Interview

Me Kondo: «L’UDPS n’a pas peur des élections en 2023 mais…»

Me Didier Kondo Pania est avocat au Barreau de Kinshasa-Gombe en RD-Congo et au Barreau de Québec au Canada. Il est le porte-parole des 4 Interfédérales de l’Union pour la démocratie et le progrès social -UDPS/Tshiskedi. C’est dans cette dernière casquette qu’il a accordé une interview à «AfricaNews» au cours de laquelle il a déclaré: «Nous n’avons peur d’affronter les élections en 2023, mais nous tenons au respect de certaines conditions afin que ces élections soient organisées dans les bonnes conditions». Il soutient les réformes électorales, la révision de la Constitution et l’identification de la population. Me Didier Kondo partage l’avis de Noel Tshiani de voir une incise insérée dans la Constitution et la loi électorale selon laquelle «le candidat Président de la République doit être de père et de mère RD-congolais».  

Quelle est votre position par rapport aux élections de 2023 qui divisent les RD-Congolais au sujet des préalables liés aux réformes électorales, la révision de la Constitution et l’identification de la population ?

Depuis 1960, date à laquelle notre pays a accédé à l’indépendance et le dernier recensement organisé par Mobutu en 1984 à ce jour, on ne sait pas exactement, avec des vagues migratoires, des gens qui viennent du monde entier s’installent chez nous, qui est RD-Congolais véritable et qui ne l’est pas. Aujourd’hui, nous parlons de 80 ou 84 millions de RD-Congolais, nous nous basons sur quelle base puisque l’identification de la population n’a pas eu lieu.

Les familles RD-congolaises sont nombreuses comprenant 10 à 20 enfants. Nous ne pouvons pas avoir les mêmes chiffres qu’on avait en 1960 ou 1984. Pour bien répartir les sièges au Parlement, il faut connaitre le nombre exact de la population. Pour aller aux élections, la loi dit qu’il faut être RD-Congolais pour voter. Dès lors comment voulez-vous qu’on aille aux élections sans pour autant connaitre qui est RD-Congolais et qui ne l’est pas en restant dans les mêmes erreurs que les régimes passés? Nous devons très bien travailler en respectant les normes, à savoir les lois et règlements du pays. A peine j’ai appris que l’Office nation d’identification de la population -ONIP- venait d’acquérir le financement pour l’identification de la population et le problème ne pourra plus se poser.  

A vous entendre parler, vous faites de l’identification de la population un préalable pour l’organisation des élections?

De 1984 à ce jour ça fait 37 ans, pouvons-nous encore nous fier à ce récemment? Non! Il faut revoir les choses. S’agissant des réformes législatives notamment la Constitution, la loi électorale et la loi organique sur la CENI, nous nous demandons au nom de qui ces réformes doivent-elles être faites? C’est au nom du peuple RD-congolais. Quand est-ce qu’il faut le faire? c’est avec l’évolution du temps, quand les lois deviennent inefficaces, il faudrait les revoir.

Mais il ne faut pas de révisions qui se racontent dans la rue. Il existe un Parlement et un gouvernement en RD-Congo. Vous vous souviendrez lors du passage à Bunia, en Ituri, pour la toute première fois d’un Chef d’Etat RD-congolais, des journalistes français avaient interviewé le Président Félix-Antoine Tshisekedi sur les réformes électorales et sa réponse était claire, en faisant allusion à Martin Fayulu: ceux qui veulent des réformes doivent prendre place au Parlement pour soumettre cela. Si la procédure est suivie, rien ne s’opposera.

Comment réagissez-vous à l’appel à candidature lancé par les confessions religieuses au poste du Président du Bureau de la CENI que d’aucuns qualifient de précipité car les réformes électorales tant souhaitées ne sont pas encore réalisées?

Nos frères de la CENCO essaient un peu d’aller au-delà. Ils croient que lorsque les choses marchent, la loi est bonne et lors qu’elles ne marchent pas, la loi est mauvaise, il faut revenir. Ils sont les premiers à décrier la loi organique portant organisation et fonctionnement de la CENI et la loi électorale, et en même temps, sans chercher à obtenir ce qu’ils voulaient avoir en décriant ces lois-là ils se mettent à faire des propositions. Nous sommes en démocratie, c’est leur droit.

Ils ne sont pas à leur première forfaiture, ils avaient déposé la candidature de Ronsard Malonda pour entérinement à l’Assemblée nationale, il y a eu un tollé et le peuple n’en voulait. Tout est question de circonstance, du moment et surtout de l’intérêt général du peuple RD-congolais. N’anticipons pas des choses, laissons le Parlement et le gouvernement réaliser ces réformes.

Le Président de la République était le premier à soulever la question de la révision constitutionnelle pour ramener l’élection présidentielle d’un à deux tours. Selon vous, quel sera l’impact de ramener la présidentielle à deux tours?

Quand on parle d’un Chef de l’Etat, il s’agit d’une personne qui représente l’unanimité du peuple. Lorsque nous acceptons qu’il y ait un Chef de l’Etat élu au scrutin à un tour, ce n’est pas du tout très bien, parce qu’il peut se faire que comme il est le premier parmi tant d’autres, même avec 10 ou 20% il se trouve à la tête de cette élection. Il va être un Chef de l’Etat qui ne représente pas tous les RD-Congolais.

C’est la raison pour laquelle il est toujours mieux de revenir au système de scrutin à deux tours de telle sorte que si au premier tour aucun candidat n’a obtenu 51%, et que les deux premiers s’affrontent au second tour afin que le peuple puisse les départager en donnant la majorité à l’un d’entre les deux. Dans ce pays, il y a eu le scrutin à deux tours en 2006 et en 2011 pour satisfaire Joseph Kabila. Il fallait revoir la Constitution pour empêcher le 2ème tour pour éviter l’échec comme les siens qui étaient majoritaire à l’Assemblée nationale tenaient coûte-que-coûte le voir lui briguer encore le fauteuil présidentiel.

Voulez-vous insinuer par là qu’il s’agit d’une Constitution taillée sur mesure et qui nécessite absolument une révision?

Affirmatif! C’est pourquoi nous devons absolument revenir à un scrutin à deux tours, ce qui appelle à une révision.

N’est-ce pas le travail du Parlement?

Ce sont les parlementaires qui joueront le rôle de constituant et n’oubliez pas qu’il faudrait interroger par la voie référendaire le peuple. Tout cela prend du temps. Il faut que chacun fasse son travail. Pourquoi Emile D. et Auguste Compte? c’est pour donner lieu à l’efficacité, à la satisfaction dans le sens du bien parce que si tout le monde doit faire tout, il n’y aura plus du sérieux dans ce que les gens font.

Que répondez-vous à ceux qui accusent l’UDPS de jouer le jeu du glissement en 2023 en se cachant derrière les réformes électorales et l’identification de la population?

L’UDPS n’a pas à recevoir des leçons de n’importe qui. Il n’y a pas si longtemps, en 2016, le PPRD-MP avait glissé. Au lieu d’organiser les élections en décembre 2016, il les a organisées en décembre 2018, soit deux ans de glissement. L’a-t-il fait dans l’intérêt du peuple RD-congolais? Non parce qu’il y a eu des marches et la répression a été sanglante. L’UDPS n’est pas comme le PPRD-MP. Nous sommes un parti qui lutte depuis 39 ans à ce jour pour le respect des textes règlementaires et de la Constitution. Si nous sommes en 2023 et que les conditions pour organiser les élections sont toutes réunies, pourquoi refuserons-nous de les organiser? Notre Chef de l’Etat Felix-Antoine Tshisekedi est un modèle de démocrate.

C’est pour cette raison qu’il a restauré l’Etat de droit en RD-Congo. Dire que l’UDPS fait ceci ou cela parce qu’elle veut glisser est un mensonge grossier. L’UDPS veut que les choses se passent normalement, régulièrement et correctement. «Qui rira bien rira le dernier», disent les Français. Nous n’avons peur d’affronter les élections en 2023, mais nous tenons au respect de certaines conditions afin que ces élections soient organisées dans les bonnes conditions.  

Partagez-vous l’avis de Noël Tshiani qui souhaite qu’il soit inséré dans la réforme électorale que pour briguer le fauteuil présidentiel, le candidat doit être de père et mère RD-congolais?

Il n’a pas tellement tort à mon sens parce que la loi sur la nationalité RD-congolaise est un droit, non du sol, mais du sang. Qui est RD-Congolais et qui ne l’est pas? Je vous donne un exemple: un couple français, égyptien ou congolais d’en face qui vivrait dans notre pays et qui mettrait au monde des enfants en RD-Congo, est-ce nous pourrions dire que ces enfants-là ont le sang RD-congolais pour prétendre un jour diriger le pays? Même au temps de Mobutu, être RD-Congolais authentique c’est être né de père et de mère RD-congolais. Noel Tshiani propose une bonne solution.

Mais selon la loi sur la nationalité, un enfant né dans le navire, avion et tout autre aéronef ou sur le sol du pays auquel appartiennent ces aéronef porte la nationalité dudit pays?

Il est supposé comme ayant la nationalité du pays propriétaire de cet aéronef, etc. Cela est reconnu dans le monde entier. Mais c’est un droit de sol et non du sang. Nous voulons les RD-Congolais ayant du sang RD-congolais. Nous avons l’expérience des gens qui a le droit du sol et qui n’ont pas aimé la RD-Congo. Tout en se disant RD-Congolais mais ils servent leur pays d’origine quant au sang. Le fait d’être né en RD-Congo à mon sens ne doit conférer le droit à briguer les grands postes de responsabilité notamment celui de devenir Chef de l’Etat.    

Mais aux Etats-Unis d’Amérique, Barack Obama a été élu Président alors que son père est un Africain de surcroit un Kenyan? Qu’est-ce que vous craignez?

Les Etats-Unis d’Amérique ne sont pas la RD-Congo. Si leur loi de nationalité est une loi liée au sol, ce n’est pas le cas pour nous. Chez-nous c’est lié au sang. Aussi presque tout le monde qui est aux Etats Unis n’est pas originaire de ce pays. Tous ceux qui dirigent ce sont des blancs venus de l’Europe et de l’Australie. Les originaires ce sont Aztèques, Maya, bref les Amérindiens qui ne sont pas aux affaires. Or, en RD-Congo, il y a des peuples autochtones… depuis des siècles. D’où le droit du sang doit primer pour nous.

Le SG de l’UDPS Augustin Kabuya a annoncé aux combattants qu’il y avait 82 candidatures pour 8 postes ministériels et l’opinion accuse le parti présidentiel d’être glouton?

Notre Secrétaire général l’avait dit pour montrer combien il était préoccupé en travaillant d’arrache-pied pour mettre en place la liste des candidats ministres de l’UDPS. Le sujet n’est pas d’actualité car il a tenu parole. Depuis la semaine passée, notre Premier ministre Sama Lukonde a reçu la liste des candidats de l’UDPS. Les gens parlent pour parler, Augustin Kabuya est un travailleur.

Que dites-vous aux combattants de l’UDPS qui vous liront dans ces colonnes?

Nous leur demandons de respecter la hiérarchie du parti et de lui obéir. Cette hiérarchie est composée de JM Kabund-a-Kabund, président ai de l’UDPS et 1er vice-président du bureau de l’Assemblée nationale, et d’Augustin Kabuya, Secrétaire général du parti. Ce sont eux qui travaillent avec le Chef de l’Etat. Ils ont fait preuve d’être de dirigeants convaincants. Les fils et filles de l’UDPS seront dans le gouvernement Lukonde et également dans les entreprises et la diplomatie.

Quel est votre message à tout le peuple RD-congolais qui attend la concrétisation du programme «le Peuple d’abord»?

Nous demandons à notre peuple de faire confiance au Chef de l’Etat et de prier pour lui. Il nous avait dit dès sa prise de pouvoir qu’il n’était pas le Président de l’UDPS mais plutôt le Chef de l’Etat de tout le peuple RD-congolais.

Propos recueillis par Octave MUKENDI  

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