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Candidat de l’étranger : les relations incestueuses entre Limete et Kigali | un rapport de l’ONU est formel : en 2012, l’UDPS avait envoyé des représentants auprès du M23 à Bunagana

Depuis le début de la campagne électorale, Félix Tshisekedi, qui peine à défendre un bilan inexistant, n’a qu’une phrase à la bouche: «ne votez pas pour le candidat de l’étranger». Partout où il passe, il tente désespérément de présenter ses adversaires comme étant des candidats soutenus par un président d’un pays voisin qu’il n’a pas cité, faisant sans doute allusion au Rwanda. Cette rhétorique fait rire beaucoup au sein de l’opinion car tout le monde sait que les principaux candidats de l’opposition sont des RD-Congolais qui ont réussi aussi bien chacun dans leurs domaines respectifs, loin du Rwanda, et n’ont jamais eu aucun rapport avec ce pays ni son président.

Ainsi, Denis Mukwege est un brillant gynécologue dont le travail humanitaire lui a valu plusieurs distinctions, dont le prix Nobel; Martin Fayulu fut un brillant cadre de direction d’une multinationale américaine du secteur pétrolier qui s’est reconverti dans les affaires avant d’entrer en politique; et Moïse Katumbi est un brillant homme d’affaires qui a fait fortune dans les mines, l’agriculture et le transport dans sa riche province du Katanga, avant d’intégrer le champ politique. Nulle trace d’une quelconque collaboration avec le Rwanda dans leur parcours. Bien au contraire, c’est bien l’UDPS qui a toujours entretenu des relations incestueuses avec le Rwanda de Paul Kagame.

Commençons par la dernière en date. En avril 2012, un groupe de soldats des FARDC, anciens du CNDP de Laurent Nkunda, se mutinent au motif que le président Joseph Kabila n’aurait pas tenu ses engagements dans l’accord de paix du 23 mars 2009, et forment un groupe rebelle dénommé Mouvement du 23 mars, M23 en sigle. Ce mouvement reçoit le soutien du Rwanda dans sa guerre contre l’armée RD-congolaise, et avance jusqu’à la conquête de Goma. Le gouvernement de Joseph Kabila crie à l’agression du Rwanda et mobilise le peuple contre cette attaque du pays. Pendant ce temps, l’UDPS, elle, choisit d’entrer en contact avec le mouvement rebelle pro-rwandais, et lui envoie des représentants pour négocier secrètement. A l’époque, dans une interview à la Voix de l’Amérique, Lambert Mende, porte-parole du gouvernement Matata, avait dénoncé ces accointances entre l’UDPS et le M23. Mais, grande gueule comme d’habitude, l’UDPS avait démenti, et son communiqué avait été publié dans le journal rwandais Igihe. Cependant, quelques mois plus tard, un rapport du groupe d’experts des Nations Unies daté du 15 novembre 2012, portant la référence S/2012/843, avait confirmé les faits et l’UDPS s’était tue.  

Dans le même temps, un colonel des FARDC basé à Kananga, le colonel John Tshibangu, entre en mutinerie, et lance un mouvement censé se battre pour rétablir Etienne Tshisekedi dans son droit car considéré comme le vrai vainqueur de la présidentielle de 2011. Selon le même rapport, le Rwanda demande à Roger Lumbala, à l’époque allié de l’UDPS – il était député et président du regroupement politique ‘‘Soutien à Etienne Tshisekedi’’, SET en sigle – de rejoindre le M23. Cependant, des dirigeants du M23, à leur tour, demandent à Roger Lumbala de soutenir le colonel mutin John Tshibangu.

A cette période, pour éviter que d’anciens soldats issus du CNDP et qui avaient été sous le commandement du colonel M23 Innocent Zimulinda, ne se mutinent et rejoignent le M23, Joseph Kabila décide de les déplacer loin du Kivu, et les envoit à Kananga. Selon le rapport de l’ONU, Bosco Ntaganda insiste alors pour que ces soldats soutiennent le mouvement lancé par John Tshibangu. Malheureusement, John Tshibangu ne réussira jamais à lancer sa rébellion, ses jeunes recrues dans le territoire de Dibaya fuiront tous avant le premier coup de feu, et lui-même s’exilera en Afrique de l’est, avant d’être arrêté en Tanzanie et extradé à Kinshasa.

On peut lire, en effet, aux pages 29 et 30 de ce rapport de l’ONU : «Tentatives du M23 d’ouvrir un front dans l’ouest de la République démocratique du Congo». Le M23 s’est employé à ouvrir un front dans l’ouest de la RDC. Pour ce faire, il a amplifié son programme politique, dans lequel il s’insurge contre les vices qui ont entaché les élections de 2011 et l’incapacité du Gouvernement congolais dirigé par le Président Kabila. Il a pu ainsi toucher l’opposition congolaise et forger de nouvelles alliances. Trois membres du M23 ainsi que des agents de renseignement, interrogés par le Groupe, ont indiqué que le M23 avait établi des contacts avec l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), dont les représentants se sont rendus à Bunagana pour y rencontrer Jean-Marie Runiga, président du Mouvement.

Interrogés par le Groupe, des agents de renseignement, des membres du M23 et des politiciens ont déclaré que des responsables rwandais ont collaboré avec Roger Lumbala, député congolais de l’opposition allié à l’UDPS. Des membres du M23 et des responsables congolais ont dit au Groupe que Lumbala s’était rendu à plusieurs reprises au Rwanda, en Ouganda et au Burundi entre juin et août 2012 pour y rencontrer les dirigeants rebelles (annexe 44). Après son arrestation à Bujumbura, le 1er septembre 2012, il a signé une déclaration officielle destinée à la police burundaise dans laquelle il affirmait que des agents du renseignement rwandais l’avaient invité à aller à Kigali pour le convaincre de rejoindre les rangs du M23 (annexe 45 et S/2012/348, encadré 3). Interrogé par le Groupe, Lumbala a affirmé ne s’être jamais rendu en Ouganda et n’avoir été au Rwanda que pour rendre visite à un ami.

Selon des dirigeants du M23, les rebelles avaient demandé à Lumbala d’apporter son soutien au colonel John Tshibangu, qui avait, le 13 août 2012, déserté les forces armées congolaises avec un petit groupe de soldats alors qu’il était stationné au Kasaï occidental. Tshibangu avait annoncé la création d’un groupe armé, le Mouvement pour la revendication des élections (MRE), espérant rallier à sa cause les partisans de l’UDPS mécontents et persuadés qu’Étienne Tshisekedi, candidat de l’opposition, avait de fait remporté l’élection présidentielle de novembre 2011.

Des officiers du M23 ont admis être des alliés de Tshibangu; des soldats précédemment placés sous les ordres du colonel Innocent Zimurinda, appartenant au M23, ont été redéployés à Kananga dès le début de la mutinerie. Des officiers de l’ex-CNDP ont informé le Groupe que plusieurs hauts gradés du M23, parmi lesquels Bosco Ntaganda en personne, avaient essayé de convaincre des officiers rwandophones en poste à Kananga de rejoindre le groupe de Tshibangu. On trouvera à l’annexe 46 au présent rapport des informations complémentaires concernant le M23 et ses réseaux de soutien».

Cependant, cette collaboration avec le M23 de 2012 n’est pas la première en ce qui concerne l’UDPS. L’on se souviendra que, en 1996, alors que le pays subissait la première agression, celle de l’AFDL, soutenue par le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi, et que les étudiants étaient mobilisés dans les rues de Kinshasa, c’est Etienne Tshisekedi qui avait démobilisé l’opinion en décrétant que les rebelles étaient nos frères et qu’il fallait les accueillir. Une fois au pouvoir, ces anciens rebelles vont l’arrêter et le reléguer dans son village de Mupompa.

A l’issue de la première phase du dialogue intercongolais de Sun City, après que Kabila eut signé un accord avec le MLC de Jean Pierre Bemba, l’UDPS choisit de former une plateforme commune avec la rébellion du RCD/Goma soutenue par le Rwanda : l’Alliance pour la sauvegarde du dialogue intercongolais, ASD en sigle, dont Etienne Tshisekedi était le président, et Azarias Ruberwa le secrétaire général. Etienne Tshisekedi se rendit même au Rwanda où il fut reçu par le président Paul Kagame, qui l’invita à un meeting à Muhanga (ex-Gitarama), au centre du pays, où il le présenta comme un ami du Rwanda.

Le leader de l’UDPS se rendit ensuite à Goma, puis à Kisangani où il passa les troupes rebelles en revue, et prononça le discours du 30 juin 2002, cela après un massacre qui avait fait de nombreux morts dans la ville martyr.

Alors, si Félix Tshisekedi veut accuser ceux qui n’ont jamais eu la moindre collaboration avec le Rwanda de candidats de l’étranger, il devrait se regarder dans le miroir : il y verrait une longue idylle entre son parti avec Paul Kagame, qui a continué avec lui-même, avec l’invitation des cadres du M23 à Kinshasa au début de son mandat pendant 14 mois, logés et nourris aux frais du contribuable congolais, ainsi que l’octroi des mines congolaises au Rwanda par lui-même contre le carnet d’adresse du président Kagame.

Me NZALIWA WALI TINZONI, avocate

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