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L’Accord de la CENCO est un régime spécial

On en sait désormais quelque chose sur la légitimité que le Rassemblement entend imposer pendant la période préélectorale en République Démocratique du Congo
Au Centre Interdiocésain de Kinshasa, Augustin Kabuya a créé la surprise quand, à son initiative, il a fait venir la presse pour, selon ses propres termes, éclairer l’opinion tant nationale qu’internationale sur la mise en œuvre de l’accord du 31 décembre. Des journalistes anticipent et font pleuvoir des questions qui, presque toutes, tournent autour de l’éventuelle investiture par l’Assemblée nationale d’un Premier ministre désigné par le Rassemblement et nommé par le Président de la République, alors que l’UDPS, le parti phare de ce regroupement politique de l’Opposition, n’a jamais reconnu ses propres députés nationaux et, partant, toutes les institutions issues des élections du 28 novembre 2011. Ces médias tueurs. Vous avez beau garder le mutisme, ils vous tirent les vers du nez et vous poussent à tout étaler sur la place publique, à révéler même le secret le mieux gardé, à dévoiler une stratégie! S’il n’a pas commis une imprudence, le porte-parole de l’UDPS a révélé que l’investiture du prochain Premier ministre se fera dans un contexte spécial, exceptionnel! On y est. C’est un Régime spécial. Rien d’autre. Kabuya est passé aux aveux.
L’affirmation est cependant aux antipodes de l’Accord de la Saint Sylvestre dont le préambule indique que le compromis politique du Centre Interdiocésain est fondé sur le respect de la Constitution. Le Rassemblement réclame une nouvelle session extraordinaire pour consacrer son Régime spécial. Est-ce l’éclairage que Kabuya tenait à faire via la presse au moment où les évêques catholiques ont ouvert les négociations consacrées à l’arrangement particulier, partie intégrante à l’Accord du 31 décembre? La Majorité présidentielle a-t-elle capitulé à ce point? AfricaNews décrypte pour vous la réponse d’Augustin Kabuya aux questions des médias accrédités au Centre Interdiocésain.

L’accord prévoit que le poste du Premier ministre revienne au Rassemblement. Depuis un certain temps, les plateformes du Rassemblement ont donné leur caution pour que l’UDPS occupe ce poste. Voilà qu’il y a un problème qui se pose. L’UDPS n’a jamais reconnu cette Assemblée nationale alors que le Premier ministre qui sortira de ce parti devrait être investi par la même Assemblée nationale. Ne voyez-vous pas que cela pose problème?

C’est une meilleure question que vous me posez pour éclairer l’opinion tant nationale qu’internationale. Je pense que si les gens étaient sincères, on ne pouvait même pas poser cette question. Votre question a une valeur quand nous sommes dans un contexte purement normal. Un contexte purement constitutionnel. C’est-à-dire que le Premier ministre, d’après l’article 74 de la Constitution, est issu au sein de la Majorité parlementaire. Si je peux suivre la même logique et vous retournez la question «par quel mécanisme le Rassemblement a eu la primature?», je pense que vous n’aurez pas une réponse réelle à me donner ou une réponse correcte. Il y a un compromis politique sur base duquel les acteurs politiques de notre pays se sont mis d’accord pour mettre sur pied un gouvernement de coalition. C’est un gouvernement d’union nationale. Rappelez-vous qu’en 2003, du temps de Sun city, l’on ne voulait même pas parler du Pouvoir et de l’Opposition. C’est la même chose aujourd’hui. Le gouvernement, qui sera mis en place est issu de l’Accord de la CENCO du 31 décembre, est obtenu sur base d’un consensus dégagé entre le Pouvoir et l’Opposition. Même les députés auxquels vous faites allusion sont liés par cet Accord puisque les délégués de la Majorité faisaient partie des négociateurs. Raison pour laquelle, avant le lancement des pourparlers, il y a eu deux blocs. D’un côté, les signataires de l’Accord du 18 octobre du camp Tshatshi et, de l’autre, les non-signataires. Et la Majorité a délégué ses négociateurs en prévision de l’Accord du 31 décembre. Le compromis trouvé engage tout le monde. Le même problème pouvait se poser sur la personne de Joseph Kabila. Aucune disposition constitutionnelle ne prévoit qu’au-delà du 19 décembre, monsieur Joseph Kabila ait un autre mandat d’une année. C’est une façon d’éviter un vide institutionnel au sommet de l’Etat et au niveau de toutes les institutions. C’est comme ça que les responsables politiques ont accordé leurs violons pour mettre en place un gouvernement qui pourra organiser les élections.
Rappelez-vous qu’en 2003, l’on ne voulait pas parler de l’Opposition et du pouvoir. Le gouvernement 1+4 avait été institué sur base d’un compromis politique. C’est la même logique à ce jour. Si les gens se posent la question: le gouvernement sera investi par quel Parlement? De quel Parlement s’agit-il? C’est toujours le même Parlement qui a donné son aval, à travers les délégués de la Majorité et de l’Opposition, pour l’obtention de l’Accord du 31 décembre.

Cet Accord n’enlève pas au Parlement la prérogative de faire partir votre gouvernement en cas de mauvaise gestion?

Je vais vous dire une chose. Vous avez bien parlé de la mauvaise gestion. Si nous en sommes-là aujourd’hui, c’est parce que le régime en place n’a pas été en mesure d’organiser les élections. Il y a eu mauvaise gouvernance à laquelle vous faites allusion. Nous ne pouvons pas soutenir la médiocrité.
Le gouvernement à venir sera issu d’un accord politique. La politique prime sur le juridique. Votre question trouve son fondement quand le contexte est normal. Et dans un tel contexte, le Rassemblement ne pouvait, en aucun cas, obtenir la Primature. Et si le Rassemblement l’a obtenu, c’est parce que nous sommes dans un contexte spécial, exceptionnel. Les hommes politiques doivent faire un effort pour aider notre peuple. Ils veulent user du mensonge pour tromper le petit peuple, tromper certaines personnes à cause de leur ignorance. Le gouvernement sera investi sans problème.
Si je dois prendre l’exemple de Samy Badibanga que l’on cherche maintenant à brandir comme un prétexte de blocage du fait qu’il n’a pas signé l’accord, Badibanga est de ceux qui ont signé l’Accord du 18 octobre. Il n’était pas parmi les délégués et était représenté par la composante des signataires. Dès lors que sa composante a signé, aucun problème ne se pose. Y avait-il le nom de Badibanga sur la liste des délégués au dialogue? Les ministres membres de son gouvernement, entre autres, Mbikayi, Bongongo, ont signé l’accord puisque mandatés par leurs composantes des signataires de l’Accord du 18 décembre. Cette question ne pouvait même pas revenir. C’est un alibi que les gens veulent brandir pour créer des blocages inutiles.
En ce qui concerne la proposition faite par la Majorité présidentielle demandant au Rassemblement de présenter ses candidats au Président de la République, l’accord ne la reconnait pas. C’est un prétexte pour créer des blocages inutiles.
Vous allez présenter combien?
Je voulais seulement vous faire comprendre qu’il n’y a aucune disposition prévoyant que le Rassemblement doit présenter les candidats. Non, nous allons présenter un seul candidat.
Lequel?

Au moment opportun, le Rassemblement va présenter son candidat.
Propos retranscrits par Laurent OMBA

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