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RDC: CENCO-ECC, entre diktat et démocratie chez les religieux

Dans une dynamique comme celle de la plateforme des Confessions religieuses, aucune des parties prenantes n’a réellement un pouvoir sur les autres. Le président n’est davantage là pour la forme que pour imposer une vision ou des décisions. Voilà même l’esprit de l’article 17 de la charte des Confessions religieuses qui prévoit le consensus et, à défaut de celui-ci, le vote comme mode de prise des décisions.

Du coup, il y a à se poser la vraie question après le refus de la Conférence épiscopale nationale du Congo -CENCO- et de l’Eglise du Christ au Congo -ECC- de poursuivre les travaux de désignation du président de la CENI. Cette décision unilatérale empêcherait-elle les autres de s’exprimer? Au nom de principe! Encore que les Catholiques se veulent publiquement très liés aux principes fondamentaux de la démocratie et donc respecteraient, au-delà des passions, les libertés des autres églises. Aussi, prétendre que le poids de la CENCO poids et celui de l’ECC leur octroierait -de façon sui generis- un droit de veto est juste anti démocratique. Aucun des RD-Congolais ne concevrait qu’en démocratie, un chef de parti dont la popularité est indiscutable, ait dans le vote une voix prépondérante aux autres citoyens modestes. C’est aussi cela la règle du jeu dans les milieux des religieux.

Comme évoqué par Utembi, chaque Confession a pris ses responsabilités

Tenez: «Si on ne se met pas d’accord. Chaque Confession religieuse devra prendre ses responsabilités», déclarait Mgr Utembi, président de la CENCO et de la plateforme des Confessions religieuses, à l’ouverture des travaux vendredi 30 juillet 2021. A la sortie, devant les journalistes fébriles à l’idée de connaître le nom de l’élu président de la Commission électorale nationale indépendante -CENI-, le prélat catholique a signifié:0 «Nous avons trouvé un consensus». En fait, le consensus trouvé était plutôt un rapport à déposer à l’Assemblée nationale reconnaissant le fait que les Confessions religieuses n’ont pas réussi à trouver un consensus sur un point. Le rapport des Confessions religieuses, voulu confidentiel de commun accord, a très vite fini dans les médias… pour le besoin de la cause!

A l’en croire, au terme des discussions tenues le mardi 27 juillet et le vendredi 30 juillet 2021, après examen des dossiers des candidats, un consensus a été trouvé sur les aspects techniques des candidats. L’on sait que quatre noms ont émergé. Dénis Kadima Kazadi, candidat des Kimbanguistes venait devant Cyrille Ebotoko de l’Eglise catholique, suivi de Roger Bimwala de l’Armée du salut,… Daniel Kawata de l’ECC étant disqualifié pour son manque d’expertise électorale.    

La ruse aux apparences de bonne foi

Cependant, le même document souligne que l’Eglise catholique et l’Eglise du Christ au Congo «considèrent que, sur le plan éthique et de l’indépendance, les griefs contre deux candidats de la liste -les meilleurs sur le plan technique-, griefs qui affectent leur indépendance et leur crédibilité, ne permettent pas d’évoluer avec eux jusqu’au vote…».

Pour des observateurs avertis, cet argumentaire tient plus de la ruse que de la bonne foi. La remise en cause de la candidature de Denis Kadima ne se base que sur le fait qu’il est du Kasaï. Aucun religieux n’a, ne serait-ce que, tenté de prouver sa corruptibilité ou ses accointances avec le pouvoir actuel. Pour l’écarter, les catholiques et les protestants, comme en 2020 face à Ronsard Malonda, feignent d’accepter de sacrifier Cyrille Ebotoko déjà perdant et dont la carrure ne convainc pas ses propres prélats et le CV ne rivalise en rien avec celui de Kadima. Le but est de se donner une nouvelle chance en sortant un autre joker.

Pas besoin de preuve pour accuser les autres…

Mais c’est sans compter sur la vigilance des autres Confessions religieuses. «Les six autres Confessions trouvent que les griefs relevés contre les deux candidats soit ne sont pas prouvés, soit ne concernent pas directement les candidats. Il convient de passer au vote», renseigne le document mis sur la place publique. Question: Des religieux auraient-ils le droit de condamner quelqu’un juste sur des allégations infondées?

On se rappelle qu’avec Malonda, ils avaient également accusé leurs pairs de corruption sans en avancer la moindre preuve. Bonjour le respect mutuel! «Le président de la séance n’a pas voulu organiser le vote dans ces conditions. Sur cette note de manque de consensus que la séance a été levée», lit-on à la fin du rapport. Voilà qui renvoie à la recommandation de Mgr Utembi à l’ouverture des travaux.  «Chaque Confession religieuse devra prendre ses responsabilités».

Les confessions qui ont désigné ont exercé leurs droits…

Ainsi, la CENCO et l’ECC ont pris leur responsabilité en refusant un vote dans lequel elles partaient perdantes. Et les six autres ont pris leur responsabilité en choisissant les deux délégués à la CENI. Croire le contraire supposerait que la démocratie à la catholique serait une sorte de diktat. Les Confessions religieuses ont commencé à travailler sur le choix du président de la CENI et d’un membre de la plénière depuis le 9 avril 2021, jour où elles ont lancé l’appel à candidature.

Le processus de désignation a duré quatre mois. Le 27 juillet, après 12 heures des travaux, les discussions se sont butées au refus de la CENCO et de l’ECC qui, bien que reconnaissant l’expertise de Kadima, ne voulait pas de ce Kasaïen à la tête de la CENI. Après une réunion avec les ambassadeurs de France, Belgique et Etats-Unis, le 28 juillet 2021, elles sont revenues avec la proposition de retirer Kadima et Ebotoko, déjà battu, afin d’en sélectionner, en un jour, d’autres moins bons mais à leur goût!

MATSHI Darnell

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