Il y a cinq ans apparaissait la Commission d’intégrité et médiation électorales -CIME-, institution interconfessionnelle qui a pour missions de prévenir les conflits électoraux avant, pendant et après les élections, et le cas échéant, gérer et résoudre ces conflits à travers la médiation, mais aussi contribuer à assurer l’intégrité du processus électoral. Dans un écart volontaire éloquent, feu Abbé Apollinaire Malumalu, ancien président de Commission électorale nationale indépendante -CENI-, l’appelait cime en septembre 2014, lors de sa sortie officielle dans la célèbre salle de conférence du Centre interdiocésain catholique à Kinshasa-Gombe, allusion faite au sommet des arbres, au pic des montagnes, ce qui suppose l’excellence.
Tout un défi pour cette jeune organisation née en une mer électorale très agitée. Tout une mise à l’épreuve pour les bonzes des Confessions religieuses. Aujourd’hui, la CIME a louablement fait sa part dans cette paix constatée après la première alternance démocratique en RD-Congo.
Cependant, à en juger les faits qui laissent entrevoir une démocratie aussi fragile que vacillante, teintée de corruption et surtout d’un patriotisme discutable des certains parmi les principaux acteurs de la scène politique, le travail de la CIME reste encore entier. Plus qu’hier, la RD-Congo a besoin de son implication, à côté d’autres organisations et personnalités mues par le même attachement au bien-être des RD-Congolais, dans l’accompagnement du processus démocratique.
L’on apprenait, il y a quelques jours, que les Chefs des Confessions religieuses, membres de la CIME sont en pleine élaboration de leur plan d’action stratégiques. Ce plan, selon les infos venues de la CIME, est principalement axé sur la paix et la démocratique, deux domaines qui sous-entendent, entre autres, la justice et la bonne gouvernance.
Voilà qui colle parfaitement avec une autre démarche menée par les religieux qui, du reste, brillent particulièrement par l’imperturbable cohésion entre les communautés chrétiennes et la communauté musulmane. Le samedi 4 mai dernier, ils ont mis en place un cadre de collaboration entre la CIME, d’un côté, et les élus membres du clergé et les laïcs impliqués dans la vie des communautés religieuses. Cette nouvelle plateforme née sur les collines de Mont-Fleuri compte dans son noyau de départ des députés nationaux comme les Florentin Lebe Mupiya et les Déo Nkusu de l’Eglise Kimbanguiste, les Moussa Kalema de la Communauté islamique au Congo, des députés provinciaux dont Godé Mpoyi, pasteur de l’Eglise de Réveil, président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa, et son collègue Roger Bimwala de l’Armée du Salut, sans oublier le sénateur Monseigneur Kapia, membre de la CIME.
Il y a du changement dans l’air, dirait l’autre. «Nous ne devons pas seulement nous arrêter à annoncer et dénoncer pour faire renoncer. Mais aujourd’hui, l’Eglise se souvient qu’elle reste un acteur de développement à part entière. C’est pour cela que les pères de l’Eglise ont créé ce réseau par lequel nous pouvons échanger et voir dans quelle direction nous pouvons regarder ensemble pour faire corps avec la République afin qu’elle aille de l’avant», souligne le pasteur président de l’assemblée provinciale de Kinshasa. Et son idée est partagée par le musulman Moussa Kalema: «Nous allons faire la politique comme on le faisait à l’époque. Il y a eu des rois comme David, comme Salomon,… tous étaient des hommes de Dieu. Ils ont travaillé pour le bien de leurs peuples».
Principal leitmotiv de cet engagement: la moralisation de la vie politique en RD-Congo. Les multiples dénonciations, avérées ou pas, de corruption, le coulage des recettes de l’Etat, le détournement, etc. sont autant des maux qui bloquent le développement du pays. La CIME et les élus membres de la plateforme partagent la même vision des choses. «En mettant les valeurs morales et éthiques, en luttant contre les antivaleurs de toutes sortes, je crois que la RD-Congo peut se relever», soutient le député national Kalema. Et pour Godé Mpoyi: «L’Eglise ne doit plus être à la traine. Elle doit s’impliquer dans la gestion publique… Il n’y a plus de valeur dans ce pays. Ensemble, nous allons transformer non seulement la ville de Kinshasa, mais toute la RD-Congo».
L’Eglise est la vraie base…
De son côté, le député provincial Roger Bimwala, recteur de l’université William Booth, estime que la plateforme créée devra permettre à faire la politique autrement. «L’Eglise pourra peser à sa juste valeur, parce que c’est elle au fait qui devient la vraie base dans notre pays, cette base qui est constituée à 80% des gens qui croient en Dieu, qui vont confesser, qui prient et qui aimeraient voir s’installer un ordre nouveau, qui respecte les valeurs religieuses que nous confessons et qui sont là aussi pour la justice sociale, l’équité, la redistribution, la lutte contre la corruption, etc.». Et d’expliquer: «faire la politique autrement c’est mettre la dimension spirituelle dans tout ce que nous faisons. Et cela nous le disons à haute voix! Il faut tenir compte de cet échange qui devra permettre aux élus d’être nourris par leurs pères spirituels et d’être redevables auprès des Confessions religieuses. Souvent, on rompt les liens, une fois élus, et on n’a plus de compte à rendre. Nous nous pensons qu’en étant élu et membres des Confessions religieuses, nous avons aussi des compte à rendre vis-à-vis de nos communautés religieuses».
A en croire ce candidat malheureux au gouvernorat kinois, le but de cette dynamique est d’avoir un cadre de concertation très large, qui devra réunir les élus qui sont soit religieux, soit des élus laïcs investis dans le travail au sein des communautés religieuses et cela, en synergie avec les pères de l’Eglise.
La CIME vient là de se doter d’un excellent outil qui lui permettra d’agir utilement, notamment à travers de plaidoyer et autres mécanismes, afin de contribuer à la promotion d’une gouvernance qui mette le bien-être du peuple, la paix social et le développement de la RD-Congo au-dessus des intérêts mesquins des individus. A elle d’en assurer la vie et le bon usage. Sinon, elle gâcherait une belle occasion de servir le pays.
HRM