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Un chaos électoral se planifie à Mushie si l’on en croit un élément sonore attribué à Didace Pembe

Les choses s’annoncent mal pour la circonscription électorale de Mushie, dans la province de Maï-Ndombe. Un transfuge du Front commun pour le Congo -FCC- plante déjà un décor de la violence et du chao à Mushie, lors des élections générales du 20 décembre 2023. Dans une audio devenue virale sur la toile, le candidat à la députation nationale, Didace Pembe Bokiaga, est en train d’instruire les militants de son parti Alliance des écologistes congolais -AECO/Les Verts- de brûler des centres de vote en cas de tentative de fraude. Il l’a dit au cours d’une réunion tenue le 1er septembre dernier avec les cadres de son parti à Mushie.

«Nous devons avoir trois témoins dans chaque bureau de vote. Mon mot d’ordre est clair. Dès que vous suspectez une tentative de tricherie, il faut directement brûler ce bureau de vote. Vous aurez des bidons d’essence dont vous allez vous servir. N’ayez pas peur, c’est moi-même qui vous envoie», a déclaré Didace Pemba sur un ton belliqueux dans cette audio, alors qu’il s’adressait à ses militants recrutés comme des témoins électoraux, pendant ses vacances parlementaires dans son fief électoral de Mushie.

Selon nos câbles sur place dans la cité de Mushie, faisant de ce mot d’ordre de leur leader une parole d’évangile, les militants d’AECO/Les Verts s’attèlent déjà à constituer des réserves d’essence afin de mettre en feu, au moment venu, les centres de vote où tout soupçon de fraude sera observé. Aussi, à trois mois des élections, des partisans de l’ancien ministre national de l’Environnement se livrent déjà à des pratiques de terreur, question d’intimider et imposer une opinion électorale dans le chef de la population de cette partie du Maï-Ndombe.

Des questions taraudent les esprits des RD-Congolais face à cette attitude peu recommandable. En sa qualité d’élu national, législateur de surcroit, Didace Pembe a-t-il raison d’intimer l’ordre à ses partisans de brûler des centres de vote quelle que soit la nature d’irrégularités y constatée? Pourquoi lui qui a été élu trois fois consécutives à Mushie sous Joseph Kabila sans que les bureaux de vote ne soient incendiés, peut-il envisager de les incendier cette fois-ci sous Félix Tshisekedi? Que se cache-t-il dans cette prise de position? Est-il un infiltré dans l’Union sacrée de la Nation ?

Alors que la Loi électorale en RD-Congo renseigne qu’en cas de fraude, les partis politiques, les regroupements politiques ou les candidats indépendants sont autorisés à saisir les Cours et Tribunaux habilités à statuer quant à ce. Conformément aux articles 27, 36 et 74 de la loi électorale, les juridictions compétentes pour connaitre du contentieux des élections sont la Cour constitutionnelle, pour les élections présidentielle et législatives; la Cour administrative d’appel, pour les élections provinciales; et le Tribunal administratif, pour les élections urbaines, communales et locales. Voici la seule voie indiquée pour contester les résultats ou dénoncer des irrégularités électorales constatées, contrairement à la démarche que voudrait prendre le candidat député Didace Pembe qui, lui, choisit de se faire justice à travers des actes de violence dans des centres de vote.

«Les candidats et partis politiques qui contestent les résultats provisoires annoncés par la CENI, peuvent saisir le juge du contentieux électoral soit pour faire rectifier ces résultats en cas d’erreur, soit pour faire annuler l’élection en vue de la réorganisation d’un nouveau scrutin, s’il y a eu des irrégularités déterminantes», renseigne la Loi électorale. Dans le même registre, l’article 33 de la loi organique de la CENI dispose: «en cas de recours porté devant la juridiction compétente pour connaitre des contentieux électoraux ou référendaires, la CENI apporte au juge tous les éléments d’information dont elle dispose, accompagnés éventuellement des observations qu’elle souhaite formuler relativement au fait évoqué dans le recours et de ses appréciations quant à l’application des dispositions légales en vigueur».

Concernant les témoins, alors que la Loi électorale limite à 1 le nombre de témoins par parti politique, regroupement politique ou candidat indépendant, et par bureau de vote, de dépouillement ou de compilation, Didace Pembe s’apprête à aligner 3 témoins AECO/Les Verts dans chaque bureau de vote. Une violation délibérée de la Loi électorale. D’ailleurs, l’article 41 fixe très clairement le comportement à observer par les témoins et le président d’un bureau de vote. En lieu et place de se livrer à des actes de vandalisme sous prétexte d’une irrégularité constatée, l’article 41 donne le droit aux témoins «d’exiger la mention de toute observation, réclamation et contestation touchant à la régularité des opérations électorales dans le procès-verbal avant que celui-ci ne soit placé sous pli scellé».

Et le même article 41 emploie une formule sévère par rapport au comportement des témoins en demandant que tout celui qui causera un désordre ou obstruction aux opérations électorales, soit mis dehors et remplacé immédiatement. Des analystes et observateurs ne se lassent de s’interroger sur la portée et la face B des propos incendiaires tenus par le président national de l’Alliance des écologistes congolais. Didace Pembe entend-il semer le chao lors de prochaines élections? Pourquoi le ferait-il, lui qui vient d’intégrer le regroupement AAAP de Laurent Batumona, plateforme politique et électorale favorable à Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, Président de la République et candidat à sa propre succession?

Dans tous les cas, il y a lieu de s’inquiéter dans la mesure où le transfert de l’élu de Mushie, du FCC vers l’Union sacrée de la nation, semble ne pas passer au peigne fin. «Didace Pembe qui, récemment, était encore parmi les rares fidèles restés aux côtés de l’ancien Président de la République Joseph Kabila Kabange lui exprimant toute leur loyauté, a-t-il intégré l’Union sacrée de la Nation avec intention de nuire au pouvoir du Président Félix-Antoine Tshisekedi?», tente de s’interroger un analyste politique ayant requis l’anonymat.

Dans le cas contraire, si Didace Pembe n’est pas animé de mauvaises intentions à l’égard de son désormais maître, pourquoi demanderait-il à ses militants de brûler des bureaux de vote, oubliant que cet acte grave privera non seulement au Président de la République de ses nombreuses voix électorales dans le Maï-Ndombe, mais aussi aux autres candidats en lice à tous les niveaux des scrutins.

Silence radio côté services de sécurité et autorités de province

L’appel à la violence prônée par le candidat député Didace Pembe vise également la destruction des écoles qui accueillent des centres de vote, pourtant nouvellement construites grâce au programme présidentiel de développement local des 145 territoires. Par la violence, des matériels électoraux seront également endommagés, des pertes en vies humaines seront enregistrées aussi bien dans le rang des électeurs que des agents de la CENI, parce qu’il s’agit de l’essence qui est prévue d’être utilisée. Curieusement et au grand étonnement de l’opinion, des services de sécurités, les autorités provinciales et territoriales sont restés aphones face à ces propos incendiaires et suicidaires de l’élu de Mushie. Car, jusqu’à ce jour, Didace Pembe n’est interpellé par personne, et pas un seul rapport fourni pour dénoncer cet appel à la violence électorale. Complicité, peur de l’individu ou incompétence? Surtout que, apprend-on de sources sûres, l’actuel chef d’antenne de Mushie, Noël Vidi Mambote reconduit par la CENI, a toujours roulé depuis 2011 pour Didace Pembe.

Les propos du boss de l’AECO/Les Verts tant relayés par des radios communautaires du coin, sont susceptibles d’accentuer les conflits ethniques entre les Teke et les Yaka qui fragilisent encore quelques territoires de la province de Maï-Ndombe, à travers les exactions de la milice Mobondo née de ces différends. Didace Pembe n’a-t-il pas compris que le contexte semble mauvais pour tenir ce genre des discours dans cette partie du pays. C’est ici l’occasion pour la justice via la Cour de cassation et pour l’Assemblée nationale de se saisir de cette infraction commise par un député. De même pour l’Agence nationale de renseignement -ANR- ainsi que le Conseil national de sécurité -CNS- qui devraient du coup barrer la route à ce candidat député instigateur de la violence électorale, dans un processus voulu apaisé par le Président Félix-Antoine Tshisekedi. En somme, tout porte à croire que la famille Union sacrée de la nation chère au Président Félix-Antoine Tshisekedi serait visiblement inféodée par certains acteurs politiques venus en son sein, certes avec une mission bien précise.

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