Société

Le commerce de la braise achève les forêts et savanes du Kwango

La déforestation et l’agriculture sur brûlis sont les deux facteurs majeurs du changement climatique en RD-Congo. Dans la nouvelle province du Kwango, les savanes de Lundalu, Munzimba et autres sont chaque jour dépouillées de leurs richesses par les commerçants des braises. Les ONG et la Société civile de la province appellent le gouvernement central à la rescousse. Ça urge!
La question d’énergie domestique reste encore une préoccupation majeure en RD-Congo. Dans la partie Ouest, précisément dans la province du Kwango, cette situation engendre des multiples conséquences. Cette province pointe en ce jour comme le grand fournisseur des braises à Kinshasa. Sur la nationale n°1, plusieurs camions bourrés de sacs de makala -braises- font des aller et retour.
«Les makala fabriqués dans notre province sont de bonnes qualités. Ils durent longtemps», a commenté Noël Mboso, fabriquant des makala et vivant près le village de Kafulu. Dans cette province disposant des vastes étendus de terre et savanes, les activités économiques sont quasi inexistantes. Pour tenir les deux bouts, les habitants sont obligés de recourir à la forêt… et la déforestation s’accélère. Du coup, toutes les forêts et brousses, partant des secteurs de Bukanga-Lonzo et Dinga en passant par Kobo dans cette province, ont perdu de leur patrimoine forestier. Tous les arbres ont été transformés en makala, vendus à Kinshasa.
«La croissance effrénée de la consommation de la braise ou charbon des bois par les ménages kinois cause préjudice à l’environnement local qui subit des conséquences très divers», a ajouté Gaspard Landu, un membre de la Société civile locale, qui est d’avis que cette consommation accroit la déforestation des axes éco-géographiques de la province.
Question de survie
Interrogés sur les connaissances des conséquences de la déforestation, les autochtones ont affirmé qu’ils en sont conscients. Ils en sont même préoccupés. «Nous connaissons le danger de cette déforestation, mais exploiter la braise est pour nous une question de survie. Nous scolarisons nos enfants avec les revenus issus de cette activité, et autres charges, en tant que responsable de la famille, sont satisfaits par ce commerce», a déclaré Jean Ibangala, l’un des exploitations de la braise qui affirme produire près de 100 sacs par commande et gagner 150 voire 200 milles FC. Cette activité est exercée par tout le monde dans certains villages, tels que Makengo, Kinzwanga, Kibombo, etc. Elle est également parrainée par les chefs coutumiers.
Si les forêts et savanes commencent à céder la place à la steppe, la rareté des gibiers, insectes comestibles et des légumes inquiètent les habitants. «Autrefois, on trouvait tous dans ces forêts. Aujourd’hui, elles sont vidés des animaux et sont restées stériles sans rien», s’est plaint Théophile Zamana, ingénieur environnementaliste. Avec la pauvreté qui s’installe, les populations sont presque contraintes à l’exode vers les grandes cités de la province notamment Kenge, Kwango, Popokabaka ou Kolokoso. «Ces cités font déjà face à la pauvreté, au chômage des jeunes. Cette situation est dangereuse dans l’avenir. Elle risque d’exacerber le niveau de l’insécurité», s’est inquiété Baudouin Ntelo, agent à la sous-division de l’Enseignement secondaire au Pont Kwango.
Ça urge!
Les ONG locales et la Société civile appellent les autorités provinciales à la rescousse en vue de mettre fin à cette pratique qui appauvrit la province. Elles suggèrent le contrôle de l’agriculture familiale, le développement d’autres activités génératrices des revenus notamment la pèche et l’élevage. En effet, la province ne vit que des impôts, mêmes ceux payés par les producteurs des makala. Aruna Sefu, ingénieur en développement rural, a proposé la formation professionnelle, la sensibilisation et la vulgarisation aux dangers de cette activité. Il a demandé aux autorités provinciales de penser aux énergies renouvelables, couplées au reboisement. «La création des emplois et le rétablissement du tissus économique pourraient atténuer la production de la braise et ralentir la déforestation non seulement au Kwango mais sur toute l’étendue du territoire national». Alors que la province n’est pas desservie en courant électrique, l’ingénieur Aruna Sefu a également proposé la construction des infrastructures hydro-électriques.

Gautier IMBENI, de retour de la province du Kwango

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