état de siège parce qu’en le décrétant, l’État congolais a donné une première réponse de gouvernance sécuritaire de manière à restaurer l’autorité de l’Etat», a indiqué Luzolo Bambi Lessa.

«Depuis que l’état de siège a été décrété, les groupes armés qui continuent à sévir dans notre pays, n’ont pas jusque-là été poursuivis, du moins leurs auteurs directs et indirects. Ils n’ont pas été poursuivis judiciairement. On n’a donc pas senti la riposte de la justice à travers l’état de siège. L’état de siège a sécurisé, il faut compléter cet état de siège par une politique de justice transitionnelle, tout en maintenant l’état de siège», a-t-il suggéré. En cas de la levée de l’état de siège, le Professeur Luzolo Bambi propose comme alternative, l’instauration d’une véritable politique de justice transitionnelle.

Puis: «Ceux qui exigent la suppression de l’état de siège, proposent quoi comme alternative? Dans le cadre de l’État de droit, la meilleure alternative, on n’a pas le monopole de la vérité, c’est l’institution d’une politique de justice transitionnelle véritable. Ça signifie qu’on stoppe l’état de siège, on entre dans tous les 5 volets de la justice transitionnelle».

Pour lui, on doit mettre en place en Ituri ou au Nord-Kivu une commission vérité-réconciliation. Dans son entendement, il est aussi important qu’on organise des poursuites judiciaires contre les auteurs directs et indirects, des procédures de réparation pour les victimes et que le gouvernement prenne les mesures des réformes pour que les choses se déroulent de manière telle que ces tueries ne se répètent plus. Et de conclure: «donc en un mot, ce n’est pas un débat émotionnel, c’est un débat d’État. État de siège c’est gouvernance militaire. Je souhaite donc que les autorités du pays, en particulier Son Excellence Monsieur le président de la République et le gouvernement mettent en place une politique de justice transitionnelle en accompagnement de l’état de siège que je soutiens», a suggéré le Professeur Luzolo Bambi.

Dorian KISIMBA

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