Le président de l’Assemblée nationale, Christophe Mboso N’Kodia Pwanga, s’est fait filmer en train de commenter la réception, vendredi dans ses bureaux, de la proposition de Loi sur la «Congolité», indexée par presque tous comme un projet clivant soupçonné d’être conçu pour affaiblir, voire éliminer de la course à la présidentielle un redoutable concurrent politique, notamment Moïse Katumbi, et comparé à l’ivoirité, ce concept identitaire à l’origine des tensions politiques et d’importantes pertes en vies humaines en Côte d’Ivoire. Le duo Tshiani-Mboso est revenu à la charge après une première tentative infructueuse en 2021. Au cours du premier semestre de cette année-là, un groupe de juristes de l’Assemblée, mandaté pour étudier la faisabilité de cette proposition de loi, avait prudemment déconseillé la démarche, évoquant «des verrous juridiques» présents, à les en croire, dans les articles 10 et 72 de la Constitution, articles relatifs à la question de nationalité.
Téméraires, Mboso et Tshiani ont tout de même recouru au député Nsingi Pululu pour organiser le dépôt de cette proposition le 8 juillet. Mais elle n’a pas été programmée dans le calendrier de la session de septembre. «Ce n’est pas une priorité. Cette loi, je l’ai dit et je le répète, ce n’est pas une priorité», avait déclaré à ce propos Mboso N’kodia lors d’une visite à Lubumbashi en septembre 2021. Les sessions parlementaires de mars et septembre 2022 ne l’ont pas non plus prévue malgré la pression de Tshiani.
Possibilité de l’émergence d’un violent brasier à travers tout le pays après la sempiternelle fournaise de l’Est et l’incendie non maitrisé de Kwamouth à l’Ouest
L’ennemi redouté Katumbi a abattu ses cartes en décembre 2022 alors que l’échéance de la présidentielle et des législatives de 2023 pointe à l’horizon, Tshiani et Mboso ont attendu l’ouverture de la session de mars en cours pour réactiver la machine folle à la faveur de l’audience que le second a accordée au premier. «Je viens de recevoir la proposition de Tshiani pour la deuxième fois. Je traduirai fidèlement l’expression de sa volonté aux honorables députés», a commenté le président de la chambre basse du Parlement, marchant sur la procédure prévue par le Règlement intérieur, provoquant de l’indignation parmi les députés. Et les premières réactions n’ont pas tardé.
«Dans la pratique parlementaire, on a jamais vu un président d’une chambre commenter la réception d’une proposition de loi venant d’une personne ne faisant pas partie de sa chambre. Il y a donc un complot politicien derrière cette démarche. Mboso a vendu la mèche sans le savoir en faisant ces commentaires traduisant publiquement sa détermination à prêter main-forte au promoteur d’un projet jugé clivant et anticonstitutionnel. En dehors du projet de loi des finances, toutes propositions ou projets des lois passent par le service habilité, qui accuse réception et transmet au bureau», a expliqué sous le sceau de l’anonymat un parlementaire de l’Union sacrée, convaincu que Mboso joue au pyromane et rappelant les troubles mortels enregistrés en Côte d’Ivoire à cause de l’Ivoirité.
«Mboso aurait pu s’en sortir avec les lauriers du sage comme en 2021 quand il avait refusé de souscrire à ce projet explosif. Mais le vieux speaker de l’Assemblée nationale a donné le signe qu’il a, cette fois-ci, accepté de jouer le jeu de la violation de la Constitution, de l’exclusion de Katumbi, candidat sur les rangs à la présidentielle de 2023», a aussi réagi un sénateur, demandant à Mboso de revenir à la raison et, dans le pire des cas, de s’assumer le moment venu.
Sur Twitter, l’ancien gouverneur de l’Equateur Tony Cassius Bolamba a promis de ne pas laisser passer cette imposture. «Citoyen @CMbosoNkodia on peut tout reprocher au Maréchal sauf une chose: il n’a pas divisé son peuple! Recevoir ces ségrégationnistes est le summum de l’opprobre de notre unité nationale! Unitariste que je suis ne laisserai pas passer ça. Vs induisez la Républik ds l’erreur!», a-t-il posté le 17 mars. De l’avis des analystes, Bolamba a fait passer un message à l’ancien dignitaire mobutiste: «Mboso ne saurait être exonéré si ça dégénérait. Il a illustré sa détermination à jouer à l’apprenti sorcier même si cela pourrait lui retomber sur le nez. Laissant ouverte la possibilité de l’émergence d’un autre violent brasier à travers tout le pays, après la sempiternelle fournaise de l’Est et l’incendie qui continue d’endeuiller Kwamouth dans le Maindombe, à l’Ouest, aujourd’hui en train de consumer vies humaines et cases dans son propre terroir du Kwango et dans la capitale».
En Côte d’Ivoire, les violences engendrées par l’ivoirité ont coûté la prison à Laurent Gbagbo et à son ancien ministre de la Jeunesse, Charles Blé Goudé, tous deux emprisonnés à La Haye pendant près de dix ans.
YA KAKESA