Dossier à la UneNation

Demain Kabila sera président, une bombe estampillée Barnabé Kikaya

«Demain le Président sera Président de la République. Il restera Président de la République parce que la Constitution le lui demande. Faire autrement serait une violation de la Constitution. Parce que la Constitution dit clairement que le Président de la République reste en fonction jusqu’à ce qu’il y ait un Président élu. Si à tout hasard, comme on le lui demande, le Président venait à céder à la pression -et je ne le vois pas céder à une pression quelconque- il démissionnerait ou il ferait une autre chose, il violerait la Constitution et il serait passible des poursuites judiciaires parce qu’il plongerait le pays dans un chaos qu’on ne peut pas décrire». Les propos sont de l’ambassadeur Barnabé Kikaya bin Karubi, conseiller principal au collège diplomatique du cabinet du Président de la République. Ils sont dans une vidéo de 49 secondes en circulation sur les réseaux sociaux depuis ce jeudi 21 décembre 2017.
 
D’aucuns diraient que c’est du déjà entendu. Réaction tout à fait normal lorsqu’on limite l’interprétation de l’article 70 de la Constitution à l’alinéa 1, évoqué à tout bout de champ par les détracteurs du Chef de l’Etat -tous horizons confondus- juste pour étouffer l’alinéa 2. Pourtant, dans ces propos, il y a un élément nouveau: la notion de «haute trahison» si le Président de la République en vient à céder à la pression comme celle du schéma «régime spécial» hier ou du schéma «Transition Sans Kabila» aujourd’hui.
La Constitution, on ne le dira jamais assez, c’est un ensemble de 229 articles, Préambule et Annexes compris. Et ces articles s’appliquent avec leurs alinéas.
Dans l’Accord du 31 décembre 2016, qui est tout sauf une source de légitimité pour les Institutions -autrement les Institutions de la République auront une double légitimité- seul l’alinéa 3 de l’article 5 est mis en bémol. Il concerne le référendum.
Le reste est d’application au motif simple que les prérogatives de toutes ces Institutions n’ont fait l’objet d’aucune révision ou ni suspension.
En d’autres termes, le Président de la République, l’Assemblée nationale, le Sénat, le Gouvernement et les Cours et Tribunaux fonctionnent normalement et conformément aux dispositions constitutionnelles.
Il va sans dire que le Président de la République est obligé non pas par sa propre volonté, ni par celle de sa famille politique mais plutôt par la volonté du Constituant conforté par le souverain primaire, de rester en fonction jusqu’à l’installation de son successeur, en l’occurrence le Président de la République élu et non désigné! S’il démissionne conformément à l’article 75, il ne viole pas la Constitution. Si, par contre, il est forcé à la démission et cède, il tombe lui-même sous le coup de l’alinéa 1 de l’article 165 selon lequel «sans préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, il y a haute trahison lorsque le Président de la République a violé intentionnellement la Constitution ou lorsque lui ou le Premier ministre sont reconnus auteurs, coauteurs ou complices de violations graves et caractérisées des Droits de l’Homme, de cession d’une partie du territoire national».
D’emblée, il y a lieu de retenir que la non-tenue des élections dans les délais constitutionnels n’est pas qualifiée de haute trahison. Au demeurant, si ceux qui fondent la haute trahison sur le fait de ne pas tenir les élections étaient sûrs de leur argument, ils seraient les premiers à saisir la Cour constitutionnelle ou, comme ils en ont maintenant la culture, les instances judiciaires internationales. Or, ils s’en abstiennent.
Loin alors d’être un pavé dans la mare, la «bombe» larguée par Barnabé Kikaya bin Karubi est à prendre pour ce qu’elle est: une contribution au débat politique et juridique autour du schéma «Transition Sans Kabila».
Donald Yamamoto l’a déclaré à sa façon le 9 novembre 2017 à Washington, devant la Commission des affaires du congrès américain: «Nous avons déjà signifié à l’Opposition qu’une transition sans Kabila n’était pas constitutionnelle». L’Opposition s’est tue.
Elle n’a aucune raison de monter sur ses grands chevaux pour fustiger les propos de Barnabé Kikaya bin Karubi. Sauf pour se livrer au «Théâtre de Chez Nous»…

Omer Nsongo Die Lema
Correspondance particulière

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