La semaine dernière a connu plusieurs agitations autour d’un prétendu conflit opposant le vice-Premier ministre en charge de la Fonction publique, Jean-Pierre Lihau, et le ministre des Finances, Doudou Fwamba. Alors que ce conflit apparent, créé de toutes pièces par des mauvaises langues, semblait être mis au frigo immédiatement après l’apparition de la 2ème correspondance du ministre des Finances du 08 juillet 2024 adressée au Directeur général de la DGRAD, dans laquelle le ministre Doudou Fwamba a clairement indiqué que sa lettre du 1er juillet 2024 relative à la suspension du mouvement du personnel ne concernait pas la mise en cause des ordonnances, décrets et arrêtés indiqués dans la correspondance du vice-Premier ministre Jean-Pierre Lihau, lesquels devraient être mis à exécution par les services bénéficiaires placés sous son autorité sans désemparer.
Mais hélas! Des textes écrits et largement diffusés ont circulé sur la toile chargeant ainsi le VPM Jean-Pierre Lihau, tantôt de la signature d’un arrêté admettant sous-statut 293 agents pour la DGRAD, tantôt d’entretenir le flou dans le fonctionnement du ministère des Finances avec les arrêtés 018 et 164 relatifs aux anciens élèves de l’Ecole nationale des finances -ENF-, et tantôt comme demandeur du poste de Secrétaire général de l’UDPS, en remplacement d’Augustin Kabuya. Voilà une ignominie de la part des gens mal intentionnés qui ne savent pas que la Constitution de la République interdit à un membre du gouvernement le cumul des postes incompatibles à sa fonction de ministre. Des montages grotesques!
Le cabinet tord le cou aux faux bruits
Dans un communiqué officiel tombé vendredi 19 juillet, le cabinet du vice-Premier ministre en charge de la Fonction publique tord le cou aux faux bruits sur l’octroi des matricules à 293 agents de la DGRAD. «Le cabinet de Son Excellence Monsieur le vice-Premier ministre en charge de la Fonction publique porte à la connaissance du public qu’un groupe ‘’d’influenceurs’’ mal intentionnés fait circuler, en boucle depuis quelques jours, sur les réseaux sociaux des rumeurs tendant mensongèrement à attribuer à l’Autorité la signature d’un arrêté octroyant des numéros matricules à 293 personnes pour le compte de la DGRAD, sans concertation préalable avec les organes de la Régie», souligne le communiqué.
Et de rappeler: «le cabinet rappelle qu’en vertu du statut des agents de carrière des services publics de l’Etat, le ministère de la Fonction publique est le gestionnaire principal des ressources humaines des administrations et services publics du pays et demeure le seul ministère habilité à octroyer des numéros matricules aux agents recrutés par ses soins en collaboration avec les services utilisateurs». A travers cette communication, le cabinet du VPM Jean-Pierre Lihau a apporté un démenti cinglant. «Le cabinet dément donc formellement l’information vantée de la signature au cours de cette année d’un quelconque arrêté pour le compte de ladite régie financière…», a-t-il signifié.
Plusieurs autres affirmations sont mises à la charge du patron de l’Administration publique, tendant à remettre en cause les fondamentaux des actions phares entreprises par celui que les RD-Congolais ont appris à connaitre et à aimer tout au long de son premier mandat, jusqu’à l’appeler affectueusement ‘’Cerveau d’Etat’’. Plutôt que de se contenter des débats des rues et des racontars des réseaux sociaux, notre journal s’est transporté, respectivement, à la DGRAD, aux ministères des Finances et de la Fonction publique, afin d’investiguer pour rétablir la vérité des faits. Un parcourt de combattant plein des révélations.
Aucun arrêté de recrutement signé pour la DGRAD
Après nos investigations, il ressort que depuis l’investiture du gouvernement Suminwa, à l’exception du dossier relatif à la régularisation de la situation administrative des anciens élèves de l’Ecole nationale des finances, aucun arrêté d’admission sous-statut n’est sorti du ministère de la Fonction publique pour le compte de la DGRAD, encore moins de celui du ministère des Finances. Le VPM Lihau n’a donc jamais signé un quelconque arrêté admettant sous-statut 293 nouveaux agents en faveur de la DGRAD. Rien du tout. Mieux rien de tel n’a été posé comme acte administratif.
Approché, une femme d’une cinquantaine révolue, cheffe de bureau à la Direction de recrutement a donné une réponse étonnamment révélatrice. «L’accès dans la Fonction publique n’a jamais été autant difficile et corsée comme après l’arrivée de Jean-Pierre Lihau à la tête du ministère de la Fonction publique. Tous les tuyaux qui servaient au recrutement clandestin des personnes dans l’Administration publique ont été bouchés. Il ne se passe pas des mois sans que des responsables des services publics habitués au népotisme ne se voient être sanctionnés par le patron de l’Administration pour recrutement irrégulier du personnel. Sauf dans les cas de recrutement sur titre, autorisés par la loi, et dont la décision revient au ministre de la Fonction publique -article 6 du Statut-, tout recrutement dans la Fonction publique passe exclusivement par concours», a-t-elle indiqué.
Et de renchérir: «c’est dans cette optique que, durant ces dernières années, plusieurs concours ont été organisés sous la supervision de la Fonction publique en faveur de plusieurs secteurs, donnant ainsi leurs chances à tous les jeunes compétents à batailler, à armes égales, pour mériter leur place dans l’Administration publique. Cette rigueur qui indispose surement ceux qui, encore hier, étaient habitués à recruter dans la fonction publique grâce sur base des liens familiaux, politiques et tribaux, constitue sans nul doute l’un des facteurs explicatifs de la guéguerre alimentée par des personnes en mal de positionnement, restées dépendantes des mauvaises habitudes du passé. En tant que valeureux citoyens, nous ne pourrions qu’encourager cette vision méritocratique des choses, par ailleurs conforme à la Constitution de la RD-Congo, ainsi qu’aux lois de la République, lesquelles établissent le principe «d’égalité de tous à l’accès aux emplois publics».
Les actes signés à la Fonction publique sont mis sur le portail numérique du ministère
Dans les couloirs comme à la Place Golgotha, les avis des agents approchés sont convergents. Tous les actes signés par le vice-Premier ministre Lihau sont mis en ligne sur le portail de la Fonction publique. «Pour besoin de transparence et en vertu du devoir d’information auquel sont assujettis les services publics de l’Etat, le ministère de la Fonction publique avait levé l’option de rendre disponible, et à la portée de tous, l’ensemble des actes administratifs concernant la gestion des agents de carrière des services publics de l’Etat, y compris les arrêtés d’admission sous-statut. Ainsi, la procédure de publication de tous les actes est la même. Elle passe donc généralement par la voie ci-après: cabinet VPM-Secrétariat général à la Fonction publique chargé des Actifs-Administration bénéficiaire-portail numérique de la Fonction publique», ont-ils expliqué avant de marteler qu’il n’existe pas un autre schéma pour la publication des arrêtés ou autres notes circulaires à la Fonction publique.
Poursuivant ce tour éclaire aussi bien à la DGRAD, au cabinet du ministre de la Fonction publique, au Secrétariat général à la Fonction publique chargé des actifs, que sur le portail numérique de la Fonction publique, nos équipes n’ont trouvé aucun arrêté comportant les informations véhiculées sur les réseaux sociaux. «Nous n’avons jamais vu ces documents dont parlent les réseaux sociaux. Ce sont des gens mal intentionnés qui distillent ces inventions. Ne cherchez pas à ramener vos mensonges politiques au niveau de l’Administration publique. Cherchez plutôt à vous occuper du social des fonctionnaires. C’est tout ce que nous attendons. Rien d’autre», a fulminé d’un ton ferme un agent sexagénaire trouvé dans les couloirs de la DGRAD.
En réalité, aucun arrêté de recrutement des agents à la DGRAD n’a été signé. Pourquoi alors un tel acharnement et pour quel intérêt? Voilà des questions qui taraudent dans les esprits des bonnes consciences qui ne cessent de dénoncer une certaine tendance qui cherche à politiser l’administration à travers certains fonctionnaires en quête de positionnement. «En principe des instances disciplinaires habilitées se saisissent de ces cas afin que l’Administration publique, en raison de sa nature apolitique, soit débarrassée des fonctionnaires concomitamment et activement politiciens», a proposé un chef de Division de la DGRAD. La Fonction publique doit rendre justice à toute personne utilisée par l’Etat comme nouvelle unité.
«Conformément aux compétences lui dévolues par la Loi, le ministre de la Fonction publique peut pleinement ‘’rendre justice’’ à toute personne utilisée par l’Etat comme Nouvelle unité -NU- durant plusieurs années sans aucune reconnaissance», a affirmé un chef de Division de la Direction de suivi des carrières au Secrétariat général de la Fonction publique en charge des actifs. Et de poursuivre: «l’Administration publique de la RD-Congo a longtemps dysfonctionné. Le règne du favoritisme, du népotisme et d’autres formes d’antivaleurs dans le processus de recrutement au sein de la Fonction publique ont entre autres induit le développement du phénomène Nouvelles unités. Il s’agit des personnes ayant fait parfois 20, 15, 10 ou 5 ans dans les services publics mais sans jamais avoir obtenu de la Fonction publique ‘’un numéro matricule’’, ni aucun salaire. Chaque fois que l’Etat décidait de régulariser la situation de cette catégorie d’agents, les autorités politiques ont souvent substitué aux noms des vrais bénéficiaires, les noms des militants de leurs partis politiques ainsi que de leurs membres de famille».
Dans toutes les administrations, les agents reconnaissent les efforts fournis par le régime Tshisekedi à travers le vice-Premier ministre Jean-Pierre Lihau dans le souci qui consiste à maitriser les effectifs des agents publics de l’Etat. «A son arrivée à la tête du ministère de la Fonction publique et déterminé à mettre fin à ce phénomène qui nuit à la maitrise des effectifs et à la bonne gestion des ressources humaines de l’Etat, le vice-Premier ministre Jean-Pierre Lihau a commencé par arrêter l’hémorragie, en signant la note circulaire n°008 CAB/VPM/FP-MA-ISP/JPL/TKB/JMM/CKK/AMAT/22 du 28 décembre 2022 interdisant le recrutement de nouvelles unités dans toute l’Administration publique. Plusieurs secrétaires généraux récalcitrants, surpris la main dans le sac, font régulièrement l’objet de suspension, suivi d’ouverture d’action disciplinaire et encore qu’ils soient aussi privés de leurs emplois», ont soutenu les agents rencontrés dans le Grand Bâtiment de la Fonction publique.
A les entendre, ne sont désormais régularisés que des agents véritablement NU, justifiant des commissions d’affectation obtenues avant la période d’interdiction sus indiquée, déclarée et identifiée comme tel par les services utilisateurs, qui transmettent par correspondance officielle, les listes d’agents concernés à la Fonction publique.
«Comme pour le processus de promotion et de titularisation en grade, la régularisation de la situation administrative des agents NU par le ministère de la Fonction publique se fait donc toujours à la demande du responsable du service utilisateur, lequel a le devoir de justifier que la nouvelle unité proposée à la régularisation exerce un emploi permanent, et occupe un poste organique budgétairement prévu. S’agissant particulièrement de la promotion et la titularisation en grade, les dossiers y afférents sont toujours validés en commission interministérielle réunissant, en toute transparence, les experts de la Fonction publique et ceux de chaque administration sectorielle concernée, y compris la représentation syndicale», a souligné un agent de la DBDR en instance d’être retraité.